Analyses et décryptages

Parcoursup n’est pas responsable de tous les maux de l’orientation

C'est une réponse simpliste qui nuit aux revendications légitimes que nous devons porter. Bien entendu la plate-forme d'orientation Parcoursup est perfectible, nul ne le nie. Dans l'intérêt général, il est nécessaire de faire évoluer en permanence cet outil de gestion des flux (près de 930 000 candidats par an, dont 630 000 néo-bacheliers) et c'est le cas. En tant qu’organisation syndicale représentative, l’UNSA Éducation y participe activement et reste une force de proposition. Pour autant, critiquer Parcoursup à outrance, comme on s’attaquerait à un totem, est contre-productif.

En effet, on peut dénoncer les problèmes réels de l’orientation, du déterminisme social, de la pénurie de moyens notamment dans le supérieur sans être caricatural concernant Parcoursup.

Focaliser l’attention depuis trop longtemps sur un dispositif en l’accablant de tous les maux, exonère ainsi les décideurs successifs qui ont laissé dériver la situation de l’enseignement supérieur, en particulier dans les universités, depuis au moins deux décennies. C’est aussi passer sous silence que le système précédent, APB (admission post-bac), n’était pas meilleur (souvenons-nous des tirages au sort inadmissibles qu’il a généré). Il avait pour autant ouvert le champ des possibles en permettant aux futurs étudiants de connaître et de candidater à beaucoup plus de formations que lorsque les candidatures étaient des dossiers “papiers”.

Parcoursup n’est donc pas “l’Homme malade” du système. En effet, qui peut prétendre que si demain, à l’aide d’une baguette magique, on inventait un outil « parfait » de gestion des flux, cela permettrait à chaque étudiant de trouver une place assise dans les amphis de nos universités ? Ce nouvel outil fantasmé, pourrait-il corriger, même partiellement, les conséquences d’une nouvelle organisation du baccalauréat mal préparée et mise en place sans une coordination nécessaire avec le supérieur ? La réussite en licence progresserait-elle grandement ? La part de la reproduction des inégalités sociales engendrées par le système scolaire serait-elle réduite pour autant de façon automatique ? Bien sûr que non.

Tout simplement parce que Parcoursup ne sélectionne pas, Parcoursup ne décide pas. C’est un algorithme et il ne décide donc rien par lui-même. Ce sont bien les collègues, membres des commissions chargées du recrutement, qui analysent au mieux les candidatures des néo-bacheliers, soit pour les sélectionner lorsque leur formation est sélective, soit pour les accompagner et les orienter au mieux dans les licences universitaires. Ce sont nos politiques qui fixent les taux de boursiers à imposer dans les classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE), qui déterminent la priorité à accorder aux mêmes boursiers dans les internats. Ce sont nos politiques qui fixent les quotas pour chaque type de baccalauréat dans certaines formations.  Ce sont également nos représentants élus au parlement qui votent les budgets de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Nous, professionnels de la formation, de l’éducation, militants, ou tout simplement citoyens engagés, devons recentrer nos revendications sur des propositions qui seraient bénéfiques aux futurs étudiants.

  • Quid du taux d’encadrement ou des moyens par étudiant à l’université ?
  • Quid du manque de moyens et de formations pour permettre une orientation éclairée, sereine et réaliste au lycée ?
  • Quid de la transparence des critères réels de choix parmi toutes les candidatures et notamment des spécialités ou options choisies ainsi que du lycée d’origine des candidats ?
  • Quid des passerelles trop peu nombreuses pour permettre à chacun de trouver sa voie, en dépit d’un parcours atypique au lycée général, technologique ou professionnel ?
  • Quid de l’accès des classes populaires aux formations les plus sélectives ?
  • Quid de la vitrine offerte aux formations privées à travers cette plateforme ?
  • Quid des ghettos scolaires, de la ségrégation galopante et du manque de mixité sociale liée à une politique de la ville indigne qui assigne les plus pauvres à résidence ?

 

Ne cachons pas derrière un algorithme les errements de nos responsables politiques et concentrons-nous sur de vrais combats. C’est ce qu’attendent les professionnels de l’éducation et de la formation et plus largement la société.

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