Séparatisme et ségrégation sont sur un bateau, c’est l’École publique qui tombe à l’eau
CSE Choc des savoirs, 8 février 2024
Déclaration liminaire de l’UNSA Éducation
Pour l’UNSA Éducation, l’hétérogénéité est une force plus qu’une faiblesse. L’explication de l’échec des politiques publiques en matière d’éducation et la baisse des résultats des élèves français doit être cherchée ailleurs.
L’enchaînement des réformes incohérentes entre elles, la suppression des moyens, le manque d’attractivité de nos métiers, le manque de formation des personnels ne peuvent être écartés d’un revers de main.
Mais, puisqu’il s’agit aujourd’hui de clouer au pilori l’hétérogénéité, c’est bien de mixité sociale et scolaire dont nous voulons parler.
Le séparatisme et l’entre-soi sont déjà à l’œuvre entre établissements publics et privés sous contrat. La publication des données concernant les IPS des collèges, contrainte par décision de justice, le prouve de manière irréfutable. Les établissements privés sous contrat sont pourtant financés aux trois quarts par la collectivité.
Les résultats des évaluations PISA montrent que ce sont les élèves issus des milieux les plus défavorisés qui ont les résultats les plus bas. Or, beaucoup d’entre eux sont déjà regroupés dans les quartiers populaires et les établissements classés en éducation prioritaire à cause d’une politique de la ville délétère et d’un manque de volonté politique de faire de la mixité sociale une réalité. C’est pourtant la seule manière de faire nation, de garantir la cohésion sociale.
Plutôt que de généraliser les actions entreprises depuis 2015 sur la sectorisation scolaire à Toulouse, Paris et ailleurs ; plutôt que de contrôler davantage la manne financière accordée aux établissements privés et de remettre en cause les avantages dont ils bénéficient de fait à travers la liberté de recrutement dont ils disposent, vous préférez allumer des contre feux démagogiques basés sur des sondages d’opinions, sur le “bon sens” élevé au dessus de la science.
Le projet porté initialement par notre désormais premier ministre, concernant le “choc des savoirs”, aura pour conséquence d’ajouter à la ségrégation urbaine, au séparatisme scolaire et à l’entre-soi déjà à l’œuvre, une ségrégation au sein même de chaque collège de France.
Vous avez beau nous expliquer que les classes de niveaux ne sont pas votre objectif, que le collège unique n’est pas attaqué, l’avis rendu par le conseil supérieur des programmes (CSP) publié le 30 janvier n’est pas fait pour nous rassurer, bien au contraire.
Et que dire de l’annonce du premier ministre concernant la modification de la loi SRU ? Si celle-ci est mise en œuvre, cela actera le renoncement de l’État à garantir la cohésion sociale sur l’ensemble du territoire.
L’UNSA Éducation porte le projet d’une société éducative capable de réduire les inégalités et fait de l’émancipation de chacune et chacun le cœur de la mission éducative. La République doit aussi être sociale pour être démocratique : le maintien de la cohésion sociale garantit le vivre ensemble. L’UNSA Éducation dénonce donc l’ensemble des mesures du bien mal nommé “choc des savoirs” et demande l’abandon de ce projet ainsi que l’ouverture de discussions pour déployer des mesures fortes portant davantage de mixité sociale et scolaire et des moyens pour gérer l’hétérogénéité au profit de toutes et tous.
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Tribune du CNAL parue dans Libération sur la mixité scolaire