L’oral du bac

Pierre Mathiot rend ce 24 janvier son rapport sur l’évolution du baccalauréat.
Parmi les éléments de réforme qu’il propose, l’un fait particulièrement parler, et c’est logique : l’introduction d’un grand oral parmi les quatre épreuves terminales de l’examen.

Nul doute que le débat viendra sur la possible suppression des filières. Evidemment le recours au contrôle continu fera polémique. Quant au choix des matières « majeures » et « mineures », il sera certainement au cœur de discussions enflammées sur la hiérarchie des disciplines.

Il en va ainsi pour chaque réforme de l’Education. Si chacune et chacun est convaincu de la nécessité de faire bouger l’école, toutes et tous ont des avis tranchés et souvent négatifs sur la pertinence (ou non) des réformes proposées.

L’urgence est donc de lire avec attention les propositions du rapport Mathiot, d’en voir les avantages et les inconvénients. Eventuellement de les soutenir ou de les amender. D’aider -pour peu que sa décision ne soit pas déjà totalement arrêtée sur le sujet- le ministre Blanquer à faire les choix définitifs qu’il annonce pour la fin du mois prochain.

Pour l’heure revenons sur la question de l’oral.

Petit bout de la lorgnette chaussé ce matin par ma chaine de radio préférée : les élèves interrogés -et non concernés, puisqu’actuellement au lycée, alors que la réforme s’appliquera en 2021, c’est-à-dire pour les élèves actuellement en classe de troisième- n’ont réagit qu’à la durée. « Parler à un prof pendant une demi-heure… C’est trop long ! »  

Trente minutes. Est-ce là l’essentiel ?

L’important ne serait-il pas de parler. De prendre la parole.

Pas de réciter un cours. Pas de lire un exposé écrit. Mais de s’exprimer oralement. De maitriser son langage. D’exercer son art oratoire. Celui qui consiste à présenter, à expliquer, à argumenter, à chercher à intéresser et à convaincre. Celui aussi qui se structure autour de la pertinence et de la cohérence des idées et de la capacité à répondre aux questions, à dialoguer, voire à débattre. Celui, aussi, qui ouvre à l’imaginaire.

Communiquer à l’oral c’est à la fois choisir les mots justes et les accompagner de la bonne intonation, du geste qui les porte, de l’attitude qui leur donne de la force.

Il y a quelques semaines est sorti au cinéma le film d’Yvan Attal « Brio » dans lequel l’odieux professeur Pierre Mazard (joué par Daniel Auteuil) doit, pour racheter sa conduite, préparer une de ses étudiantes Neïla (interprétée par Camélia Jordana) à un concours d’éloquence. Au-delà de la construction de la relation entre ses deux personnalités que tout semble séparer et qui tout au long du film, se cherchent, se haïssent, se rapprochent, se complètent et s’éduquent, se sont tous les ressorts de l’art oratoire qui sont mis en scène. Tant dans les cours et entrainements du professeur et de l’étudiante que dans le quotidien des relations humaines.

Car nous sommes dans un monde de communication. Nous sommes des êtres de communication. Et la parole est un mode privilégié de notre relation à l’autre, aux autres.

Tout d’abord sans voix, l’enfant apprend à parler. La famille et l’école vont l’y aider.

Mais quand et où apprend-il à prendre la parole ?

Dans ce domaine le système scolaire est souvent défaillant.

Inscrire un grand oral au bac, ce n’est pas seulement modifier une épreuve de l’examen. C’est donner un message fort sur la finalité même de l’Education. C’est réaffirmer que la scolarité n’a pas pour unique but de fournir des connaissances, mais qu’elle a mission de participer à la construction des compétences de tous les jeunes qui lui sont confiés. Que leur apprendre à prendre la parole, c’est les aider à communiquer, à partager, à s’exprimer, à réfléchir et donc à mieux vivre avec soi-même et avec les autres.

Un grand oral au bac c’est une transformation autant pour les élèves que pour les enseignants et pour l’ensemble du système éducatif.

Le futur grand oral du bac c’est la vie qui rentre à l’Ecole…il était temps !

