(Mes)sages comme des images

Si l’on peut douter des mots, il est fréquent de penser que les images, elles, ne mentent pas. Mais est-ce bien vrai ? Toutes les images sont des représentations, des messages codés par un angle, un cadre, un contexte, une intention. Lire une image, c’est déchiffrer sa signification –parfois bien cachée.

Si l’on peut douter des mots, il est fréquent de penser que les images, elles, ne mentent pas. Mais est-ce bien vrai ? Toutes les images sont des représentations, des messages codés par un angle, un cadre, un contexte, une intention. Lire une image, c’est déchiffrer sa signification –parfois bien cachée.

À ce moment paradoxal où pour Charlie Hebdo « … c’est reparti ! », alors même que « l’esprit du 11 janvier » semble s’être évanoui, peut-être n’est-il pas inutile de s’interroger sur nos rapports aux images. Partout présentes, elles font tant partie de notre quotidien que nous finissons par ne plus les regarder. Mais – à n’en pas douter- nous les voyons et la manière dont nous les lisons influence nos perceptions, nos regards, nos goûts, nos choix… tout publicitaire nous le confirmera…

En vérifiant si le titre de ce billet correspondait à d’autres écrits sur ce sujet, j’ai découvert le livre (presque) éponyme (Messages comme des images) écrit en 2006 par Estelle Rouquette (alors responsable de l’action culturelle et éducative) et Sylvie Lantelme (médiatrice culturelle) au Museon Arlaten (musée départemental d’ethnographie situé à Arles et fondé en 1896 par Frédéric Mistral). Ce petit ouvrage est présenté ainsi : « À la fin du XIXe siècle, le poète Frédéric Mistral réunissait au Museon Arlaten les objets qui, à ses yeux, étaient les plus représentatifs de la Provence. Il procéda comme le faisaient à l’époque les premiers musées d’ethnographie et les expositions universelles pour décrire les pays, les peuples, leurs rites et leurs mœurs : il mit en scène et en images son idée de la Provence. Messages comme des images propose d’explorer à travers les collections du Museon Arlaten le pouvoir des images dont nous sommes abreuvés chaque jour et leur sens selon l’usage qui en est fait. Tantôt cliché, idéal, caricature, symbole, icône, elles influencent et déterminent nos choix et nos représentations. Un ouvrage didactique qui apprend à déchiffrer les messages cachés des images et qui « lève le voile » sur la mythologie provençale qui doit beaucoup à l’imaginaire de Mistral ». Ce livret, réalisé avec des collégiens est un véritable outil pédagogique qui interroge ce que nous disent les images, ce qu’elles nous taisent, ce que nous réussissons à en lire et ce que nous ne savons (voulons) pas y voir.

Décoder une image en dit certainement autant sur celui qui l’a construite que sur celui qui la lit. Schématiques, caricaturales, hyperréalistes, esquisses ou tableaux léchés, les images nous renvoient à notre propre capacité de les analyser, de les interpréter, de s’en distancier. Sommes-nous capables d’y voir ici un clin d’œil, là une ellipse, ailleurs une métaphore… ?

Certes, malgré Roland Barthes (pour l’image fixe) et Christian Metz (pour le cinéma) la sémiologie de l’image ne permet pas aussi « naturellement » que la linguistique pour les écrits à identifier des figures de style, des tournures, des modes d’écriture, une grammaire de l’image facilitant son déchiffrage.

Pour autant, le jeune enfant perçoit assez simplement que, vu de dessous, un individu parait plus grand et plus impressionnant que vu de dessus : cette vision en contre-plongée et en plongée est son quotidien, alors que dominé par des adultes, il se penche sur son jouet. Cette même expérience, il saura la transposer en regardant une photographie, un dessin animé, une image, pour peu qu’on l’aide à formaliser cette démarche de lecture.

De même, il aura peu de mal à comprendre « la trahison des images » illustrée par Magritte dans son célèbre tableau de 1929, légendé « Ceci n’est pas une pipe », si après avoir répondu « C’est une pipe » à la question « Qu’est-ce que c’est ? », on lui demande alors de souffler dedans…

Lire une image demande aussi de pouvoir la comparer à d’autres, la placer dans un univers de signes, de symboles, d’événements, dans une époque. La meute de chiens féroces qui poursuivent le gentil « cabot » rapportant le dernier numéro de Charlie Hebdo (couverture du numéro 1179 du 25 février 2015 dessinée par LUZ) évoque – volontairement ou non- les ouvrages de Paul Nizan (Les chiens de garde, 1932) et de Serge Halimi (Les nouveaux chiens de garde, 1997 actualisé en 2005 et adapté au cinéma par Gilles Balbastre et Yannick Kergoat en 2012). Ces références donnent à l’image une portée politique supplémentaire.

Ainsi –comme pour toute lecture- décrypter une image c’est découvrir, faire des liens, mettre en perspective.

