Chère Education

Si l’on en croit les candidats à l’élection présidentielle -comme, d’ailleurs, les candidats à la candidature- l’Education devrait tenir une place privilégiée dans la campagne électorale, puisque ,comme l’affirme François Fillon, « tout commence par là ».

Or, même si chacun y va de son couplet éducatif, ne nous faisons pas d’illusion : l’Education risque de ne pas être vraiment au cœur du débat. Elle l’est marginalement et souvent abordée par un aspect détourné, celui des moyens, du « qui paie quoi ? », en un mot : des sous.

Sur cet aspect c’est également François Fillon qui annonce le plus clairement les choses. Si une transformation en profondeur du système éducatif français est, pour lui indispensable, elle « ne peut se réaliser en y consacrant encore plus de moyens ». Bel euphémisme pour rappeler que -comme de 2007 à 2012- les ministères éducatifs -au premier rang desquels l’Education nationale- devront participer à l’effort drastique de réduction du nombre de fonctionnaires (moins 500 000, annonce-t-il).

La candidate du Front nationale quant à elle affiche des préoccupations plus mesquines et franchement discriminatoires et racistes en voulant faire payer l’Ecole aux enfants d’étrangers – en situation irrégulière, s’est-elle empressée d’ajouter face aux cris d’indignation de ceux qui considèrent, à juste raison, que notre République s’honorerait, au contraire, en offrant une éducation gratuite à tous les enfants présents sur notre territoire.

Oui, l’Education a un coût. Et même un coût relativement élevé.

Il est donc légitime de se demander qui paie.

Encore candidat, Donald Trump interrogé sur le montant de la scolarité universitaire au Etats-Unis répondait qu’il y avait toujours quelqu’un pour payer et cela ne devait pas reposer sur les impôts, donc sur la contribution de tous les Américains.

La France a fait depuis plus de 130 ans maintenant, le choix d’une scolarité -à défaut d’être totalement gratuite- qui tente de ne pas exclure les enfants pour des raisons financières, en faisant financer une part importante des dépenses d’Education par la puissance publique.

Du tout Etat, le système a évolué vers un partage des responsabilités et des charges entre l’Etat et les collectivités territoriales. Cela reste pour autant une dépense publique.

Il est d’ailleurs intéressant de s’interroger sur les annonces de transferts de personnels dans de nouveaux actes de décentralisation. Comme ce fut le cas hier pour les TOS des EPLE (et comme ce pourrait être demain le cas des personnels des lycées professionnels dans le projet de François Fillon par exemple), passer de la fonction publique d’Etat à celle territoriale ne modifie en rien le nombre de fonctionnaires. Le même chiffre change juste de case.

Par contre -et selon l’adage qui affirme que « celui qui paie décide » – cela influe beaucoup sur le transfert de compétences, privant l’Etat d’un pilotage national au profit d’une gouvernance régionale qui risque fortement d’afficher vite ses divergences et les influences qui agissent sur ses choix. On pourrait ainsi voir ouvrir et fermer des filières d’enseignement professionnel en fonction des demandes immédiates des entreprises locales, sans prendre suffisamment en compte les évolutions à moyens termes et les désirs de mobilité des jeunes.

Si l’uniformisation nationale n’est plus de mise et si une adéquation aux réalités territoriales est indispensable, elle ne justifie en rien une « balkanisation » d’une partie de notre système d’Education. Les pays qui s’y sont risqués (comme l’Allemagne) tentent aujourd’hui de retrouver une cohérence nationale.

En dehors de l’Ecole, l’interrogation sur le prix des activités périscolaires et des loisirs éducatifs se pose également.

On sait combien peuvent être diverses les politiques des collectivités territoriales pour les TAP (temps d’activités périscolaires) mises en place dans le cadre de la réforme des temps éducatifs. De la totale gratuité à des coûts relativement élevés, prenant ou non en compte les ressources des familles, tous les systèmes existent et créent des perceptions très contrastés face à ces temps prévus pour permettent le développement d’activités éducatives complémentaires à celles conduites en classe.

On connait aussi le frein financier qui justifie en grande partie la désaffection des centres de loisirs et surtout de séjours durant les vacances scolaires.

Parmi les propositions portées par le tout nouveau collège des enfants du Haut comité de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) installé mardi 13 décembre par la ministre Laurence Rossignol, il y a celle de centres de loisirs gratuits pour tous les enfants et tous les adolescents.

Une utopie ?

Un choix politique plutôt.

S’il y a forcément un coût, la véritable question demeure celle de « qui doit payer quoi ? » Et il n’est pas sûr que la seule bonne réponse soit de renvoyer la facture aux seuls bénéficiaires et à leurs familles.

« Si vous trouvez que l’Education coute chère, essayez l’ignorance » affirmait, provocateur, le président Roosevelt à ses détracteurs.

En effet, le coût social, culturel, industriel d’une population privée d’instruction et d’éducation est bien plus élevée. Toutes les études internationales le mettent en évidence.

L’Education est un investissement d’avenir, qui coûte aujourd’hui pour rapporter demain.

Alors, chère l’Education ? Pas si sûr !