 

Denis Adam, le 24 janvier 2018
 

 

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Pierre Mathiot rend ce 24 janvier son rapport sur l’évolution du baccalauréat.
Parmi les éléments de réforme qu’il propose, l’un fait particulièrement parler, et c’est logique : l’introduction d’un grand oral parmi les quatre épreuves terminales de l’examen.

Nul doute que le débat viendra sur la possible suppression des filières. Evidemment le recours au contrôle continu fera polémique. Quant au choix des matières « majeures » et « mineures », il sera certainement au cœur de discussions enflammées sur la hiérarchie des disciplines.

Il en va ainsi pour chaque réforme de l’Education. Si chacune et chacun est convaincu de la nécessité de faire bouger l’école, toutes et tous ont des avis tranchés et souvent négatifs sur la pertinence (ou non) des réformes proposées.

L’urgence est donc de lire avec attention les propositions du rapport Mathiot, d’en voir les avantages et les inconvénients. Eventuellement de les soutenir ou de les amender. D’aider -pour peu que sa décision ne soit pas déjà totalement arrêtée sur le sujet- le ministre Blanquer à faire les choix définitifs qu’il annonce pour la fin du mois prochain.

Pour l’heure revenons sur la question de l’oral.

Petit bout de la lorgnette chaussé ce matin par ma chaine de radio préférée : les élèves interrogés -et non concernés, puisqu’actuellement au lycée, alors que la réforme s’appliquera en 2021, c’est-à-dire pour les élèves actuellement en classe de troisième- n’ont réagit qu’à la durée. « Parler à un prof pendant une demi-heure… C’est trop long ! »  

Trente minutes. Est-ce là l’essentiel ?

L’important ne serait-il pas de parler. De prendre la parole.

Pas de réciter un cours. Pas de lire un exposé écrit. Mais de s’exprimer oralement. De maitriser son langage. D’exercer son art oratoire. Celui qui consiste à présenter, à expliquer, à argumenter, à chercher à intéresser et à convaincre. Celui aussi qui se structure autour de la pertinence et de la cohérence des idées et de la capacité à répondre aux questions, à dialoguer, voire à débattre. Celui, aussi, qui ouvre à l’imaginaire.

Communiquer à l’oral c’est à la fois choisir les mots justes et les accompagner de la bonne intonation, du geste qui les porte, de l’attitude qui leur donne de la force.

Il y a quelques semaines est sorti au cinéma le film d’Yvan Attal « Brio » dans lequel l’odieux professeur Pierre Mazard (joué par Daniel Auteuil) doit, pour racheter sa conduite, préparer une de ses étudiantes Neïla (interprétée par Camélia Jordana) à un concours d’éloquence. Au-delà de la construction de la relation entre ses deux personnalités que tout semble séparer et qui tout au long du film, se cherchent, se haïssent, se rapprochent, se complètent et s’éduquent, se sont tous les ressorts de l’art oratoire qui sont mis en scène. Tant dans les cours et entrainements du professeur et de l’étudiante que dans le quotidien des relations humaines.

Car nous sommes dans un monde de communication. Nous sommes des êtres de communication. Et la parole est un mode privilégié de notre relation à l’autre, aux autres.

Tout d’abord sans voix, l’enfant apprend à parler. La famille et l’école vont l’y aider.

Mais quand et où apprend-il à prendre la parole ?

Dans ce domaine le système scolaire est souvent défaillant.

Inscrire un grand oral au bac, ce n’est pas seulement modifier une épreuve de l’examen. C’est donner un message fort sur la finalité même de l’Education. C’est réaffirmer que la scolarité n’a pas pour unique but de fournir des connaissances, mais qu’elle a mission de participer à la construction des compétences de tous les jeunes qui lui sont confiés. Que leur apprendre à prendre la parole, c’est les aider à communiquer, à partager, à s’exprimer, à réfléchir et donc à mieux vivre avec soi-même et avec les autres.

Un grand oral au bac c’est une transformation autant pour les élèves que pour les enseignants et pour l’ensemble du système éducatif.

Le futur grand oral du bac c’est la vie qui rentre à l’Ecole…il était temps !

 

Denis Adam, le 24 janvier 2018