Jouer, c’est aussi souffler.

 

Jeux d’eau, de plein d’air, de cartes, de société, sportifs… les jeux sont à l’honneur pendant la période estivale. Plus de temps, moins de stress, on peut prendre le loisir de jouer, c’est l’été !

Activité divertissante, le jeu semble un invariant humain comme le précisait l’ouvrage Jeux et sports dès 1967 en affirmant que « le jeu est partout ». Il semble impossible d’imaginer qu’on puisse un jour découvrir un groupe humain dans l’existence duquel l’activité de jeu serait totalement absente. Les jeux sont des constantes de culture dont les formes peuvent varier d’une aire culturelle à une autre. Mais, par-delà cette diversité infinie, l’universalité du jeu le désigne comme un élément fondamental de la condition humaine. Le jeu est un invariant humain.

De là à considérer qu’il est une activité naturelle de l’homme, le pas a été facilement franchi et tout particulièrement en pédagogie, permettant ainsi de penser que le jeu pourrait être une manière naturelle et spontanée d’apprendre. Gilles Brougère, (d’après la notice de présentation de son ouvrage Jouer/Apprendre de 2006 proposée par le site http://osp.revues.org/1033) professeur de sciences de l’Éducation à l’université Paris 13 et auteur de plusieurs ouvrages sur le jeu et le jouet, – constatant que « la validité d’une telle position théorique n’a jamais pu être vérifiée dans les faits »- rappelle que le jeu est avant tout une construction sociale. Ainsi, contrairement à une idée reçue, le jeu n’est pas donné, il doit faire l’objet d’un apprentissage. L’enfant en particulier doit apprendre à jouer, c’est-à-dire à intégrer les procédures préexistantes qui produisent le jeu : « L’effet premier du jeu est d’apprendre la culture du jeu. En jouant, on apprend avant tout à jouer ». En tant qu’activité sociale et produit culturel, le jeu s’inscrit en effet dans des formes collectives soumises à la variabilité socio-historique. Ces « cultures ludiques », ainsi que l’auteur les désigne, sont formées de l’ensemble des procédures, des structures, des schèmes généraux et particuliers que les individus doivent acquérir, co-produire et partager avec d’autres pour pouvoir jouer.

C’est alors en faisant appel à la notion d’éducation informelle que la question du rapport du jouer et de l’apprendre peut être reposée. Elle permet de penser le jeu en relation avec tous les apprentissages qui peuvent se faire dans des situations qui ne sont pas intentionnellement construites pour l’apprentissage. En tant qu’il est une construction sociale et culturelle, en tant qu’il transforme des éléments extérieurs en leur donnant de nouvelles significations, le jeu possède en lui-même un potentiel éducatif : « Si le jeu est éducatif ce serait donc d’un point de vue informel, c’est-à-dire comme un effet qui accompagnerait cette expérience sans qu’il soit visé ». L’expérience du jeu ouvre ainsi sur une nouvelle conception de l’apprendre étendue à tous les espaces potentiels d’apprentissage et sur une approche de l’éducation « tout au long » et « tout au large » de la vie (lifelong / lifewide learning), propre à renouveler profondément les concepts et les pratiques du monde éducatif.

Quant au plaisir de jouer, Gilles Brougère rappelle qu’il s’agit à la fois « d’une expérience individuelle singulière » et d’une « forme de participation collective ». Il revient sur une approche phénoménologique du jeu, évoqué dans son aspect premier de divertissement et décrit comme la possibilité pour l’individu de jouer à volonté avec son propre plaisir : « Le jouer serait une recherche du jouir ». S’appuyant sur la théorie du flow de Csikszentmihalyi, il développe la notion d’expérience optimale, celle d’une activité centrée sur elle-même dans laquelle l’individu éprouve un sentiment de bien-être dynamique et d’assurance en lui-même (il est dans le flux, dans le courant). Le jeu serait alors un espace de découverte de ce type d’expérience, auquel il offrirait un cadre et un dispositif privilégiés.

Jouer est donc une façon de souffler, certes, mais surtout une manière de se constituer d’un nouveau souffle.

