Mettre l’Education au cœur du débat sur l’organisation territoriale de la France

A quelques semaines des élections régionales, en pleine réorganisation territoriale et des missions de l’Etat, la question du rôle des territoires dans l’Education se pose.

La réforme des rythmes scolaires se traduit de fait –et c’est heureux- par une réflexion et une mise en œuvre de nouveaux temps et projets éducatifs à l’échelle des communes ou des regroupements de communes. Même si la carotte financière du fonds d’amorçage est une incitation forte à établir des PEDT, il n’en demeure pas moins que dans de nombreux cas, le formalisme d’une démarche contrainte à souvent fait place à une véritable envie de bien faire, de construire conjointement une offre éducative cohérente et complémentaire, d’associer les équipes pédagogiques scolaires et les autres acteurs éducatifs hors de l’école.  D’un catalogue d’activités, parfois sans lien les unes avec les autres, les projets se structurent, se développent, prennent du sens. Si les collectivités locales les plus importantes peuvent s’appuyer sur leurs services (scolaire, enfance-jeunesse, sports, culture,…) pour accompagner ces élaborations, les plus petites attendent beaucoup d’un apport méthodologique et d’ingénierie de la part des services de l’Etat. Ainsi, chaque fois qu’un travail en bonne intelligence est construit entre les IEN et les conseillers techniques et pédagogiques jeunesse et sports, l’accompagnement des territoires y gagne en efficacité et en sens. La diversité des activités, leur articulation, leur participation aux projets d’écoles et au projet éducatif du territoire en sont renforcées.
Sans nier des propositions parfois encore trop occupationnelles, des conflits entre acteurs ici ou là, des manques de ressources financières ou partenariales à certains endroits, force est de constater que généralement la posture politicienne a été dépassée et que dorénavant c’est l’épanouissement des enfants et leur réussite éducative qui s’impose comme la priorité de ces politiques éducatives locales.

La seconde étape, en cohérence avec la réalité du socle commun, sera de faire entrer les collèges dans cette démarche. Deux difficultés seront alors présentes. Celle tout d’abord liée à la grande diversité des organisations des collèges. Entre l’établissement de ville qui recrute sur son quartier et celui, rural, dont les élèves viennent –par ramassage scolaire- parfois de communes très éloignées, les contraintes sont très différentes. L’autre fragilité repose sur le fait que ce sont les départements qui sont en charge de ce niveau d’établissements. Or, il faut bien constater que, là encore avec une réelle disparité de situations, les départements ne sont majoritairement pas les plus investis dans le domaine éducatif. Le nouvel organigramme de l’ADF a préféré l’éclatement des missions éducatives entre plusieurs commissions au maintien d’une seule commission spécialisée dans les questions d’Education. A côté des investissements –en baisse- dans la construction et la rénovation des bâtiments des collèges, peu d’assemblée départementale porte une politique éducative forte tant dans le champ scolaire que dans leur soutien aux associations qui développent d’autres formes éducatives en dehors de l’Ecole. Si le sport est généralement soutenu, la culture apparaît davantage comme une vitrine valorisant le patrimoine ou le rayonnement local et nombre de réseaux départementaux d’éducation populaire sont en difficulté par manque d’aide, mais aussi par faiblesse ou absence d’ambition politique territoriale. En parallèle, les missions « jeunesse et sports » noyées dans des directions départementales interministérielles tendent à ne plus être pensées et mise en œuvre dans leur dimensions éducatives, ce qui ne permet plus à cette échelon ministériel de proximité de jouer pleinement son rôle d’interlocuteur des collectivités territoriales et des associations, d’impulseur des dynamiques éducatives sur les territoires, de conseiller et d’expert.

