Les fonctionnaires à la sauce Xavier Bertrand

Dans un entretien à la revue «Acteurs publics», l'ancien ministre Xavier Bertrand a développé ses propositions pour la Fonction publique.

Dans un entretien à la revue «Acteurs publics», l’ancien ministre Xavier Bertrand a développé ses propositions pour la Fonction publique.

Quel que soit l’habillage, certains ont toujours une vision «punitive» de ce qu’il faudrait infliger à la Fonction publique. Il convient d’avoir à l’esprit, précisément, ce que cela peut — ou plutôt — pourrait impliquer pour les agents de la Fonction publique comme pour les services publics.

Reprenons sur ce point quelques extraits de l’interview accordée à la revue Acteurs publics par Xavier Bertrand, ancien secrétaire général de l’UMP, ancien ministre du Travail de 2007 à 2012, et qui aspire à redevenir autre chose.


Question. — Cela veut-il dire une remise à plat de la fonction publique?

Xavier Bertrand. — Oui. Pour les recrutements à venir, il y a des fonctions pour lesquelles le statut de la fonction publique doit être préservé. Ce n’est pas seulement une question d’attractivité. Je pense que le statut a un sens quand il s’agit des missions régaliennes de l’État : police, justice, éducation. Mais est-ce qu’un agent administratif doit nécessairement bénéficier d’un emploi à vie et du statut ? Que les règles de droit privé s’appliquent à la fonction publique en dehors du cœur régalien ne me pose aucun problème. Je veux aussi laisser le libre choix aux agents publics. Pour certains métiers, je propose non pas l’emploi à vie mais, pour ceux qui le souhaitent, un contrat de droit privé en échange d’un meilleur salaire. C’est possible notamment pour les futures infirmières.

Q. — Vous proposez d’agir sur le «flux» de fonctionnaires et non sur le «stock»…

X. B. — Je fais la différence entre les nouveaux agents publics et les fonctionnaires qui sont déjà en activité. Mais dans mon projet de réforme, les fonctionnaires en activité ne verraient plus leur retraite calculée sur les six derniers mois. Leur régime serait aligné sur le privé avec les 25 meilleures années mais en intégrant la totalité des primes dans le calcul des pensions, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.


Ces propos — parmi d’autres — méritent quelques commentaires.

Il ne faut pas croire que lorsqu’il parle d’éducation, M. Bertrand évoque l’ensemble des personnel. Vraisemblablement, quand il cite des exemples correspondant aujourd’hui à des corps ou familles de corps («agents» administratifs, qui ne sont pas chez lui seulement ceux de catégorie C; personnels infirmiers), cela implique bien que quelques types d’emploi correspondant à ce qu’il classe des les missions régaliennes stricto sensu seront concernés… avec à la clé, qu’il s’agisse d’établissements scolaires, de directions départementales ou régionales interministérielles, de collectivités territoriales ou d’établissements hospitaliers des coexistences de statuts public/privé.

Au reste, contre tous les constats enregistrés, la réhabilitation des transferts de mission par partenariats public-privé (PPP) conduit à privatiser des missions sans que, contrairement à ce que prétend M. Bertrand, l’efficacité en ait été améliorée et le coût réduit (on connaît le cas de l’hôpital de Corbeil, mais bien d’autres exemples, hélas, nous touchent de plus près, comme certains PPP dans le champ universitaire qui sont de véritables bombes à retardement).

On n’aura garde d’oublier le passage sur les retraites qui, dans un simplisme hélas sommaire, ne tient pas compte de récentes études du corps à niveau de qualification équivalent et, surtout se borne à une comparaison entre le seul régime de base de la Sécurité sociale (assurance vieillesse) et les systèmes de retraites à régime unique (Code des pensions, régime CNRACL).

La retraite des salariés comprend en effet un régime complémentaire obligatoire dont l’importance n’est pas mineure, notamment pour les cadres (or, à l’État, la fonction publique est une fonction publique de cadres eu égard au niveau de recrutement). Enfin, il omet de prendre en considération des paramètres aussi impalpables à l’évidence que la longueur des carrières dans la Fonction publique ainsi que leur amplitude forte, pour un même corps ou grade (justemement parce qu’il s’agit d’une Fonction publique «de carrière statutaire»). Quant à la prise en compte des indemnités et primes dans le calcul, c’est un miroir aux alouettes… et un générateur d’inégalités supplémentaires.

