Enseignements politiques

Si le changement c’était maintenant ! Si ce slogan s’était trompé de quinquennat et invité trop tôt.

Car à n’en pas douter, c’est maintenant que le changement du paysage politique français s’impose. Dans la campagne électorale. Dans les résultats de ce premier tour de l’élection présidentielle. Dans les enseignements qu’il faudra tirer après le second tour et certainement également lors des élections législatives.

Ces nombreux éléments nécessiteront d’être analyser en profondeur. Ils seront porteurs de nombreux enseignements :
– Qui éclaireront sans doute les différentes fractures au sein de la société française : générationnelle, sociale, culturelle, mais aussi entre ruraux et urbains, entre les optimistes qui vont bien et les pessimistes qui ont peur…
– Qui diront probablement le rejet des partis traditionnels et des candidats « installés » au profit de ceux qui représentent -ou semblent incarner- l’antisystème, la différence, le renouveau.
– Qui tenteront de se projeter dans les reconstructions politiques à venir.

Dès à présent, analystes, spécialistes et commentateurs cherchent à comprendre et à anticiper les suites possibles.

Mais d’ores et déjà une évidence s’impose. La chose politique n’a pas cessé de passionner les Français. Ils auront dévoré les livres des candidats, suivi avec intérêt les débats, échanger avec amis, voisins, proches et collègues… et ils seront allé voter…

Des millions d’experts en politique… mais finalement pas si experts que cela.

En effet alors que chacun des onze candidats s’est évertué à rappeler que l’éducation était le pilier indispensable de la citoyenneté et que la transmission des savoirs fondamentaux devait être assurée à tous les enfants et les jeunes… qu’en est-il de l’éducation politique ? où se fait l’apprentissage des comportements citoyens de bases ? comment se construit cette formation citoyenne indispensable, et qui a été dès le début de la République, associée à la nécessité de l’Education ?

Former l’Homme, le Citoyen, le Travailleur est la mission de l’Ecole de la République.
L’éducation citoyenne, donc politique est au cœur de la vocation de l’Education populaire.
Auraient-elles l’une et l’autre failli et renoncer à une partie essentielle de leur rôle ?

Certes, il y a bien dans les programmes un enseignement des institutions. Mieux l’enseignement moral et civique a été institué comme une nouvelle matière scolaire. Mais combien d’électeurs sont en capacité de resituer les actuels partis politiques dans l’histoire de leur construction et de leurs évolutions ? Combien savent mettre en perspective leurs mandats avec l’histoire des idées ? Combien peuvent lire entre les lignes des programmes les théories politiques, économiques, … sur lesquels ils s’appuient ?

Ce contenu manque à la plupart des citoyens. Et même si tout est disponible grâce aux outils numériques, pouvoir accéder à l’information ne suffit pas à construire de la compréhension.

Celle ou celui qui veut comprendre, peut évidemment trouver la connaissance et apprendre.

Cela ne suffit pas. Il faut être bien optimiste -ou bien naïf- pour penser que le savoir remplace l’expérience, la connaissance de l’histoire évite sa reproduction et que l’enseignement d’un système politique interdit son évolution.

En fait, une autre dimension, plus essentielle est, elle, totalement, cruellement absente : celle du débat.

Où sont les lieux d’échange ? Quand ont lieu les moments de discussion ? Comment s’élaborent les convictions politiques ?

« Au café du commerce » ont répondu des étudiants de licence qui s’apprêtaient à voter pour leur première élection présidentielle et à qui je posais la question.

Il ne s’agit certes pas de réclamer que les débats politiques -entendez par là partisans- entrent dans les lieux d’Education. J’entends déjà frémir les tenants de la sanctuarisation de l’école. Et s’énerver les chantres de la neutralité. Et citer Jean Zay et sa circulaire de 1936 “Les écoles doivent rester l’asile inviolable où les querelles des hommes ne pénètrent pas.” Il ne s’agit nullement de vouloir introduire la matière politique dans le contenu des programmes scolaire. Ni de transformer les MJC en écoles des partis.  Mais il s’agit dans chaque discipline de permettre la controverse, d’alimenter la réflexion, de susciter l’esprit critique. Il s’agit dès le plus jeune âge de rendre accessible la discussion philosophique. De proposer des débats. De mener à terme des conflits. De construire des modes de délibération. D’élaborer des procédures de prises de décision collectives.

Une telle éducation n’éviterait certainement pas les surprises issues des urnes. Mais elles pourraient devenir l’aboutissement réfléchi d’une action citoyenne et non la réaction exaspérée d’un ras-le-bol trop longtemps contenu. 

La démocratie réclame des citoyens éclairés et ceux-ci ne peuvent l’être que parce qu’ils ont reçu une formation adaptée : tel est un des enseignements politiques de la période que nous sommes en train de vivre et dont nos futurs dirigeants feraient bien d’en tirer toutes les conséquences pour l’avenir.

