Analyses et décryptages

Formation à la laïcité : que retenir du rapport Obin ?

Jean- Pierre Obin a remis officiellement le 14 juin dernier son rapport consacré à « la formation des personnels à la laïcité et aux valeurs de la République » au ministre de l’Éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Ce document, commandé par le ministre à la suite de l’assassinat de Samuel Paty, fait un état des lieux des dispositifs existants et donne un ensemble de préconisations. L’UNSA Éducation qui avait été auditionnée en mars par l’Inspecteur général, revient sur le contenu de ce rapport.

Tout d’abord, le constat est clair : la formation des personnels de l’éducation est essentielle mais elle est actuellement très insuffisante. En effet en ce qui concerne la formation continue, le rapport souligne que seul.es 1% des enseignant.es a suivi une journée de formation dans le premier degré et 4% dans le second degré. Des chiffres qui peuvent par ailleurs, être mis en relation avec l’un des principaux enseignements de la 9ème édition de notre baromètre qui indique que 80% des personnels souhaitent se former à la laïcité et être accompagnés dans ce domaine.

En ce qui concerne la formation initiale, celle-ci est décrite comme étant très inégale par manque de cadrage national. Elle est également fortement critiquée dans le rapport qui relate des « dérives idéologiques » et un contrôle inexistant des plaquettes de formation proposées et du contenu des enseignements dispensés.

Plusieurs actions sont donc proposées dont :

–       Un dispositif de formation sur 4 ans concernant tous les personnels, avec la mise en place dès septembre 2021 d’une première formation d’une journée dans chaque école, collège et lycée.

–       La constitution d’un vivier de 1000 formateurs et formatrices à l’échelle nationale sous la houlette d’un « grand établissement d’enseignement supérieur »

–       Une formation continuée sur 3 ans pour les nouveaux.elles titulaires enseignant.es et CPE

–        La formation systématique des assistant.es d’éducation sur la gestion des atteintes à la laïcité, mais aussi des AESH et des ATSEM.

–       L’élaboration d’un référentiel commun de compétences et de contenus pour les enseignant.es et CPE

–       Une formation obligatoire (10h minimum) pour tous les personnels contractuels.

 

Notre fédération se félicite que la question de la formation soit un levier prioritaire préconisé dans ce rapport et le déploiement d’actions concrètes sur le terrain est une bonne chose. Cependant, si l’objectif essentiel est bien celui d’éduquer à la laïcité, il ne peut se satisfaire d’une feuille de route qui prendrait sens autour d’un simple « catéchisme républicain ». C’est pourquoi l’approche par le droit, qui est préconisée par Jean-Pierre Obin, nous semble être une très bonne démarche.

Remarques et perspectives

La publication de ce rapport s’est accompagnée d’un dispositif qui a été présenté lors du dernier CTMEN. Notre fédération, que ce soit sur le contenu du rapport ou sur le dispositif de formation, a formulé des remarques. On peut tout d’abord s’étonner de certaines formulations du rapport de Jean-Pierre Obin : en effet, certains passages, en particulier au début du rapport semblent plus polémiques que le résultat d’une analyse. Plus globalement, l’idée que rien n’a été fait dans le domaine de la formation des personnels à la laïcité, qui transparaît parfois, n’est pas exacte. Certains manques sont également dommageables : un seul exemple, lorsque le document cite le CNAM comme étant l’établissement supérieur qui pourrait – à raison – accompagner ce besoin de formation, il n’est pas fait mention du certificat de compétence « Action publique et gestion de la laïcité en société » que celui-ci dispense gratuitement depuis 2019. Surtout, il ne faudrait pas croire que depuis le précédent rapport Obin de 2004, l’institution, mais également d’autres organismes, ne se sont pas préoccupés de la formation à la laïcité. Nous renvoyons ici à nos précédents articles sur le dernier rapport de l’IGESR, rendu public en 2020 qui offre un constat bien plus détaillé sur tous les aspects de l’enseignement de la laïcité, et sur l’action de l’Observatoire de la laïcité qui s’est régulièrement préoccupé de formation comme le souligne son dernier rapport d’activité.

Enfin, il est nécessaire de connaître dorénavant en détail la déclinaison officielle des préconisations de ce rapport : nous revoyons ici à notre analyse « formation à la laïcité : des pistes à consolider »

 

Pour notre fédération, une société inclusive, émancipatrice, plus juste et plus solidaire se construit nécessairement dans le respect des valeurs de la République et par-delà l’expression des différences. Mais il ne faut pas négliger pour autant toutes les composantes de la société, les fractures qui obligent à recréer du commun autour du principe de laïcité, qui, comme le souligne le rapport Obin, est un instrument de la liberté de toutes et tous. Tout cela ne peut se concevoir sans la nécessaire considération de ce qu’est l’école dans sa complexité, à savoir un lieu de mixité sociale et de diversité.

Pour l’UNSA Éducation, la laïcité est un principe constitutionnel, qui accompagnée des autres valeurs de la République, assure la liberté de conscience et doit garantir la liberté d’expression. Elle constitue également une garantie d’égalité et d’émancipation de tous les individus.

Pour aller plus loin :

Le rapport Obin

En décembre dernier, l’UNSA Education avait organisé un webinaire sur la laïcité, où les questions de formation ont été abordées à plusieurs reprises

 

Sélectionnés pour vous
+ d’actualités nationales