 

Denis ADAM, le 14 décembre 2016
 

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Si l’on en croit les candidats à l’élection présidentielle -comme, d’ailleurs, les candidats à la candidature- l’Education devrait tenir une place privilégiée dans la campagne électorale, puisque ,comme l’affirme François Fillon, « tout commence par là ».

Or, même si chacun y va de son couplet éducatif, ne nous faisons pas d’illusion : l’Education risque de ne pas être vraiment au cœur du débat. Elle l’est marginalement et souvent abordée par un aspect détourné, celui des moyens, du « qui paie quoi ? », en un mot : des sous.

Sur cet aspect c’est également François Fillon qui annonce le plus clairement les choses. Si une transformation en profondeur du système éducatif français est, pour lui indispensable, elle « ne peut se réaliser en y consacrant encore plus de moyens ». Bel euphémisme pour rappeler que -comme de 2007 à 2012- les ministères éducatifs -au premier rang desquels l’Education nationale- devront participer à l’effort drastique de réduction du nombre de fonctionnaires (moins 500 000, annonce-t-il).

La candidate du Front nationale quant à elle affiche des préoccupations plus mesquines et franchement discriminatoires et racistes en voulant faire payer l’Ecole aux enfants d’étrangers – en situation irrégulière, s’est-elle empressée d’ajouter face aux cris d’indignation de ceux qui considèrent, à juste raison, que notre République s’honorerait, au contraire, en offrant une éducation gratuite à tous les enfants présents sur notre territoire.

Oui, l’Education a un coût. Et même un coût relativement élevé.

Il est donc légitime de se demander qui paie.

Encore candidat, Donald Trump interrogé sur le montant de la scolarité universitaire au Etats-Unis répondait qu’il y avait toujours quelqu’un pour payer et cela ne devait pas reposer sur les impôts, donc sur la contribution de tous les Américains.

La France a fait depuis plus de 130 ans maintenant, le choix d’une scolarité -à défaut d’être totalement gratuite- qui tente de ne pas exclure les enfants pour des raisons financières, en faisant financer une part importante des dépenses d’Education par la puissance publique.

Du tout Etat, le système a évolué vers un partage des responsabilités et des charges entre l’Etat et les collectivités territoriales. Cela reste pour autant une dépense publique.

Il est d’ailleurs intéressant de s’interroger sur les annonces de transferts de personnels dans de nouveaux actes de décentralisation. Comme ce fut le cas hier pour les TOS des EPLE (et comme ce pourrait être demain le cas des personnels des lycées professionnels dans le projet de François Fillon par exemple), passer de la fonction publique d’Etat à celle territoriale ne modifie en rien le nombre de fonctionnaires. Le même chiffre change juste de case.

Par contre -et selon l’adage qui affirme que « celui qui paie décide » – cela influe beaucoup sur le transfert de compétences, privant l’Etat d’un pilotage national au profit d’une gouvernance régionale qui risque fortement d’afficher vite ses divergences et les influences qui agissent sur ses choix. On pourrait ainsi voir ouvrir et fermer des filières d’enseignement professionnel en fonction des demandes immédiates des entreprises locales, sans prendre suffisamment en compte les évolutions à moyens termes et les désirs de mobilité des jeunes.

Si l’uniformisation nationale n’est plus de mise et si une adéquation aux réalités territoriales est indispensable, elle ne justifie en rien une « balkanisation » d’une partie de notre système d’Education. Les pays qui s’y sont risqués (comme l’Allemagne) tentent aujourd’hui de retrouver une cohérence nationale.

En dehors de l’Ecole, l’interrogation sur le prix des activités périscolaires et des loisirs éducatifs se pose également.

On sait combien peuvent être diverses les politiques des collectivités territoriales pour les TAP (temps d’activités périscolaires) mises en place dans le cadre de la réforme des temps éducatifs. De la totale gratuité à des coûts relativement élevés, prenant ou non en compte les ressources des familles, tous les systèmes existent et créent des perceptions très contrastés face à ces temps prévus pour permettent le développement d’activités éducatives complémentaires à celles conduites en classe.

On connait aussi le frein financier qui justifie en grande partie la désaffection des centres de loisirs et surtout de séjours durant les vacances scolaires.

Parmi les propositions portées par le tout nouveau collège des enfants du Haut comité de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) installé mardi 13 décembre par la ministre Laurence Rossignol, il y a celle de centres de loisirs gratuits pour tous les enfants et tous les adolescents.

Une utopie ?

Un choix politique plutôt.

S’il y a forcément un coût, la véritable question demeure celle de « qui doit payer quoi ? » Et il n’est pas sûr que la seule bonne réponse soit de renvoyer la facture aux seuls bénéficiaires et à leurs familles.

« Si vous trouvez que l’Education coute chère, essayez l’ignorance » affirmait, provocateur, le président Roosevelt à ses détracteurs.

En effet, le coût social, culturel, industriel d’une population privée d’instruction et d’éducation est bien plus élevée. Toutes les études internationales le mettent en évidence.

L’Education est un investissement d’avenir, qui coûte aujourd’hui pour rapporter demain.

Alors, chère l’Education ? Pas si sûr !

 

Denis ADAM, le 14 décembre 2016