Coupables obsessions comptables de la Cour des mécomptes

La Cour des comptes remet chaque année un rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques dans le cadre de la préparation du budget de l'année suivante. Le rapport de cette année ne déroge pas avec les obsessions comptables de la Cour... et notamment le fait de remettre une couche supplémentaire d'austérité dans la Fonction publique.

La Cour des comptes remet chaque année un rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques dans le cadre de la préparation du budget de l’année suivante. Le rapport de cette année ne déroge pas avec les obsessions comptables de la Cour… et notamment le fait de remettre une couche supplémentaire d’austérité dans la Fonction publique.

Les politiques publiques sont visées assez précisément: santé, réduction de l’offre régionale de transports (ce qui ne manque pas de sel dans le contexte qu’on connaît à la SNCF). Mais les fonctionnaires restent prioritairement dans le collimateur de la Cour des comptes. Comme l’indique le communiqué de presse qu’elle a publié le 17 juin 2014 pour annoncer la sortie du rapport, le maintien du gel du point d’indice, la division par deux des mesures catégorielles et le strict maintien des effectifs ne suffisent pas!

«La masse salariale représente 23 % des dépenses publiques. Si la politique mise en œuvre à partir de 2013 (stabilité globale des effectifs, poursuite du gel du point d’indice et réduction de l’enveloppe des mesures catégorielles) est maintenue, la masse salariale de l’État augmentera d’environ 750 M€ par an, soit trois fois plus que l’objectif du budget triennal 2013-2015. […] Les mesures utilisées dans la période récente risquent donc d’être insuffisantes et le recours à des leviers complémentaires doit être envisagé. Ils pourraient concerner notamment les rémunérations accessoires et régimes indemnitaires, les effectifs et la durée effective du travail, pour laquelle un bilan d’ensemble devrait être réalisé pour les trois fonctions publiques.»

Autrement dit, au gel salarial, il faudrait ajouter la purge indemnitaire, la diminution globale des effectifs de la Fonction publique et une hausse de la durée effective du travail jugé parfois inférieur à la durée légale (sur ce point ce sont les versants hospitalier et territorial de la Fonction publique qui sont prioritairement visés).

Certes dans son allocution, le premier président de la Cour des comptes a reconnu que «si l’on souhaite conserver une fonction publique attractive, il convient de préserver quelques marges de manœuvre salariales» mais, comme il reprend les préconisations du rapport, on se demande bien de quelles «marges» il pourrait bien s’agir.

Pourtant, le rapport lui-même souligne que la RGPP (revue ou révision générale des politiques publiques) avait eu des effets bien plus limités que prévus sur les économies budgétaires. Nous savons bien en revanche quels en ont été les effets destructeurs en termes d’exercice des mission, d’organisation, d’atteinte à la santé au travail.

Mais le rapport persiste dans la litote évoquant (p. 150) comme «une politique salariale moins dynamique» le gel de la valeur du point d’indice dans la Fonction publique depuis juillet 2010! Au reste, le rapport souligne que le gel du point a un rendement moindre puisque, avec le temps, la GIPA (voir cet article) concerne de plus en plus de monde. Il reconnaît d’ailleurs la nécessité de «reprofiler les grilles» en raison notamment du risque de talonnement par le Smic de la catégorie A «avant la fin de la décennie» (p. 156). Évoquant  le gel des avancement, le rapport de la Cour finit par le juger peu opératoire… mais présente quand même des postes pour réduire les avancements (comme la diminution des rations promus/promouvables pour les avancements de grade ou de classe).

Bref, ce qui est proposé aux cinq millions de fonctionnaires, c’est finalement «moins de fonctionnaires moins bien payés» sans en mesurer le moins du monde les effets: effets macro-économiques récessifs, conséquences en termes de (non-)attractivité de métiers de plus en plus mal rémunérés, démotivation des personnels… et sans jamais s’interroger, dans une société en crise, sur les conséquences pour la population comme pour la Nation de la contraction des services publics à laquelle conduire son modèle arithmétique sommaire.