 

Denis Adam, le 26 avril 2017
 

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Si le changement c’était maintenant ! Si ce slogan s’était trompé de quinquennat et invité trop tôt.

Car à n’en pas douter, c’est maintenant que le changement du paysage politique français s’impose. Dans la campagne électorale. Dans les résultats de ce premier tour de l’élection présidentielle. Dans les enseignements qu’il faudra tirer après le second tour et certainement également lors des élections législatives.

Ces nombreux éléments nécessiteront d’être analyser en profondeur. Ils seront porteurs de nombreux enseignements :
– Qui éclaireront sans doute les différentes fractures au sein de la société française : générationnelle, sociale, culturelle, mais aussi entre ruraux et urbains, entre les optimistes qui vont bien et les pessimistes qui ont peur…
– Qui diront probablement le rejet des partis traditionnels et des candidats « installés » au profit de ceux qui représentent -ou semblent incarner- l’antisystème, la différence, le renouveau.
– Qui tenteront de se projeter dans les reconstructions politiques à venir.

Dès à présent, analystes, spécialistes et commentateurs cherchent à comprendre et à anticiper les suites possibles.

Mais d’ores et déjà une évidence s’impose. La chose politique n’a pas cessé de passionner les Français. Ils auront dévoré les livres des candidats, suivi avec intérêt les débats, échanger avec amis, voisins, proches et collègues… et ils seront allé voter…

Des millions d’experts en politique… mais finalement pas si experts que cela.

En effet alors que chacun des onze candidats s’est évertué à rappeler que l’éducation était le pilier indispensable de la citoyenneté et que la transmission des savoirs fondamentaux devait être assurée à tous les enfants et les jeunes… qu’en est-il de l’éducation politique ? où se fait l’apprentissage des comportements citoyens de bases ? comment se construit cette formation citoyenne indispensable, et qui a été dès le début de la République, associée à la nécessité de l’Education ?

Former l’Homme, le Citoyen, le Travailleur est la mission de l’Ecole de la République.
L’éducation citoyenne, donc politique est au cœur de la vocation de l’Education populaire.
Auraient-elles l’une et l’autre failli et renoncer à une partie essentielle de leur rôle ?

Certes, il y a bien dans les programmes un enseignement des institutions. Mieux l’enseignement moral et civique a été institué comme une nouvelle matière scolaire. Mais combien d’électeurs sont en capacité de resituer les actuels partis politiques dans l’histoire de leur construction et de leurs évolutions ? Combien savent mettre en perspective leurs mandats avec l’histoire des idées ? Combien peuvent lire entre les lignes des programmes les théories politiques, économiques, … sur lesquels ils s’appuient ?

Ce contenu manque à la plupart des citoyens. Et même si tout est disponible grâce aux outils numériques, pouvoir accéder à l’information ne suffit pas à construire de la compréhension.

Celle ou celui qui veut comprendre, peut évidemment trouver la connaissance et apprendre.

Cela ne suffit pas. Il faut être bien optimiste -ou bien naïf- pour penser que le savoir remplace l’expérience, la connaissance de l’histoire évite sa reproduction et que l’enseignement d’un système politique interdit son évolution.

En fait, une autre dimension, plus essentielle est, elle, totalement, cruellement absente : celle du débat.

Où sont les lieux d’échange ? Quand ont lieu les moments de discussion ? Comment s’élaborent les convictions politiques ?

« Au café du commerce » ont répondu des étudiants de licence qui s’apprêtaient à voter pour leur première élection présidentielle et à qui je posais la question.

Il ne s’agit certes pas de réclamer que les débats politiques -entendez par là partisans- entrent dans les lieux d’Education. J’entends déjà frémir les tenants de la sanctuarisation de l’école. Et s’énerver les chantres de la neutralité. Et citer Jean Zay et sa circulaire de 1936 “Les écoles doivent rester l’asile inviolable où les querelles des hommes ne pénètrent pas.” Il ne s’agit nullement de vouloir introduire la matière politique dans le contenu des programmes scolaire. Ni de transformer les MJC en écoles des partis.  Mais il s’agit dans chaque discipline de permettre la controverse, d’alimenter la réflexion, de susciter l’esprit critique. Il s’agit dès le plus jeune âge de rendre accessible la discussion philosophique. De proposer des débats. De mener à terme des conflits. De construire des modes de délibération. D’élaborer des procédures de prises de décision collectives.

Une telle éducation n’éviterait certainement pas les surprises issues des urnes. Mais elles pourraient devenir l’aboutissement réfléchi d’une action citoyenne et non la réaction exaspérée d’un ras-le-bol trop longtemps contenu. 

La démocratie réclame des citoyens éclairés et ceux-ci ne peuvent l’être que parce qu’ils ont reçu une formation adaptée : tel est un des enseignements politiques de la période que nous sommes en train de vivre et dont nos futurs dirigeants feraient bien d’en tirer toutes les conséquences pour l’avenir.

 

Denis Adam, le 26 avril 2017