Analyses et décryptages

Prise en charge des mineurs non accompagnés : un système sous pression

Chaque année, la France accueille des migrants mineurs non accompagnés (MNA), des jeunes qui arrivent sur le territoire français sans la présence d'un membre de leur famille. La France garantit aux MNA la nécessaire protection liée à leur statut d’enfants en danger et au respect de leurs droits. Ces dernières années, la qualité de la prise en charge de ces jeunes par les associations, collectivités territoriales et institutions judiciaires est mise à mal face au nombre croissant de MNA. Le projet de loi sur l'immigration qui est discuté à partir de ce lundi 6 novembre va sans aucun doute évoquer cette situation. L’UNSA Éducation se penche sur la situation des MNA en France suite à la publication du rapport d’activité 2022 de la Mission nationale mineurs non accompagnés (MMNA).

La Mission nationale mineurs non accompagnés

La MMNA joue un rôle essentiel en France en veillant au bien-être et à la protection des jeunes migrants non accompagnés. Sa mission est de coordonner, d’orienter et de superviser la prise en charge des MNA sur l’ensemble du territoire français. Elle appartient à la Direction de la Protection judiciaire de la Jeunesse (DPJJ) émanant du Ministère de la Justice. Chaque année, elle publie un rapport de ses activités, mettant en lumière les défis et les progrès dans la prise en charge de ces jeunes vulnérables.

Définition et droits des MNA

Un mineur non accompagné est défini comme un enfant de moins de 18 ans, de nationalité étrangère, qui se trouve en France sans la présence d’un adulte titulaire de l’autorité parentale ou d’un représentant légal. En raison de leur âge et de leur statut, les MNA sont particulièrement vulnérables. C’est pourquoi, ils bénéficient des droits garantis par la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE), qui stipule que les droits des enfants, qu’ils soient étrangers ou français, doivent être respectés, conformément au principe de non-discrimination. Leur situation est cependant souvent complexe et exige une approche spécifique pour garantir leur protection, leur bien-être et leurs droits fondamentaux, y compris le droit à l’éducation, à la santé et à un environnement sûr.

Les raisons pour lesquelles un MNA se retrouve dans un pays étranger peuvent varier. Cela peut résulter de la migration forcée due à des conflits armés, des persécutions politiques, des catastrophes naturelles, etc. Certains peuvent également être victimes de trafic d’êtres humains.

Qui sont les MNA et l’aide sociale à l’enfance

Selon le rapport (cf. les deux graphiques ci-après), les MNA âgés de plus de 16 ans représentent pour 2022, environ 75 % des MNA. Il est important de noter une augmentation de la proportion et du nombre de jeunes filles, par rapport au nombre et à la proportion de garçons. La MMNA demeure vigilante quant à leur situation particulièrement vulnérable.

Elles sont plus souvent exposées à des violences sexuelles. Certains MNA sont victimes de traite des êtres humains. Une attention particulière doit être portée à leurs suivis médical et psychologique. La prise en charge des MNA en France relève des services de l’Aide sociale à l’enfance (ASE), gérés par les départements. Lorsqu’un jeune se présente comme mineur et sans protection familiale, l’ASE doit organiser un accueil provisoire d’urgence, également appelé “mise à l’abri », d’une durée maximale de cinq jours. Cette période d’accueil provisoire vise à évaluer la minorité et l’isolement familial du jeune.

Hébergement, scolarisation, et précarité : des défis persistants

Avec une augmentation de plus de 30% par rapport à 2021, l’année 2022 marque des arrivées importantes de MNA en France avec près de 15 000 jeunes déclarés, tendance confirmée au premier semestre 2023. Cette situation met en tension l’ensemble des acteurs des dispositifs d’accueil et de prise en charge ces dernières années. Les départements ont largement recours à l’hébergement en hôtel pour la mise à l’abri, ce qui présente des problèmes liés au contrôle de la qualité, à un accompagnement limité, et à des conditions de vie perçues négativement par les jeunes. Les délais d’évaluation dépassent souvent largement la période prévue par la loi. La scolarisation des MNA est également retardée. Enfin, pour les jeunes qui sortent de la minorité, la transition vers l’âge adulte et la prise en charge deviennent des défis majeurs.

Le rapport souligne les difficultés multiples rencontrées dans les territoires notamment des MNA présentant des besoins spécifiques comme :

  • l’augmentation des jeunes filles et de MNA très jeunes aux situations sanitaires dégradées ;
  • la recrudescence des suspicions de cas de traite des êtres humains avec une incitation à commettre des infractions et aux jeunes filles contraintes à se prostituer ;
  • la présence de jeunes en situation d’errance mettant parfois en tension les dispositifs d’accueil, faute de solutions adéquates à leur situation de nomadisme, leurs traumatismes et leurs fréquentes addictions ;
  • l’existence de “déserts médicaux” dans certains territoires qui ne permettent pas une prise en charge satisfaisante.

Toutefois, le rapport souligne l’engagement de nombre d’acteurs qui s’emploient à développer et créer des outils adaptés aux situations complexes et diverses de MNA en augmentation.

La prise en charge des MNA est un défi à relever, avec des aspects légaux, logistiques et humanitaires. Le système actuel montre des signes de saturation et nécessite des améliorations pour mieux répondre aux besoins de ces jeunes. Cette question est un enjeu majeur, sur les solutions à apporter pour garantir bien-être et intégration dans la société française. La scolarisation de ces jeunes est aussi un enjeu essentiel pour rendre effectif notre modèle d’intégration républicaine. L’accueil des MNA doit interpeller l’ensemble des institutions nationales mais aussi européennes. Les crises politiques et les enjeux climatiques à venir laissent entrevoir un phénomène durable. Pour l’UNSA Éducation, il est important d’esquisser une stratégie européenne et de développer des bonnes pratiques inspirantes, en France et en Europe.

Pour aller plus loin : 

Présentation de la mission mineurs non accompagnés (MMNA)

Présentation du dernier rapport d’activité de la MMNA

Le rapport 2022 de la MMNA

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