Intergénération en vacances
Ils sont installés dans le hall du musée. Les grands-parents ont apporté leur tablette. Le temps de faire une petite préparation avant de monter voir l’exposition.
– Connaissez-vous Fernand Léger ? questionne le grand-père
– Il a été influencé par un peintre d’Aix en Provence, affirme la grand-mère
– Paul Cézanne ? demande la plus grande des petites-filles, on l’a étudié à l’école…
Ainsi le mode de vacances, qui se sera le plus développé ces dernières années, consiste à partir quelques jours ou quelques semaines dans la famille. Il suffit de passer un peu de temps dans une gare ou un aéroport durant ces temps d’été pour constater le nombre important de grands-parents qui emmènent ou ramènent leurs petits-enfants.
Ce phénomène s’est également développé durant les petites vacances. Il correspond à plusieurs évolutions.
Celle liée aux conditions économiques évidemment qui conduisent à la fois à réduire le temps de départ familial en vacances, mais aussi qui empêchent de nombreuses familles à pouvoir financer des départs en séjour de vacances collectives de leurs enfants. Le prix des « colonies » de vacances est la première cause à baisse régulière de leur fréquentation : les aides ne concernant pas une majorité de familles moyennes et les comités d’entreprise étant moins nombreux.
Celle d’un nouveau rôle des grands-parents accompagnant leurs meilleures conditions de santé et leur disponibilité. En effet, si les grands-parents ne sont pas forcément plus jeunes qu’avant, ils sont davantage en forme. Les progrès de la médecine, les conditions de vie moins difficiles (pas pour tous, mais pour beaucoup tout de même), l’allongement de l’espérance de vie permettent aux retraités d’avoir l’énergie et -souvent l’envie- de consacrer du temps à leurs petits-enfants.
Et pas seulement pour les garder. Mais pour vivre avec eux des moments de partages, de découvertes, de vie commune. En présence ou non des parents.
On peut ainsi voir séniors et juniors ensemble, randonner, visiter des musées, faire du sport, jouer, découvrir villes et monuments, se reposer, se détendre… Pour certains même, voyager à l’étranger.
Ainsi, se reconstitue le temps des vacances une relation intergénérationnelle qui avait semblé un temps s’être affaiblie.
L’éclatement des familles, géographiquement (les enfants n’habitant plus forcément dans les mêmes régions que leurs parents) et sociologiquement (familles recomposées) avait marqué une distance. Une nouvelle proximité se reconstruit. Elle est même facilitée par le numérique qui permet une communication à distance régulière entre grands-parents et petits-enfants.
Cette relation est importante. Elle participe à la construction des individus, dans un rapport qui n’est pas celui de parents à enfants. Elle a un rôle éducatif, au sens large. Elle participe à l’ouverture des esprits. Les plus jeunes et les plus âgés peuvent confronter leur vision du monde (celui d’aujourd’hui comme celui d’hier ou de demain), échanger sur leurs envies, leurs rêves, leurs difficultés. Ils s’apprennent mutuellement et ensemble. Peuvent développer des sentiments d’affection profonde.
Dans une société qui a tendance à compartimenter les individus, à séparer les générations, à catégoriser les âges, les relations intergénérationnelles permettent de créer du lien. Les vacances en sont un temps privilégié. Et celles entre petits-enfants et grands-parents une belle opportunité.
Denis Adam, le 26 juillet 2017