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Retraites : une réforme préoccupante pour les femmes

Les femmes sont bien souvent les grandes oubliées des réformes. Celle concernant les retraites n’échappe pas à la règle. En raison de salaires plus bas et de carrières discontinues, les femmes cotisent généralement moins pour leur retraite et se retrouvent donc à toucher moins de droits. Ainsi, la réforme proposée qui vise à augmenter l’âge de départ à la retraite et l’allongement de la durée de cotisation, changera-t-elle la situation déjà très inégalitaire ? À vouloir « sauver » à tout prix nos retraites ne risque-t-on pas au contraire d’aggraver encore davantage la situation des femmes ? Pour essayer d’y voir plus clair, l’UNSA Éducation revient sur les conséquences de la réforme pour les femmes dont l’étude d’impact présentée en Conseil des ministres, ce lundi 23 janvier, apporte des éclairages.

Les femmes touchent en moyenne une pension inférieure de 40% à celle des hommes.

Pour rappel, le montant des pensions dépend :

  • du salaire initial (75 % du traitement brut hors primes des six derniers mois dans la fonction publique, 50 % de la moyenne des 25 meilleures années dans le secteur privé)
  • de la durée de cotisation nécessaire pour avoir une retraite à taux plein avec la prise en compte d’une décote ou d’une surcote
  • de l’âge d’ouverture des droits ( 62 ans actuellement)

Avec le système actuel, les femmes sont déjà les grandes perdantes. En effet, les inégalités de salaires- y compris à diplôme équivalent- et la carrière professionnelle souvent saccadée des femmes -rythmée par des temps partiels fréquemment subis et des taux d’activité plus faibles- agissent comme une « double peine » pour les femmes à la retraite.

Or, la réforme envisagée va aggraver cette situation.

Les inégalités salariales sont au cœur des différences de pensions

À travail égal, les femmes gagnent en moyenne 16,1% de moins que les hommes.

Dans la Fonction Publique, la différence de salaire est de 11,6 % au détriment des femmes et en fin de carrière celle-ci atteint 18%. En effet, si les femmes y sont très majoritaires elles sont, en revanche, surreprésentées dans la catégorie C, c’est-à-dire la catégorie la moins rémunérée de la fonction publique.

Une majorité de femmes exclues du minimum vieillesse à 1200 euros

Le rapport du Conseil d’orientation des retraites (COR) en septembre dernier rappelait que les femmes sont moins souvent en emploi que les hommes quel que soit l’âge. Les chiffres clés de 2022 font apparaître cet écart qui est, selon les classes d’âge, de 4 à 8,4 % en deçà de celui des hommes avec un écart maximal entre 25 et 49 ans.

De plus, les chiffres clés de 2022 font état du taux de pauvreté selon le sexe et le type de famille or, 35% des personnes pauvres, c’est-à-dire dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté soit 1 102 euros par mois en 2019, sont des mères de famille monoparentale.

Elles sont également plus nombreuses à vivre en dessous du seuil de pauvreté : 4,9 millions de femmes contre 4,3 millions d’hommes en 2019. C’est donc bien une « double peine » qui s’exerce sur ces femmes puisque le minimum vieillesse annoncé à 1200 euros leur sera très difficilement accessible puisqu’il ne concerne que les carrières complètes à taux plein.

Une pénibilité du travail qui concerne aussi les femmes mais qui n’est pas toujours reconnue comme telle

Les femmes sont nombreuses à exercer des métiers précaires, pénibles avec des horaires atypiques. Cependant, la pénibilité de ces métiers n’est pas toujours reconnue comme telle. Augmenter l’âge de départ à la retraite, c’est risquer d’exposer davantage les femmes à des conditions de travail difficiles notamment en raison du caractère physique et/ou répétitif de leur travail et des horaires irréguliers, en mettant leur santé en péril ou en les contraignant à partir prématurément.

Le temps partiel des femmes impacte à la baisse le montant de leur pension

Le temps partiel concerne essentiellement les femmes : 1 femme sur 4 contre 1 homme sur 10. Dans la moitié des cas, il est pris pour raisons familiales, c’est-à-dire pour s’occuper des enfants. Or, si le travail à temps partiel n’a pas d’incidence sur la durée d’assurance pris en compte pour la retraite, il en a sur le montant de cette dernière qu’on relève du régime public ou privé- dans ce dernier cas, les revenus annuels doivent être suffisants pour valider 4 trimestres.

Ainsi, avec la réforme, les femmes seront bien les grandes perdantes. L’argument avancé du gouvernement d’une retraite plus élevée pour les femmes ne fonctionne pas si on compare à âge égal, 64 ans. En effet, les femmes ne bénéficieront plus de la surcote éventuelle à laquelle donnait droit une carrière complète à partir de 62 ans et dont elles auraient pu bénéficier avant la réforme.

De plus, l’accélération du report de l’âge légal va obliger plus de femmes à repousser leur départ à la retraite déjà amorcé par la réforme Touraine de 2014-les 43 années de cotisations requises pour partir à taux plein interviendraient dès 2027 et non plus en 2035-. Ce phénomène concerne davantage les femmes que les hommes. En effet, celles-ci bénéficiaient de trimestres validés grâce au congé maternité-qui peuvent représenter jusqu’à 8 trimestres supplémentaires par enfant-pour partir à taux plein à 62 ans. Désormais, ces trimestres pourront ne plus être d’aucune utilité pour les femmes qui devront poursuivre, quoi qu’il en soit, leur activité jusqu’à 64 ans.

Pour l’UNSA Éducation, la réforme proposée qui vise donc à augmenter l’âge de départ à la retraite et à allonger la durée de cotisation pénalise davantage les femmes qui ont des carrières plus courtes et des salaires plus bas que les hommes. Avec une telle réforme, les femmes risquent d’avoir plus de difficultés à atteindre les conditions d’âge et de cotisations requises pour une retraite complète. C’est tout un système à reconsidérer à la lumière des évolutions de la société.  La question de la pension de réversion élargie au Pacs en est une. La prise en compte de la carrière professionnelle des femmes et de ses spécificités en est une autre. Toutes ces questions doivent impérativement faire l’objet d’une véritable réflexion, si on souhaite pouvoir atténuer les inégalités et garantir une retraite équitable à toutes les femmes.

 

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