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Jeux d’eau, de plein d’air, de cartes, de société, sportifs… les jeux sont à l’honneur pendant la période estivale. Plus de temps, moins de stress, on peut prendre le loisir de jouer, c’est l’été !

Activité divertissante, le jeu semble un invariant humain comme le précisait l’ouvrage Jeux et sports dès 1967 en affirmant que « le jeu est partout ». Il semble impossible d’imaginer qu’on puisse un jour découvrir un groupe humain dans l’existence duquel l’activité de jeu serait totalement absente. Les jeux sont des constantes de culture dont les formes peuvent varier d’une aire culturelle à une autre. Mais, par-delà cette diversité infinie, l’universalité du jeu le désigne comme un élément fondamental de la condition humaine. Le jeu est un invariant humain.

De là à considérer qu’il est une activité naturelle de l’homme, le pas a été facilement franchi et tout particulièrement en pédagogie, permettant ainsi de penser que le jeu pourrait être une manière naturelle et spontanée d’apprendre. Gilles Brougère, (d’après la notice de présentation de son ouvrage Jouer/Apprendre de 2006 proposée par le site http://osp.revues.org/1033) professeur de sciences de l’Éducation à l’université Paris 13 et auteur de plusieurs ouvrages sur le jeu et le jouet, – constatant que « la validité d’une telle position théorique n’a jamais pu être vérifiée dans les faits »- rappelle que le jeu est avant tout une construction sociale. Ainsi, contrairement à une idée reçue, le jeu n’est pas donné, il doit faire l’objet d’un apprentissage. L’enfant en particulier doit apprendre à jouer, c’est-à-dire à intégrer les procédures préexistantes qui produisent le jeu : « L’effet premier du jeu est d’apprendre la culture du jeu. En jouant, on apprend avant tout à jouer ». En tant qu’activité sociale et produit culturel, le jeu s’inscrit en effet dans des formes collectives soumises à la variabilité socio-historique. Ces « cultures ludiques », ainsi que l’auteur les désigne, sont formées de l’ensemble des procédures, des structures, des schèmes généraux et particuliers que les individus doivent acquérir, co-produire et partager avec d’autres pour pouvoir jouer.

C’est alors en faisant appel à la notion d’éducation informelle que la question du rapport du jouer et de l’apprendre peut être reposée. Elle permet de penser le jeu en relation avec tous les apprentissages qui peuvent se faire dans des situations qui ne sont pas intentionnellement construites pour l’apprentissage. En tant qu’il est une construction sociale et culturelle, en tant qu’il transforme des éléments extérieurs en leur donnant de nouvelles significations, le jeu possède en lui-même un potentiel éducatif : « Si le jeu est éducatif ce serait donc d’un point de vue informel, c’est-à-dire comme un effet qui accompagnerait cette expérience sans qu’il soit visé ». L’expérience du jeu ouvre ainsi sur une nouvelle conception de l’apprendre étendue à tous les espaces potentiels d’apprentissage et sur une approche de l’éducation « tout au long » et « tout au large » de la vie (lifelong / lifewide learning), propre à renouveler profondément les concepts et les pratiques du monde éducatif.

Quant au plaisir de jouer, Gilles Brougère rappelle qu’il s’agit à la fois « d’une expérience individuelle singulière » et d’une « forme de participation collective ». Il revient sur une approche phénoménologique du jeu, évoqué dans son aspect premier de divertissement et décrit comme la possibilité pour l’individu de jouer à volonté avec son propre plaisir : « Le jouer serait une recherche du jouir ». S’appuyant sur la théorie du flow de Csikszentmihalyi, il développe la notion d’expérience optimale, celle d’une activité centrée sur elle-même dans laquelle l’individu éprouve un sentiment de bien-être dynamique et d’assurance en lui-même (il est dans le flux, dans le courant). Le jeu serait alors un espace de découverte de ce type d’expérience, auquel il offrirait un cadre et un dispositif privilégiés.

Jouer est donc une façon de souffler, certes, mais surtout une manière de se constituer d’un nouveau souffle.