La Cour des (mé)comptes nous propose un nouveau serrage de ceinture: elle mérite plutôt que les fonctionnaires lui offrent la remontée de bretelles qui lui revient…

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La Cour des comptes remet chaque année un rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques dans le cadre de la préparation du budget de l’année suivante. Le rapport de cette année ne déroge pas avec les obsessions comptables de la Cour… et notamment le fait de remettre une couche supplémentaire d’austérité dans la Fonction publique.

Les politiques publiques sont visées assez précisément: santé, réduction de l’offre régionale de transports (ce qui ne manque pas de sel dans le contexte qu’on connaît à la SNCF). Mais les fonctionnaires restent prioritairement dans le collimateur de la Cour des comptes. Comme l’indique le communiqué de presse qu’elle a publié le 17 juin 2014 pour annoncer la sortie du rapport, le maintien du gel du point d’indice, la division par deux des mesures catégorielles et le strict maintien des effectifs ne suffisent pas!

«La masse salariale représente 23 % des dépenses publiques. Si la politique mise en œuvre à partir de 2013 (stabilité globale des effectifs, poursuite du gel du point d’indice et réduction de l’enveloppe des mesures catégorielles) est maintenue, la masse salariale de l’État augmentera d’environ 750 M€ par an, soit trois fois plus que l’objectif du budget triennal 2013-2015. […] Les mesures utilisées dans la période récente risquent donc d’être insuffisantes et le recours à des leviers complémentaires doit être envisagé. Ils pourraient concerner notamment les rémunérations accessoires et régimes indemnitaires, les effectifs et la durée effective du travail, pour laquelle un bilan d’ensemble devrait être réalisé pour les trois fonctions publiques.»

Autrement dit, au gel salarial, il faudrait ajouter la purge indemnitaire, la diminution globale des effectifs de la Fonction publique et une hausse de la durée effective du travail jugé parfois inférieur à la durée légale (sur ce point ce sont les versants hospitalier et territorial de la Fonction publique qui sont prioritairement visés).

Certes dans son allocution, le premier président de la Cour des comptes a reconnu que «si l’on souhaite conserver une fonction publique attractive, il convient de préserver quelques marges de manœuvre salariales» mais, comme il reprend les préconisations du rapport, on se demande bien de quelles «marges» il pourrait bien s’agir.

Pourtant, le rapport lui-même souligne que la RGPP (revue ou révision générale des politiques publiques) avait eu des effets bien plus limités que prévus sur les économies budgétaires. Nous savons bien en revanche quels en ont été les effets destructeurs en termes d’exercice des mission, d’organisation, d’atteinte à la santé au travail.

Mais le rapport persiste dans la litote évoquant (p. 150) comme «une politique salariale moins dynamique» le gel de la valeur du point d’indice dans la Fonction publique depuis juillet 2010! Au reste, le rapport souligne que le gel du point a un rendement moindre puisque, avec le temps, la GIPA (voir cet article) concerne de plus en plus de monde. Il reconnaît d’ailleurs la nécessité de «reprofiler les grilles» en raison notamment du risque de talonnement par le Smic de la catégorie A «avant la fin de la décennie» (p. 156). Évoquant  le gel des avancement, le rapport de la Cour finit par le juger peu opératoire… mais présente quand même des postes pour réduire les avancements (comme la diminution des rations promus/promouvables pour les avancements de grade ou de classe).

Bref, ce qui est proposé aux cinq millions de fonctionnaires, c’est finalement «moins de fonctionnaires moins bien payés» sans en mesurer le moins du monde les effets: effets macro-économiques récessifs, conséquences en termes de (non-)attractivité de métiers de plus en plus mal rémunérés, démotivation des personnels… et sans jamais s’interroger, dans une société en crise, sur les conséquences pour la population comme pour la Nation de la contraction des services publics à laquelle conduire son modèle arithmétique sommaire.

La Cour des (mé)comptes nous propose un nouveau serrage de ceinture: elle mérite plutôt que les fonctionnaires lui offrent la remontée de bretelles qui lui revient…