Académie de Créteil : les médecins scolaires ont été entendus par le recteur
Suite à une demande d’audience du SNMSU-UNSA Éducation auprès du recteur en septembre dernier, une délégation a été reçue le 18 janvier 2021 par Monsieur le Recteur, Mme Thirard, secrétaire générale, Mme Laugier, directrice de ressources humaines et Monsieur Cherfi, secrétaire général adjoint.
Le SNMSU a de nouveau alerté Monsieur le Recteur sur :
-La crise sanitaire qui contraint les médecins scolaires à devoir assurer de
nouvelles missions, au détriment de leurs missions habituelles,
– Le manque de moyens humains : 75 postes de médecins scolaires sur 107
postes budgétés sont vacants dans l’académie de Créteil,
– Des indemnités insuffisantes (IFSE et CIA) qui ne sont pas utilisées comme levier pour rendre financièrement attractifs les postes de médecins
scolaires, alors que les budgets sont disponibles du fait du grand nombre
de postes de titulaires vacants,
– L’épuisement professionnel des médecins en poste qui, étant peu
nombreux, doivent assumer des responsabilités d’autant plus lourdes,
– Le manque de cadrage académique pour prioriser les missions des
médecins,
– L’obsolescence du matériel mis à disposition des médecins.
Manque de moyens humains
Les effectifs des médecins de l’éducation nationale (MEN) de l’académie continuent de chuter dangereusement, c’est pourquoi le SNMSU alerte le rectorat depuis des années.
L’Académie de Créteil est l’académie la plus déficitaire en médecins, puisque 75 postes sont vacants sur 107 et publiés sur AMIA (décembre 2020), soit 70% des postes budgétés. De plus, au moins 5 départs sont prévus à la fin de l’année scolaire 2020-2021.
En Seine et Marne, 11 ETP médecins sont en poste sur les 28 postes offerts pour une population de plus de 300 000 élèves.
En Seine Saint Denis, 14 ETP médecins sont en poste sur les 49 postes offerts pour une population de plus de 350 000.
En Val de Marne, 8 ETP médecins en poste sur les 30 postes offerts pour une population de plus de 260 000 élèves.
Comment, dans ces conditions, la médecine scolaire peut-elle être efficace et efficiente ?
Comment, dans ces conditions, assurer des conditions de travail convenables aux médecins en poste pour leur permettre d’assurer leurs missions auprès des élèves ?
Comment, dans ces conditions, arriver à recruter de nouveaux médecins ?
Depuis plusieurs mois, l’ensemble des médecins de l’éducation nationale de l’académie sont mobilisés par la gestion de la crise sanitaire liée à la Covid 19.
La crise sanitaire nous a conduit à devoir assurer la mise en place des différents protocoles sanitaires et le contact-tracing des cas élèves et adultes des établissements scolaires de la maternelle au lycée, cela au détriment de nos autres missions habituelles.
Du fait du faible nombre de médecins dans l’académie, le SNMSU dénonce
l’impossibilité pour les médecins d’assurer leurs missions, qui sont de plus
multiples, en absence de priorisation par notre rectorat :
– Les bilans de santé des élèves de 6 ans,
– Les avis médicaux pour l’aptitude aux travaux réglementés pour les jeunes de 15 à 18 ans,
– Les PAI,
– Le suivi des élèves relevant du handicap,
– L’instruction des dossiers pour les aménagements aux examens des élèves
ne relevant pas de la MDPH,
– Les examens à la demande qui ne cessent d’augmenter.
La taille des secteurs continue à augmenter ainsi que le nombre de secteurs vacants confiés aux médecins encore en poste. L’effectif d’élèves par médecin se chiffre entre 12000 à 35000 élèves par médecin.
Lors d’une bilatérale avec le rectorat, l’UNSA Éducation a dénoncé la problématique concernant les avis médicaux pour l’aptitude aux travaux réglementés qui ne peuvent plus être délivrés par les médecins scolaires, faute de temps pour effectuer les visites médicales. Cette situation fait alors reposer la responsabilité de l’absence d’avis sur les chefs d’établissement, ce qui n’est pas entendable pour l’UNSA Éducation.
