Agir avec vous

Dématérialisation : Faciliter mais ne pas exclure

Nous avons toutes et tous effectué en ligne des démarches administratives qui nécessitaient auparavant un déplacement et parfois des heures d'attente. Carte grise, impôts, suivi du courrier, fiche de paye, les exemples sont nombreux. Avec des issues plus ou moins heureuses...

Nous avons toutes et tous effectué en ligne des démarches administratives qui nécessitaient auparavant un déplacement et parfois des heures d’attente. Carte grise, impôts, suivi du courrier, fiche de paye, les exemples sont nombreux.

Avec des issues plus ou moins heureuses… Ça marche ? On est ravi d’avoir gagné du temps et on se félicite de cette modernité. Ça bloque ? On cherche désespérément un numéro de téléphone ou un mail pour joindre un∙e conseiller∙ère, qui n’existe plus. Alors on tempête que « C’était mieux avant ».

.

Et dans l’éducation ?

Le service public d’éducation n’est pas étanche à ce mouvement général de numérisation des services.

Nous avons depuis longtemps intégré la gestion numérique des absences, des évaluations, des l’orientation, du partage et stockage d’informations via les ENT etc… Personne ne voudrait revenir aux kalamazo qui encombraient les salles des professeurs..

Cependant, quand on va voir de plus près ce qu’il en est réellement, tout n’est pas simple….

 

Des personnels non formés face à des applications ministérielles défaillantes

Soyons honnête : qui n’a pas déjà vécu l’un de ces moments où l’usage d’une application ministérielle nous amène à un état où l’on ne sait plus si l’exaspération ou le désespoir l’emporte ?

Personne ne parvient à comprendre comment c’est possible, mais la plupart des applications mises en place par notre employeur sont défaillantes : bugs, saturation, ergonomie catastrophique, tout y est pour compliquer ce qui devrait être simplifier. Ne parlons même pas d’un espoir utopique que ces applications soient reliées entre elles afin de nous éviter de saisir les mêmes données à de multiples reprises.

Base élèves, applications destinées à l’évaluation, inscriptions et organisation des examens, à la rédaction d’actes d’administratifs, élaboration du budget, facturation, correction des copies d’examens, demande d’aide au financement d’un projet, tout est compliqué, mal fichu, cloisonné…voire inaccessible hors les bâtiments (télétravail obligatoire ou pas !).

Ne parlons pas des logiciels dont la mise en oeuvre est annoncée, puis reportée, sans avoir pris la peine d’en informer les personnels.

Quant à l’appropriation de leur usage, qui nous a formé∙es si ce n’est nous-même en nous débrouillant par nous-même ? Et leur utilisation a nécessité bien des fois d’utiliser notre matériel informatique personnel.

.

Un progrès… qui ne doit pas amener à régresser

Une dématérialisation conçue par et pour des internautes experts et diplômés démunit les usagers  les moins avertis. Elle fait apparaître une nouvelle difficulté : l’illettrisme numérique, également appelé « illectronisme ». Selon l’ACNI (Agence nationale de lutte contre l’illettrisme), ce terme désigne une maîtrise insuffisante des compétences numériques nécessaires à une personne pour effectuer de manière autonome les actes de la vie courante.

Les familles confrontées à cette nouvelle difficulté sont déjà les plus éloignées de l’Ecole. Celles qui ont le plus besoin du contact humain. Celles qu’il est nécessaire d’accompagner pour la compréhension des attendus de l’Ecole et pour effectuer toute démarche administrative.

Bref, on accentue les inégalités existantes.

La dématérialisation des demandes de bourses scolaires en est un parfait exemple : comment demander aux familles concernées – par définition les plus démunies – de posséder le matériel et les compétences numériques pour effectuer la démarche ?

Les chiffres ont parlé : l’année de la mise en place obligatoire de ce nouveau système, le nombre d’élèves boursiers a considérablement chuté. Appauvrissant encore davantage les plus précaires.

Qui pallie aux difficultés, aide, accompagne, rassure, prend du temps pour accompagner les familles ? Les personnels : administratifs, sociaux, de vie scolaire, de direction, d’enseignement etc…

Avec un constat final que ce qui devait faciliter et gagner du temps a compliqué, a alourdi la charge de travail des personnel et va à l’inverse des objectifs éducatifs que sont la réduction des inégalités.

Et on pourrait citer tant d’exemples de ce type …

Citons également les personnes porteuses de handicap dont l’accès n’est pas adapté notamment dans l’ergonomie des sites (exemple : système de vérification par captcha non visible pour les malvoyants).

.

Formation et accompagnement

Comme tout changement de pratique, il doit être progressif, accompagné, et partir des besoins de l’usager pour lui permettre d’entrevoir l’intérêt du changement.

De plus, la réussite de la numérisation montre que la réussite ne tient pas qu’aux seuls aspects techniques. Ainsi tout ne peut pas être dématérialisé. Particulièrement en matière d’éducation.

A l’heure où tous les contenus – des plus pertinents aux plus dangereux – sont disponibles sur internet, il faut garder en tête que les méthodes de travail, l’apprentissage de l’esprit critique, les valeurs sur lesquelles se construiront les citoyens de demain, tout cela nécessite des interactions humaines, des compétences éducatives qu’aucun logiciel ne peut proposer.

Reposant sur l’interaction entre les personnes, les processus et les technologies, elle requiert une stratégie pensée dans un cadre interministériel, un cadre réglementaire et légal, des contenus de qualité et accessibles et les compétences appropriée

 

Évoluer dans un monde en mouvement est indispensable. Accompagner, former, penser et agir ensemble et dans un souci de bien commun, voici les valeurs portées par l’UNSA Éducation. Alors oui à la numérisation, mais dans de bonnes conditions et en ne laissant personne au bord du chemin.

 

Contact : fp@unsa-education.org

Sélectionnés pour vous
+ d’actualités nationales