Le niveau régional est d’une autre nature. Les services régionaux des ministères sont souvent éloignés des réalités du quotidien et peuvent apparaître comme des évaluateurs et des financeurs distants et peu impliqués dans l’accompagnement local s’ils ne sont pas relayés par des ancrages de proximité (antennes, conseillers de secteurs…). Par ailleurs, l’échelon régional dépasse le cadre de la scolarité obligatoire, s’adresse à un public de jeunes femmes et hommes et s’ancre dans la responsabilité du développement des territoires dont les conseils régionaux ont la compétence. Si la dimension économique est importante et trouve une résonnance directe avec la mise en œuvre de la formation professionnelle, elle ne peut être la seule dimension valorisée. Tout d’abord il est indispensable d’inscrire la réflexion sur la formation professionnelle dans la double évolution en cours : d’une part les métiers vont profondément changer, d’autre part dans sa vie professionnelle à venir, un jeune occupera successivement plusieurs métiers. Il s’agit donc de ne pas coller uniquement à la demande d’emploi d’aujourd’hui mais bien de former des personnes capables d’évoluer et de se reconvertir. A côté d’un bagage technique, il convient donc d’élever les compétences à apprendre à apprendre, à travailler en équipe, à anticiper, à imaginer demain…C’est en ce sens que les passerelles doivent être construites entre toutes les filières des lycées, dans une articulation avec les formations de l’enseignement supérieur et sans enfermer les apprenants dans la formation à un métier figé. Mais la dimension éducative du territoire régional ne peut se limité à celle de la formation professionnelle. La région doit également être porteuse de ressources culturelles, d’une offre de loisir, d’un tissu citoyen… Là encore les disparités sont grandes et la recomposition des nouvelles régions présente le risque de les accroître. Au-delà des calculs politiciens, se sont ces enjeux qui devraient être au cœur des projets qui seront soumis au vote des électeurs lors des élections régionales de décembre prochain.

Bien que peu décentralisée, la mission éducative est partagée. Si l’impulsion, les grandes orientations, la cadre scolaire, les personnels des ministères éducatifs (ENESR, JS, Culture) doivent demeurer du ressort de l’Etat, la construction des politiques éducatives ne peut se faire sans l’engagement et la participation active des collectivités territoriales. Plutôt que de craindre une décentralisation qui ne dit pas son nom, mieux vaut établir une coresponsabilité claire qui fixe les rôles, les engagements et les limites de chacun. C’est à cette condition que la refondation de l’Education en France peut prendre tout son sens et c’est pourquoi le sujet éducatif devrait être au cœur des débats sur la nouvelle organisation territoriale de l’Etat. Nous en sommes encore bien loin…
 

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A quelques semaines des élections régionales, en pleine réorganisation territoriale et des missions de l’Etat, la question du rôle des territoires dans l’Education se pose.

La réforme des rythmes scolaires se traduit de fait –et c’est heureux- par une réflexion et une mise en œuvre de nouveaux temps et projets éducatifs à l’échelle des communes ou des regroupements de communes. Même si la carotte financière du fonds d’amorçage est une incitation forte à établir des PEDT, il n’en demeure pas moins que dans de nombreux cas, le formalisme d’une démarche contrainte à souvent fait place à une véritable envie de bien faire, de construire conjointement une offre éducative cohérente et complémentaire, d’associer les équipes pédagogiques scolaires et les autres acteurs éducatifs hors de l’école.  D’un catalogue d’activités, parfois sans lien les unes avec les autres, les projets se structurent, se développent, prennent du sens. Si les collectivités locales les plus importantes peuvent s’appuyer sur leurs services (scolaire, enfance-jeunesse, sports, culture,…) pour accompagner ces élaborations, les plus petites attendent beaucoup d’un apport méthodologique et d’ingénierie de la part des services de l’Etat. Ainsi, chaque fois qu’un travail en bonne intelligence est construit entre les IEN et les conseillers techniques et pédagogiques jeunesse et sports, l’accompagnement des territoires y gagne en efficacité et en sens. La diversité des activités, leur articulation, leur participation aux projets d’écoles et au projet éducatif du territoire en sont renforcées.
Sans nier des propositions parfois encore trop occupationnelles, des conflits entre acteurs ici ou là, des manques de ressources financières ou partenariales à certains endroits, force est de constater que généralement la posture politicienne a été dépassée et que dorénavant c’est l’épanouissement des enfants et leur réussite éducative qui s’impose comme la priorité de ces politiques éducatives locales.

