Du temps ensemble, pour les équipes éducatives
Si reprise il y a, à partir du 11 mai, ce ne peut être que dans une sécurité sanitaire, de manière progressive et adaptée aux contextes de chaque terrain. Les équipes éducatives ont besoin de se retrouver, comme en pré-rentrée, sans les élèves. Les questions éducatives à la sortie de cet épisode de confinement sont multiples, elles doivent être appréhendées par les collectifs de travail avant toute velléité de retour aux apprentissages.
Système à l’arrêt
Le confinement a provoqué un rapport au temps et à l’espace différent de nos habitudes. L’espace intime de nos maisons est devenu aussi notre espace de travail. Ce temps, débuté le 16 mars 2020, ni de vacances ni d’activité normale, est un temps d’attente. Attente de la sortie de crise, attente de retour à la routine, à l’alternance bien connue vie professionnelle/vie personnelle. Chacun.e , que ce soit d’un point de vue professionnel ou personnel, n’a pas vécu de la même manière ce temps. Et cela impactera forcément sa reprise d’activité. Il est impossible de retourner dans son l’école, dans son établissement, comme si on venait retrouver son collectif de travail après les congés d’été. Pourquoi ? Parce qu’un collectif de travail est une communauté d’humains, qui auront eu à vivre des difficultés professionnelles, pour gérer les injonctions de continuité pédagogique et peut être aussi et en même temps, des souffrances personnelles liées au Covid 19, et aux victimes qu’il a généré.
Partage d’expériences
L’UNSA Education demande du temps banalisé de reprise des collectifs de travail avant l’arrivée des élèves, afin de remettre en route les structures en ménageant un temps de retour sur expérience. Du temps pour réunir les équipes dans leur pluralité, en groupes ou cercles de parole, pour parler des expériences vécues en période de confinement. Ces échanges doivent inclure des personnels rodés à la réception des paroles d’angoisses ou formés à l’analyse de pratique (Psy En, maitres spécialisés du 1er degré, assistantes sociales, infirmières, médecins), positionnés en « amis critiques » qui aident à faire émerger points positifs/ point négatifs, pour soi, pour son travail. Ce temps de parole collective doit autoriser aussi, de dire ce qu’on ne veut plus, les leçons à tirer de cette période inédite, ce qui a bousculé les pratiques professionnelles instituées. C’est parce que ce temps de parole respectueux des expériences vécues de chacun.e aura été possible, que le temps d’envisager la reprise avec les élèves pourra être réfléchi, débattu, dans ses contenus éducatifs et pédagogiques. Ce temps retrouvé, ensemble, permettra de définir au mieux les modalités d’accueil des élèves, pour sécuriser les élèves, recréer du lien, reprendre contact avec les apprentissages.
Le temps de l’échange, devra aussi être celui d’un échange organisé avec les enfants et les jeunes, qui tout comme les professionnels de l’éducation, n’auront pas tous vécu le temps du confinement avec les mêmes bonheurs, malheurs ou angoisses. Renouer avec le temps scolaire sera plus facile si chacun.e est accueilli en singularité, dans le collectif des classes. Enfin, le temps de l’échange prévoira aussi celui de l’échange avec les familles. Le confinement a privé tous les partenaires en éducation de véritables interactions, il faut les retrouver ou les refonder.
Si reprise il y a, à partir du 11 mai, ce devra donc être une reprise avec échanges en présence, ensemble, pour retrouver le sens de l’équipe éducative, mais aussi le sens de l’action éducative.
Aucun vademecum ou guide de bonne pratique voire pire de bonne conduite, ne peut se substituer au temps de la relation humaine retrouvée, indispensable et préalable à toute reprise pédagogique. Les personnels des équipes éducatives ne sauraient être livrés seuls à une reprise d’activité comme si rien d’anormal ne s’était passé depuis le 16 mars 2020.