A la question « Quelle politique de recrutement est mise en place par le rectorat ? », le rectorat a indiqué qu’une campagne de publication d’annonces de recrutement a été lancée durant 3 mois sur des sites spécialisés jusqu’en juillet 2020, mais non renouvelée. Celle-ci n’a pas permis de recruter un seul médecin.
Les médecins scolaires se sont mobilisés depuis 2010 pour faire connaitre le métier auprès des facultés de médecine, pour devenir maitre de stage universitaire (MSU) en se portant volontaires pour accueillir des internes en médecine générale de 3ème cycle. Sur les trente MEN
titulaires en poste, huit sont MSU et poursuivent chaque année leur formation universitaire.
L’administration doit prendre en compte l’engagement des professionnels sur ce champ. Ce sont des leviers pour promouvoir la santé à l’école et faire connaître le métier de MEN. Mais cela ne sera efficace que si l’on donne des perspectives à notre métier et une image positive au sein de la profession médicale.
A l’issue de ces stages, un nombre anecdotique de internes en médecine font le choix de la médecine scolaire en raison de la différence salariale importante avec les autres emplois de médecine salariée. La possibilité d’effectuer des remplacements en médecine scolaire pour les médecins non thésés serait à réfléchir pour leur permettre d’exercer en médecine scolaire à la fin de leur stage.
Le SNMSU a souligné que le nombre important de postes vacants est un frein pour recruter.
Moins il y a de médecins, plus la charge de travail repose sur les mêmes personnes. La diminution du nombre de médecins scolaires entraine un véritable désamorçage de leur savoir-faire par extinction de leur corps professionnel.
A la problématique du manque de moyens humains, le rectorat a répondu qu’il s’agissait d’un sujet national. Cet argument n’est pas recevable. D’autres académies réussissent à rendre attractif les postes de médecins scolaires et le nombre de postes vacants est proportionnellement moins élevé.
Dans le contexte de baisse démographique des médecins, les enquêtes menées par le Conseil de l’ordre des médecins retiennent toutes qu’il y a une augmentation de l’exercice mixte (libéral et salarié), or la médecine scolaire n’en voit pas les retombées.
Des leviers existent donc. Pour le SNMSU-UNSA Éducation, la revalorisation indiciaire et indemnitaire en fait partie.
Rémunération et indemnités non attractives
Le SNMSU a expliqué au Recteur que les grilles de rémunération actuelles des médecins scolaires étaient en deçà des grilles des autres corps des médecins de la Fonction publique.
Monsieur le Recteur en a convenu, mais a répondu que la revalorisation indiciaire ne relevait pas de sa compétence. Toutefois, il a promis qu’il en informerait le cabinet du Ministre de l’Éducation Nationale et de la Jeunesse et des Sports.
L’augmentation du montant de l’IFSE n’est pas un levier envisagé par le rectorat, alors qu’elle pourrait être utilisée pour rendre les postes attractifs financièrement dans l’académie de Créteil. Pourtant cette politique indemnitaire relève bien de la compétence du Recteur, qui, de plus, dispose tout à fait des budgets nécessaires du fait du grand nombre de postes vacants
de médecins titulaires dans notre académie.
A noter aussi que le rectorat n’a pas donné suite au recrutement d’un médecin de PMI en 2019, car il a refusé de s’aligner sur la rémunération indemnitaire perçue par ce médecin en PMI !
Le SNMSU de Créteil dénonce aussi la baisse du CIA en 2020 par rapport à 2019, alors que la charge de travail des médecins a été considérablement accrue, notamment par la gestion de la crise sanitaire. Le SNMSU a rappelé que le CIA en vertu du décret du 20 mai 2014 est accordé en fonction de : « de l’engagement professionnel et à la manière de servir » de l’agent.