L’image ment-elle ? Pas davantage que les mots. Facétieuse, elle joue à cacher le sens de son message, invite à le chercher, à le dénicher, à le comprendre. Un peu comme ce jeu qui consiste, dans une image, à chercher « où est Charlie ? »

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Si l’on peut douter des mots, il est fréquent de penser que les images, elles, ne mentent pas. Mais est-ce bien vrai ? Toutes les images sont des représentations, des messages codés par un angle, un cadre, un contexte, une intention. Lire une image, c’est déchiffrer sa signification –parfois bien cachée.

À ce moment paradoxal où pour Charlie Hebdo « … c’est reparti ! », alors même que « l’esprit du 11 janvier » semble s’être évanoui, peut-être n’est-il pas inutile de s’interroger sur nos rapports aux images. Partout présentes, elles font tant partie de notre quotidien que nous finissons par ne plus les regarder. Mais – à n’en pas douter- nous les voyons et la manière dont nous les lisons influence nos perceptions, nos regards, nos goûts, nos choix… tout publicitaire nous le confirmera…

En vérifiant si le titre de ce billet correspondait à d’autres écrits sur ce sujet, j’ai découvert le livre (presque) éponyme (Messages comme des images) écrit en 2006 par Estelle Rouquette (alors responsable de l’action culturelle et éducative) et Sylvie Lantelme (médiatrice culturelle) au Museon Arlaten (musée départemental d’ethnographie situé à Arles et fondé en 1896 par Frédéric Mistral). Ce petit ouvrage est présenté ainsi : « À la fin du XIXe siècle, le poète Frédéric Mistral réunissait au Museon Arlaten les objets qui, à ses yeux, étaient les plus représentatifs de la Provence. Il procéda comme le faisaient à l’époque les premiers musées d’ethnographie et les expositions universelles pour décrire les pays, les peuples, leurs rites et leurs mœurs : il mit en scène et en images son idée de la Provence. Messages comme des images propose d’explorer à travers les collections du Museon Arlaten le pouvoir des images dont nous sommes abreuvés chaque jour et leur sens selon l’usage qui en est fait. Tantôt cliché, idéal, caricature, symbole, icône, elles influencent et déterminent nos choix et nos représentations. Un ouvrage didactique qui apprend à déchiffrer les messages cachés des images et qui « lève le voile » sur la mythologie provençale qui doit beaucoup à l’imaginaire de Mistral ». Ce livret, réalisé avec des collégiens est un véritable outil pédagogique qui interroge ce que nous disent les images, ce qu’elles nous taisent, ce que nous réussissons à en lire et ce que nous ne savons (voulons) pas y voir.

Décoder une image en dit certainement autant sur celui qui l’a construite que sur celui qui la lit. Schématiques, caricaturales, hyperréalistes, esquisses ou tableaux léchés, les images nous renvoient à notre propre capacité de les analyser, de les interpréter, de s’en distancier. Sommes-nous capables d’y voir ici un clin d’œil, là une ellipse, ailleurs une métaphore… ?

Certes, malgré Roland Barthes (pour l’image fixe) et Christian Metz (pour le cinéma) la sémiologie de l’image ne permet pas aussi « naturellement » que la linguistique pour les écrits à identifier des figures de style, des tournures, des modes d’écriture, une grammaire de l’image facilitant son déchiffrage.

Pour autant, le jeune enfant perçoit assez simplement que, vu de dessous, un individu parait plus grand et plus impressionnant que vu de dessus : cette vision en contre-plongée et en plongée est son quotidien, alors que dominé par des adultes, il se penche sur son jouet. Cette même expérience, il saura la transposer en regardant une photographie, un dessin animé, une image, pour peu qu’on l’aide à formaliser cette démarche de lecture.

De même, il aura peu de mal à comprendre « la trahison des images » illustrée par Magritte dans son célèbre tableau de 1929, légendé « Ceci n’est pas une pipe », si après avoir répondu « C’est une pipe » à la question « Qu’est-ce que c’est ? », on lui demande alors de souffler dedans…

Lire une image demande aussi de pouvoir la comparer à d’autres, la placer dans un univers de signes, de symboles, d’événements, dans une époque. La meute de chiens féroces qui poursuivent le gentil « cabot » rapportant le dernier numéro de Charlie Hebdo (couverture du numéro 1179 du 25 février 2015 dessinée par LUZ) évoque – volontairement ou non- les ouvrages de Paul Nizan (Les chiens de garde, 1932) et de Serge Halimi (Les nouveaux chiens de garde, 1997 actualisé en 2005 et adapté au cinéma par Gilles Balbastre et Yannick Kergoat en 2012). Ces références donnent à l’image une portée politique supplémentaire.

Ainsi –comme pour toute lecture- décrypter une image c’est découvrir, faire des liens, mettre en perspective.

L’image ment-elle ? Pas davantage que les mots. Facétieuse, elle joue à cacher le sens de son message, invite à le chercher, à le dénicher, à le comprendre. Un peu comme ce jeu qui consiste, dans une image, à chercher « où est Charlie ? »