Les concepts creux et les attaques aux statuts ne résoudront pas les maux de la Recherche française !
Selon le président, il existerait cinq grandes difficultés structurelles de notre recherche publique :
- un sous-investissement chronique
- une organisation trop complexe et cloisonnée
- un lien dégradé entre recherche et innovation
- un financement privé insuffisant
L’UNSA Éducation avait recensé ces points faibles mais également d’autres que le président ne mentionne pas et qui sont pourtant prégnants face aux solutions qu’il propose d’apporter :
- les lois relatives à l’enseignement supérieur et la recherche se sont empilées à un rythme effréné, sans réelles évaluations de ce que les précédentes avaient généré comme effets (positifs et négatifs). Ces réformes ont exténué les personnels et désorganisé le service public
- le fort dirigisme imposé à la recherche publique qui est contre productif et va à l’encontre des principes de la recherche (liberté, sérendipité, créativité, etc.)
- l’incohérence d’un SGPI (secrétariat général pour l’investissement) qui n’est pas placé sous la tutelle du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche alors même qu’il pilote une grande partie des financements de la recherche, notamment via les PEPR
- les crédits de financements récurrents bien trop faibles qui ne permettent pas de recruter sur des emplois permanents au détriment de la précarité des personnels, de la mémoire collective des unités de recherche, des compétences et des savoir-faire
Le président de la République propose donc de prendre, en un maximum 18 mois, “des décisions avec un caractère vraiment irréversible” pour la recherche et l’enseignement supérieur. Une nouvelle réforme alors que la précédente, celle portée par la loi de programmation de la recherche, n’a même pas trois ans et court jusqu’en 2030.
Quelles seraient ces décisions irréversibles selon le discours du président ?
Tout d’abord, transformer les organismes nationaux de recherche en agence de programme. On note qu’il n’était jusqu’à présent pas question de transformer les organismes nationaux de recherche (ONR) mais de leur confier une mission supplémentaire avec des moyens supplémentaires pour l’accomplir… Est-ce qu’il faut penser que, le CNRS, l’INSERM, l’INRAE, l’IRD, etc. ne seront désormais plus des opérateurs de recherche mais des agences de coordination nationale et de financement de la recherche ? Et dans ce cadre, quel rôle resterait à l’agence nationale de la recherche (ANR), sera-t-elle supprimée? Si c’est une maladresse de communication du président alors il faut le clarifier rapidement. Il y a des femmes et des hommes, des projets derrière tout ceci et autant de légèreté est insupportable. Et quels sont les moyens spécifiquement dédiés à cette transformation des organismes nationaux de recherche ?
Au sujet du volet 2 de l’autonomie des universités, le président souhaite réorienter le rôle des universités en direction des territoires et les différencier. Mais quelle autonomie ? Celle de gérer la pénurie ? Celle d’organiser, en bout de chaîne, la dégradation du service public faute de moyens adaptés ? Le renforcement de l’autonomie ne sera-t-elle pas une nouvelle fois synonyme de désengagement de l’Etat? La priorité des établissements est avant tout d’avoir le financement pour en assumer réellement la charge, afin d’assurer de manière performante ses missions d’intérêt général. L’UNSA Éducation sera également extrêmement vigilante sur une éventuelle réforme du “modèle économique” des établissements d’enseignement supérieur et rappelle ici son indéfectible positionnement pour un enseignement supérieur gratuit. L’UNSA Éducation s’opposera également avec fermeté à toute attaque contre les statuts des personnels de l’enseignement supérieur et la recherche.
Pour augmenter l’engagement de la sphère privée dans la recherche, les maigres propositions du président restent très floues. Il évoque notamment l’accroissement des partenariats public-privé pour pallier l’investissement insuffisant des entreprises dans la recherche et le développement. Pour l’UNSA Éducation, le partenariat public privé n’est pas la solution miracle car il conduit rarement à un gain positif pour le public mais plutôt à un transfert de fonds publics au profit du privé. L’UNSA Education regrette en outre, qu’aucune remise en question du crédit impôt recherche (CIR) n’ait été proposée alors qu’il contribue, là aussi, à financer les grandes entreprises par l’État.
La période actuelle est empreinte de nombreux défis qu’on ne pourra envisager de relever que par un investissement massif dans la recherche et l’enseignement supérieur publics. Ce que le président avance comme pistes ne répond pas à ces enjeux, notamment, car ses propositions ne s’appuient sur aucun un bilan des précédentes réformes. Il suffit d’ailleurs de penser que lorsque le président Macron évoque le déclassement de la recherche française, c’est bien par rapport à une époque de référence où l’enseignement supérieur et la recherche étaient structurés selon le modèle opposé à celui qu’il prône. L’UNSA Éducation sera donc présente pour défendre le service public de l’enseignement supérieur et de la recherche. L’UNSA Éducation rappelle que la découverte scientifique ne se décrète pas. Notre Nation se doit d’investir dans la connaissance à la hauteur des défis auxquels nous devons faire face.
Avec l’ensemble de nos syndicats du champ de l’enseignement supérieur et de la Recherche nous allons demander à être reçu par la ministre Sylvie Retailleau pour faire part de notre vive inquiétude et avoir les éclaircissements nécessaires.