Analyses et décryptages

L’enseignement agricole public, un acteur essentiel pour assurer le renouvellement des générations d’agriculteurs et agricultrices

Chaque année, le monde agricole perd 10 à 12 000 professionnels, de multiples raisons expliquent ce phénomène inquiétant pour l’avenir, au cœur des transitions écologiques, économiques, sociales. L’enseignement agricole public, toujours un peu méconnu, est un acteur incontournable pour former les futures générations. Il est percuté par les questions environnementales et économiques du 21ème siècle : souveraineté alimentaire, développement durable.

Une baisse continue
Moins de paysans et de paysannes, des fermes qui s’agrandissent d’années en années. 400000 actifs en 2020, sur des exploitations agricoles de moyenne à 60 ha. Comment promouvoir une agriculture à taille humaine ? Pourquoi ces métiers « d’entrepreneurs du vivant » n’attirent plus ? L’accès au foncier, les bas revenus, la charge et le rythme de travail sont identifiés comme de puissants freins. Produire toujours plus pour s’en sortir est un cercle vicieux qui entraine toujours plus d’endettement, toujours plus de tâches à accomplir, toujours plus de fragilité économique. C’est le porte-parole de la Confédération Paysanne qui le pointe lors d’une récente journée de mobilisation en intersyndicale des professionnels de l’enseignement agricole public.

Au cœur des tourmentes
L’agriculture est un secteur d’activité percuté par les défis du 21ème siècle : changement climatique, contraintes énergétiques, conservation de la biodiversité, raréfaction des ressources naturelles comme l’eau… bref au cœur des objectifs de développement durable.
Les jeunes générations sont celles qui prennent le plus conscience de l’urgence à engager des transformations. Ce sont aussi les 16-25 ans qui s’engagent le plus sur les sujets qui bousculent le monde agricole : le changement d’alimentation (plus de végétaux, plus de Bio, respect des saisons), le bienêtre animal, les circuits courts. L’environnement et la santé sont les deux causes pour lesquelles on constate le plus de bénévoles jeunes.
Pour renouveler les générations de paysans et paysannes, il faut tenir compte de jeunesses. Il y a toujours trop peu d’orientation ou de « vocations » externes au milieu agricole et celles et ceux qui sont nés dedans s’en échappent. Fini le temps de l’héritage systématique de la ferme paternelle !
 
Des transformations en cours
L’agriculture ne se mettra pas en phase avec les attentes de la société si elle ne réforme pas aussi son système éducatif.
–       L’agro-biologie, ça s’apprend (oui mais pas encore partout en France !)
–       Le respect du bienêtre animal et la disparition des poussins jetés vivants à la poubelle, aussi
–       Gérer durablement les ressources naturelles comme les sols, l’eau, ça s’apprend aussi…
… sans développer toutes les compétences liées à la gestion d’une entreprise de son temps : numériques, GRH, socio-économiques, environnementales.
 
Pour stopper la baisse continue du nombres d’élèves en établissement agricole public ( et celles du nombres de professionnels en activité) il faut en faire un sujet de société , un suet d’éducation. L’enseignement agricole est un élément des politiques éducatives. Il est en interrelation avec tous les autres.
Par exemple, si on n’éduque dès le plus jeune âge à l’alimentation en rapport avec la santé et la préservation de la planète, comment changerons-nous les comportements alimentaires massivement en lien avec les objectifs de développement durables fixés par l’ONU ?
Autre exemple, on n’entend parler que des fondamentaux, certes indispensables, mais au détriment de tous les autres savoirs dont les savoirs scientifiques. Si on ne forme pas mieux les professeurs d ‘école à la biologie, comment éveilleront ils les enfants à se poser des questions, à faire naître des désirs de métiers du vivant ?
–       D’où elle vient la carotte de la cantine ?
–       A quoi sert-il ce ver de terre trouvé dans la cour d’école ?
–       Et mon poisson pané ou mon steack haché, c’était quoi avant ?
Faire classe dehors redevient une tendance pédagogique, mais encore pour une minorité d’enfants. C’est à amplifier tout comme les classes de découvertes, et tous les actes éducatifs autour du vivant, de la nature, de l’environnement pratiqués en colos, en accueil périscolaire, en centres aérés. Bien sûr, sans oublier le focus sur l’éducation à l’orientation commencée dès l’école élémentaire et sérieusement accompagnée et renforcée tout au long des années collège et lycée.
Renouveler les générations d’agriculteurs et d’agricultrices, promouvoir une agriculture à taille humaine, ce sont indéniablement aussi des questions d’éducation.

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