Le rectorat a expliqué que le montant du CIA a été alloué en fonction de l’enveloppe budgétaire et non de la valeur professionnelle. Force est de constater que la santé des élèves n’est pas une priorité de notre Recteur !
Le SNMSU a signalé que les médecins ne perçoivent plus la rémunération versée par l’A.R.S. pour l’accueil des internes en stage en médecine scolaire depuis un an et demi. Le Recteur s’est engagé à contacter l’ARS.
Epuisement professionnel, en attente d’un cadrage académique
Tout le travail et l’engagement professionnel des médecins se réalisent encore une fois dans la plus grande indifférence de notre ministère et de notre rectorat.
Les MEN expriment leur épuisement et aussi leur colère sur le fond comme sur la forme, certain(e)s sont proches du burn out.
La charge mentale, l’ampleur de leurs missions, les lourdes responsabilités qui pèsent sur eux, causent la perte de sens de leur travail. Cette accumulation de difficultés rencontrées dans leur travail au quotidien poussent certains d’entre eux à quitter leur poste (détachement, retraite anticipée, rupture conventionnelle, etc.) ou déclenche des états dépressifs de stress.
Plusieurs médecins ont consulté les médecins de prévention et les psychologues du travail et pour certain(e)s des arrêts de travail ont été prescrits. Plusieurs MEN ont de nouveau adressé à leur IA-DASEN et au Conseil départemental de l’ordre des médecins, une lettre de responsabilité en dénonçant la non-disponibilité des médecins pour cause de surcharge de travail pour se couvrir en cas de préjudice. C’est la raison pour laquelle, le SNMSU a demandé lors de l’audience « quelles sont les mesures que le rectorat compte mettre en place pour prévenir ce personnel de l’épuisement professionnel ? ». Au regard du faible nombre de médecins scolaires sur l’académie de Créteil et la multiplication des tâches avec la crise sanitaire, il est urgent pour le SNMSU et l’UNSA Éducation de Créteil de mettre en œuvre un plan santé académique de promotion de la santé en faveur des élèves et que soit actée une lettre de cadrage des missions des MEN à diffuser aux chefs d’établissement, IEN…
Des priorités de missions sont indispensables pour que les MEN ne soient plus dans l’obligation de hiérarchiser les demandes et pour qu’ils puissent répondre aux besoins des élèves, des familles et de tous les membres de la communauté éducative.
Le recteur a accueilli favorablement cette demande et s’est engagé a envoyé une lettre de cadrage prochainement.
Un nouveau matériel
Les médecins disposent d’un matériel devenu obsolète. Les téléphones portables ne permettent plus d’ouvrir convenablement les pièces jointes au mail. Les ordinateurs portables ne disposent pas des logiciels Word. Ainsi, certains médecins sont obligés d’utiliser leur matériel personnel ! Cette situation ne peut plus durer.
Le rectorat a expliqué qu’il était prévu de changer le matériel des médecins scolaires en mars 2020. Or, compte tenu du confinement, la priorité a été donné aux personnels administratifs qui devaient travailler de leur domicile. En 2021, le rectorat promet que les médecins scolaires seront enfin pourvus en téléphonie mobile et en ordinateur portable performants.
Le SNMSU a obtenu :
– Une lettre de cadrage du Recteur priorisant les missions,
– Le recteur va solliciter le cabinet du MENJS sur la revalorisation de la grille de rémunération des MEN,
– Le renouvellement intégral du matériel informatique en 2021.
Le SNMSU et l’UNSA Éducation de Créteil attendent que ces engagements soient tenus.
Ces engagements en faveur des médecins scolaires sont insuffisants, dans l’intérêt des élèves.
Le SNMSU continuera à se mobiliser pour une politique de santé à l’école de qualité qui réponde aux besoins des élèves, en particulier pour les populations les plus démunies ou à besoins spécifiques.
Le SNMSU-UNSA Éducation continuera à se mobiliser pour pérenniser l’expertise des médecins de l’éducation nationale.
Aziza BELDJOUDI et Maeve TREILLET