Verrons-nous encore les ours sur la banquise en Arctique ?
Les Inuit·es, les ours polaires, les morses , le narval, les icebergs et les étendues de glace… Autant d’éléments qui nous évoquent les zones les plus froides de notre globe. Pourtant, des études scientifiques récentes (notamment un rapport actualisé de l’AMAP1) tendent à nous montrer que ces espaces se réchauffent de plus en plus et cela a des conséquences sur l’ensemble de la planète et de la population mondiale. En effet, concernant l’Arctique, les scientifiques tirent de plus en plus la sonnette d’alarme : ce pôle se réchauffe trois fois plus vite que les autres endroits de la planète.
Quand chaque fraction de degré compte…
Les données du rapport de l’AMAP, rendues publiques lors d’une réunion ministérielle du Conseil de l’Arctique qui s’est tenue à la mi-mai, sont alarmantes. Avec un record de 3,1°C – là où la planète se réchauffe de 1°C – la banquise de l’Arctique pourrait bien être amenée à disparaître rapidement. Depuis les années 1970, celle-ci s’amenuise chaque été de plus en plus, avant de pouvoir se régénérer l’hiver. Chaque degré pèse dans la balance et augmente la possibilité d’un tel phénomène. Les expert·es ne cessent de le dire : si la température augmente de 2°C au lieu de 1,5°C (qui sont les objectifs des Accords de Paris) , les risques qu’elle disparaisse sont dix fois plus élevés.
Franchir une telle étape aurait des conséquences dramatiques sur une région déjà très fragilisée par le réchauffement climatique. Mutant jour après jour, l’Arctique voit son écosystème bouleversé. On observe le déplacement du vortex polaire, une zone d’air froid et de basse pression typique des pôles durant les saisons hivernales, vers le Sud. Cela entraine une augmentation de l’humidité dans l’atmosphère durant l’hiver, provoquant dans d’autres régions des chutes de neige particulièrement extrêmes. Ironie du sort : le réchauffement au Nord multiplie les épisodes de grands froids au Sud. Ces perturbations seront à l’origine de dysfonctionnements, par exemple dans l’approvisionnement en nourritures, en carburants, amenant à la destruction de certaines cultures. De même, des chercheur·euses montrent que la fonte accélérée d’une partie de la calotte glaciaire, dans l’ouest du Groenland, est désormais quasi irréversible. Même si le réchauffement climatique s’arrêtait demain, elle conduirait automatiquement à une élévation du niveau de la mer de 1 à 2 mètres. Ce dernier point entraînerait de nombreuses catastrophes car les grandes métropoles sont avant tout proches du littoral.
Un autre élément important est à prendre en compte. La fonte du permafrost dans certaines zones reculées libère une grande quantité de méthane, qui constitue un gaz à effet de serre encore plus dangereux que le Co2 et accélère aussi le phénomène des grands incendies. Enfin, des températures hors normes ont été enregistrées dans des territoires près du cercle polaire. Le mercure est parfois monté jusqu’à 35°C, soit 20 à 24 degrés de plus que les normales saisonnières.
Des territoires bouleversés
Sous un certain angle, cette fonte de l’Arctique peut apparaître pour certains comme un atout de développement. En effet, quoi de mieux qu’une fonte des glaces pour de nouvelles perspectives de croissance économique et d’emplois ? Particulièrement dans les secteurs miniers et de l’exploitation des ressources pétrolières et gazières. Le trafic maritime pourra également s’étendre de plus bel et s’intensifier dans des eaux moins hostiles. Un filon intéressant pour certaines grandes entreprises et pour les États limitrophes en quête de nouveaux marchés.
Mais à quel prix ? Tout ceci ne peut avoir lieu sans une augmentation des risques de dégradation d’un environnement déjà abîmé et fragile. Déversements pétroliers, augmentation de la pollution sonore sous-marine, perturbations causées par le trafic maritime et introduction d’espèces envahissantes font partie des dangers à envisager, sans compter l’impact qu’ils auront sur les populations locales et leur mode de vie.
Un autre point à ne pas mettre de coté est que l’Arctique est une région à grands enjeux géopolitiques. Les États-Unis et la Russie se la dispute régulièrement. Là où les Américains y voient un grand « laboratoire » pour résoudre les défis de la lutte contre le réchauffement climatique, les Russes eux en font une propriété non discutable, un espace qui leur revient de droit. Cette région est un sujet au cœur des discussions du Conseil de l’Arctique, qui s’est tenu en mai à Reykjavik, et qui réunit les huit pays riverains de la région (États-Unis, Russie, Islande, Canada, Danemark, Finlande, Suède, Norvège).
Nous sommes donc aujourd’hui à un point de bascule. Les climatologues ne perdent pas espoir de maintenir un réchauffement climatique ne dépassant pas 1,5°C mais basculer au-delà peut arriver très vite, pour ne pas dire demain, si nous ne faisons rien. L’UNSA Éducation milite pour une transition écologique juste et équitable, et pour une sensibilisation sur les questions de préservation de l’environnement dès le plus jeune âge.
Nous devons continuer à nous éduquer et à éduquer les générations futures au bien être de notre planète pour faire pencher la balance du bon coté et continuer de voir les ours polaires courir sur les étendues de glace de l’Arctique.
1. Artic Monitoring and Assessment programme : https://www.amap.no