La laïcité falsifiée…

Que d’outrages aura-t-on commis ces derniers mois au nom du principe de laïcité ! Ironie du sort, l’année où l’on célèbre les 120 ans de la loi de 1905, nos responsables publics ont rivalisé d'ingéniosité pour instrumentaliser ce principe et bafouer l’esprit de la loi de séparation des Eglises et de l'Etat.

Des drapeaux en berne en hommage au Pape

Après la mort du Pape François, une vague d’émotion légitime a traversé le monde catholique et la France n’était pas en reste. Le Président de la République a fait preuve à cette occasion d’une grande hypocrisie en feignant de rendre hommage à cette personnalité en tant que chef d’Etat.

Cette ambiguité sur laquelle joue le chef de l’État est doublement coupable. D’une part, le président se joue sans vergogne des Françaises et des Français, qui pourtant ne sont pas dupes ; d’autre part, il contrevient à son rôle de garant de la Constitution et de ses principes essentiels, en particulier le principe de laïcité. En suivant une forme de tradition gallicane que l’on croyait révolue, il continue à entretenir une confusion entre la religion catholique et le poids de l’histoire, de l’héritage de la culture chrétienne en France.

Pas besoin d’être grand clerc pour présager que la disparition de n’importe quel chef d’un micro-État ne donnera pas lieu à de tels égards. Les bâtiments publics, symboles des Institutions républicaines et incarnations de la neutralité de l’État sont donc instrumentalisés par le pouvoir.

Si la loi de 1905 consacre dans son article premier, « la liberté de conscience et le libre exercice des cultes », elle impose également à l’État une neutralité qui devrait se traduire par une stricte séparation entre le religieux et le politique. La manifestation du respect des catholiques français par le chef de l’Etat est parfaitement légitime, l’hommage officiel de la République à un dignitaire religieux est une entorse caractérisée au principe de laïcité.

Un instrument de lutte contre l’Islam

Les différentes polémiques sur le port du voile dans l’espace public, à l’université ou dans le milieu du sport a fait des Musulmans de ce pays une véritable cible. Le ministre de l’Intérieur a contribué à utiliser la laïcité comme un instrument de lutte à l’encontre d’une religion bien définie. Ce fut pendant longtemps l’apanage de l’extrême-droite ; c’est désormais le credo du ministre de l’Intérieur. En s’inspirant d’une partie de la dialectique maurassienne , il s’éloigne de l’esprit de concorde instauré par la loi de 1905 mais surtout de sa promotion de la liberté et de l’égalité des citoyens devant la loi et ce quelles que soient leurs convictions religieuses.

Un traitement de faveur pour l’enseignement privé catholique

Devant l’ampleur des scandales de l’enseignement privé, en particulier après les terribles révélations de « l’affaire Bétharram », on pensait que la classe politique allait très vite parvenir à une prise de conscience . Malgré la dénonciation d’un laisser-faire coupable observé pendant des décennies, en dépit de la multiplication des scandales, on déplore toujours la même inertie quand il s’agit d’agir. Les résiliations de contrat d’association avec l’État devraient pleuvoir depuis des semaines. D’ailleurs l’enseignement catholique (qui représente 96 % des établissements privés sous contrat) bénéficie contre toute logique de près de 80 % de financement public. Il doit donc être soumis à la même exigence d’exemplarité. Pourtant, on ne constate pas la même célérité d’intervention et la même intransigeance que pour les établissements privés d’autres confessions. L’exemple récent du lycée Averroès à Lille en est une parfaite illustration. Le tribunal administratif vient de rendre une décision dénonçant la résiliation du contrat d’association de cet établissement. L’entêtement du président de la région Hauts-de-France, le zèle de la préfecture et l’acharnement obsessionnel du ministre de l’Intérieur instillent de facto l’idée d’un deux poids deux mesures. La volonté affichée d’obtenir des décisions hâtives, catégoriques et définitives sous couvert du respect du principe de laïcité décrédibilise l’action de l’Etat à tous les niveaux. La remise en cause des décisions de justice par un ministre régalien entretient la défiance à l’encontre du pouvoir judiciaire et sème le trouble quant au principe de séparation des pouvoirs.

 

Pour l’UNSA Education, il est extrêmement dangereux de chercher à diviser une population déjà très fragmentée. La laïcité doit contribuer à rassembler plutôt qu’à diviser. Plus que jamais, nous avons besoin de cohésion et d’unité. L’esprit de la loi de séparation est tout entier contenu dans le triptyque républicain : « liberté, égalité fraternité » Pourtant, certains tentent de donner une lecture étriquée, orientée et partisane de ce principe fondateur d’émancipation et de rassemblement.

Pour notre fédération, la défense de nos principes fondamentaux doit s’appuyer sur l’école publique laïque. Elle doit donc bénéficier des moyens de continuer à former ses personnels et ses jeunes pour faire vivre le principe de laïcité et lutter contre toute entreprise de récupération de la part des extrêmes.

 

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