La seconde étape, en cohérence avec la réalité du socle commun, sera de faire entrer les collèges dans cette démarche. Deux difficultés seront alors présentes. Celle tout d’abord liée à la grande diversité des organisations des collèges. Entre l’établissement de ville qui recrute sur son quartier et celui, rural, dont les élèves viennent –par ramassage scolaire- parfois de communes très éloignées, les contraintes sont très différentes. L’autre fragilité repose sur le fait que ce sont les départements qui sont en charge de ce niveau d’établissements. Or, il faut bien constater que, là encore avec une réelle disparité de situations, les départements ne sont majoritairement pas les plus investis dans le domaine éducatif. Le nouvel organigramme de l’ADF a préféré l’éclatement des missions éducatives entre plusieurs commissions au maintien d’une seule commission spécialisée dans les questions d’Education. A côté des investissements –en baisse- dans la construction et la rénovation des bâtiments des collèges, peu d’assemblée départementale porte une politique éducative forte tant dans le champ scolaire que dans leur soutien aux associations qui développent d’autres formes éducatives en dehors de l’Ecole. Si le sport est généralement soutenu, la culture apparaît davantage comme une vitrine valorisant le patrimoine ou le rayonnement local et nombre de réseaux départementaux d’éducation populaire sont en difficulté par manque d’aide, mais aussi par faiblesse ou absence d’ambition politique territoriale. En parallèle, les missions « jeunesse et sports » noyées dans des directions départementales interministérielles tendent à ne plus être pensées et mise en œuvre dans leur dimensions éducatives, ce qui ne permet plus à cette échelon ministériel de proximité de jouer pleinement son rôle d’interlocuteur des collectivités territoriales et des associations, d’impulseur des dynamiques éducatives sur les territoires, de conseiller et d’expert.

Le niveau régional est d’une autre nature. Les services régionaux des ministères sont souvent éloignés des réalités du quotidien et peuvent apparaître comme des évaluateurs et des financeurs distants et peu impliqués dans l’accompagnement local s’ils ne sont pas relayés par des ancrages de proximité (antennes, conseillers de secteurs…). Par ailleurs, l’échelon régional dépasse le cadre de la scolarité obligatoire, s’adresse à un public de jeunes femmes et hommes et s’ancre dans la responsabilité du développement des territoires dont les conseils régionaux ont la compétence. Si la dimension économique est importante et trouve une résonnance directe avec la mise en œuvre de la formation professionnelle, elle ne peut être la seule dimension valorisée. Tout d’abord il est indispensable d’inscrire la réflexion sur la formation professionnelle dans la double évolution en cours : d’une part les métiers vont profondément changer, d’autre part dans sa vie professionnelle à venir, un jeune occupera successivement plusieurs métiers. Il s’agit donc de ne pas coller uniquement à la demande d’emploi d’aujourd’hui mais bien de former des personnes capables d’évoluer et de se reconvertir. A côté d’un bagage technique, il convient donc d’élever les compétences à apprendre à apprendre, à travailler en équipe, à anticiper, à imaginer demain…C’est en ce sens que les passerelles doivent être construites entre toutes les filières des lycées, dans une articulation avec les formations de l’enseignement supérieur et sans enfermer les apprenants dans la formation à un métier figé. Mais la dimension éducative du territoire régional ne peut se limité à celle de la formation professionnelle. La région doit également être porteuse de ressources culturelles, d’une offre de loisir, d’un tissu citoyen… Là encore les disparités sont grandes et la recomposition des nouvelles régions présente le risque de les accroître. Au-delà des calculs politiciens, se sont ces enjeux qui devraient être au cœur des projets qui seront soumis au vote des électeurs lors des élections régionales de décembre prochain.

Bien que peu décentralisée, la mission éducative est partagée. Si l’impulsion, les grandes orientations, la cadre scolaire, les personnels des ministères éducatifs (ENESR, JS, Culture) doivent demeurer du ressort de l’Etat, la construction des politiques éducatives ne peut se faire sans l’engagement et la participation active des collectivités territoriales. Plutôt que de craindre une décentralisation qui ne dit pas son nom, mieux vaut établir une coresponsabilité claire qui fixe les rôles, les engagements et les limites de chacun. C’est à cette condition que la refondation de l’Education en France peut prendre tout son sens et c’est pourquoi le sujet éducatif devrait être au cœur des débats sur la nouvelle organisation territoriale de l’Etat. Nous en sommes encore bien loin…