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Dans un entretien à la revue «Acteurs publics», l’ancien ministre Xavier Bertrand a développé ses propositions pour la Fonction publique.

Quel que soit l’habillage, certains ont toujours une vision «punitive» de ce qu’il faudrait infliger à la Fonction publique. Il convient d’avoir à l’esprit, précisément, ce que cela peut — ou plutôt — pourrait impliquer pour les agents de la Fonction publique comme pour les services publics.

Reprenons sur ce point quelques extraits de l’interview accordée à la revue Acteurs publics par Xavier Bertrand, ancien secrétaire général de l’UMP, ancien ministre du Travail de 2007 à 2012, et qui aspire à redevenir autre chose.


Question. — Cela veut-il dire une remise à plat de la fonction publique?

Xavier Bertrand. — Oui. Pour les recrutements à venir, il y a des fonctions pour lesquelles le statut de la fonction publique doit être préservé. Ce n’est pas seulement une question d’attractivité. Je pense que le statut a un sens quand il s’agit des missions régaliennes de l’État : police, justice, éducation. Mais est-ce qu’un agent administratif doit nécessairement bénéficier d’un emploi à vie et du statut ? Que les règles de droit privé s’appliquent à la fonction publique en dehors du cœur régalien ne me pose aucun problème. Je veux aussi laisser le libre choix aux agents publics. Pour certains métiers, je propose non pas l’emploi à vie mais, pour ceux qui le souhaitent, un contrat de droit privé en échange d’un meilleur salaire. C’est possible notamment pour les futures infirmières.

Q. — Vous proposez d’agir sur le «flux» de fonctionnaires et non sur le «stock»…

X. B. — Je fais la différence entre les nouveaux agents publics et les fonctionnaires qui sont déjà en activité. Mais dans mon projet de réforme, les fonctionnaires en activité ne verraient plus leur retraite calculée sur les six derniers mois. Leur régime serait aligné sur le privé avec les 25 meilleures années mais en intégrant la totalité des primes dans le calcul des pensions, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.


Ces propos — parmi d’autres — méritent quelques commentaires.

Il ne faut pas croire que lorsqu’il parle d’éducation, M. Bertrand évoque l’ensemble des personnel. Vraisemblablement, quand il cite des exemples correspondant aujourd’hui à des corps ou familles de corps («agents» administratifs, qui ne sont pas chez lui seulement ceux de catégorie C; personnels infirmiers), cela implique bien que quelques types d’emploi correspondant à ce qu’il classe des les missions régaliennes stricto sensu seront concernés… avec à la clé, qu’il s’agisse d’établissements scolaires, de directions départementales ou régionales interministérielles, de collectivités territoriales ou d’établissements hospitaliers des coexistences de statuts public/privé.

Au reste, contre tous les constats enregistrés, la réhabilitation des transferts de mission par partenariats public-privé (PPP) conduit à privatiser des missions sans que, contrairement à ce que prétend M. Bertrand, l’efficacité en ait été améliorée et le coût réduit (on connaît le cas de l’hôpital de Corbeil, mais bien d’autres exemples, hélas, nous touchent de plus près, comme certains PPP dans le champ universitaire qui sont de véritables bombes à retardement).

On n’aura garde d’oublier le passage sur les retraites qui, dans un simplisme hélas sommaire, ne tient pas compte de récentes études du corps à niveau de qualification équivalent et, surtout se borne à une comparaison entre le seul régime de base de la Sécurité sociale (assurance vieillesse) et les systèmes de retraites à régime unique (Code des pensions, régime CNRACL).

La retraite des salariés comprend en effet un régime complémentaire obligatoire dont l’importance n’est pas mineure, notamment pour les cadres (or, à l’État, la fonction publique est une fonction publique de cadres eu égard au niveau de recrutement). Enfin, il omet de prendre en considération des paramètres aussi impalpables à l’évidence que la longueur des carrières dans la Fonction publique ainsi que leur amplitude forte, pour un même corps ou grade (justemement parce qu’il s’agit d’une Fonction publique «de carrière statutaire»). Quant à la prise en compte des indemnités et primes dans le calcul, c’est un miroir aux alouettes… et un générateur d’inégalités supplémentaires.