Le Panthéon, les femmes et l’écriture égalitaire
Ce fait est d’autant plus remarquable que le Panthéon est avant tout une histoire d’hommes. La phrase inscrite sur son fronton nous donne d’ailleurs le ton et l’idée : « Aux grands hommes la patrie reconnaissante ». C’est en effet en 1791 que les premières dépouilles de personnalités ayant marquées l’histoire de France sont admises et ces héros de la patrie sont alors tous des hommes …
Il faudra attendre plus d’un siècle, pour qu’en 1907, Sophie Berthelot soit admise. Épouse de Marcellin Berthelot, la famille n’avait consenti à la panthéonisation de ce dernier qu’à la condition que sa femme puisse reposer à ses côtés.
Il faudra donc en réalité attendre 1995 pour que Marie Curie, double prix Nobel, entre au Panthéon en reconnaissance de son travail.
Ainsi la panthéonisation de Joséphine Baker, talentueuse artiste et résistante reconnue relève d’un double symbole représentatif de la diversité : elle est la première femme de couleur à intégrer ce monument emblématique.
Mais en ce qui concerne Gisèle Halimi, il n’en sera pas de même pour le moment.
Figure emblématique du combat féministe et avocate engagée, ses prises de position contre la guerre d’Algérie ont été jugées trop problématiques. Un hommage national doit avoir lieu au début de l’année 2022 aux Invalides. De nombreuses personnalités agissent cependant pour que le Panthéon accueille également Gisèle Halimi.
Pourquoi si peu de femmes ?
Un rapport de 2013 « Pour faire entrer le peuple au Panthéon » suggérait déjà de féminiser davantage le Panthéon : « Il serait préférable que les personnalités distinguées par le Président de la République dans la période qui vient soient toutes des femmes. »
En effet, depuis la Ve République, c’est le président de la République qui choisit les futurs locataires de l’illustre monument en signe d’hommage aux grands personnages de l’Histoire de France.
Mais que d’hommes, que d’hommes !
Une explication à cette situation ?
Le fait que notre société repose sur un substrat patriarcal a contribué à cet écueil. Mais si tout cela n’était aussi qu’une question de langage ? Et si le choix des mots influençait notre pensée ?
La situation aurait-elle été la même si le mot « Personnages », plus neutre, avait orné le fronton du Panthéon ?
Pour apporter des éléments de réponse, nous vous invitons à réaliser cette petite devinette qui est extraite de l’ouvrage de Pascal Gygax, Sandrine Zufferey, Ute Gabriel Le cerveau pense-t-il au masculin ? Cerveau, langage et représentations sexistes. Le Robert-2021 et qui en dit long sur nos représentations stéréotypées :
« Un père et son fils partent en voyage et ont un accident. Le père décède, mais le fils survit et est amené à l’hôpital, un chirurgien de garde se présente et dit : « Je ne peux pas opérer, c’est mon fils. » Comment est-ce possible ? Alors, avez-vous trouvé la bonne réponse ?
L’UNSA Éducation salue la panthéonisation de Joséphine Backer qui représente un acte d’ouverture très positif.
Mais il serait dommage de s’arrêter en si bon chemin. Les héroïnes n’ont pas manqué depuis 1791 et il est important que toutes ces grandes femmes qui ont fait l’histoire de France ne soient plus des invisibles aux yeux de notre République. Notre politique d’égalité se doit d’être exemplaire à tous les niveaux et au risque de bousculer nos propres représentations, ne laissons plus le masculin l’emporter sur le féminin !
Pour aller plus loin :
Pour découvrir le livre en 2minutes de Pascal Gygax, Sandrine Zufferey, Ute Gabriel Le cerveau pense-t-il au masculin ? Cerveau, langage et représentations sexistes.
5 minutes pour comprendre : « L’influence du langage sur notre pensée »