Humains et machines : quelles interactions au travail ?
Des interrogations multifactorielles et complexes
Partant du constat que “des robots aux exosquelettes, du télétravail à la réalité virtuelle, la place de la machine au travail véhicule autant de réalités que de projections, entre libération et aliénation des travailleurs”, dans ce rapport, le CNNum analyse et propose 10 leviers pour nous permettre d’être des acteurs·ices à part entière de notre relation aux outils numériques au travail. D’emblée, les auteurs et autrices du rapport soulignent que plus qu’il ne disparaît, le travail se métamorphose au fil de l’évolution des technologies interrogeant sans cesse la coexistence des humains et des machines dans l’environnement professionnel. Ainsi, les interrogations sur cette métamorphose sont multiples et complexes, en voici quelques-unes.
Comment leur introduction et leurs évolutions sont-elles vécues par les travailleurs et travailleuses ? Comment s’en emparer ? Dans quelle mesure les outils numériques favorisent-ils l’émergence de meilleures relations au travail ? Que se produit-il lorsque la machine dysfonctionne ? Comment se nouent les interactions dans des équipes de plus en plus numérisées, que ce soit sous la forme de bras robotiques industriels ou de visioconférences ?
Les réponses sont encore plus diverses et complexes, pour faire court, cela dépend ! En effet, cela dépend des situations, des catégories socio-professionnelles, des filières, des ressentis, des perceptions et des capacités d’adaptation à l’usage des machines dans le monde professionnel. Ainsi, dans les interactions entre humains et machines dans le monde du travail apparaît une fragmentation des environnements de travail et de différenciation.
Une analyse enrichissante structurée en 4 temps
Le CNNum a mené une analyse à la fois au niveau individuel et collectif, permettant d’examiner les relations directes entre les deux groupes, et celles entre humains lorsque nos corps sont médiés (comme en visioconférence), représentés (comme dans le métavers) ou associés à la machine (comme avec des exosquelettes).
Le rapport se décompose en 4 étapes :
- Corps et interactions entre humains et machines : de l’importance du langage non verbal. L’interaction entre les personnes passe beaucoup par le langage des corps, comment s’insèrent les machines dans ces interactions ? L’étude souligne les formes plus ou moins réussies de ces interactions inédites et leurs conséquences variées.
- Machine, travail et corps : la révolution industrielle se prolonge à l’ère numérique. L’étude est plus limpide et souligne une avancée dans la pénibilité des tâches, l’allégement des risques… mais au détriment d’une perte de sens et de compétences des travailleurs et travailleuses allant même jusqu’à un sentiment de déshumanisation.
- La machine entre dans les bureaux : révolution numérique, travailleurs·euses intermédiaires et cadres. À nouveau, le rapport souligne les avancées permises mais qui sont contrebalancées par la surcharge informationnelle, l’hyperconnectivité, les fatigues associées… entraînant également une perte de sens. Ce sentiment se voit renforcé depuis la pandémie avec le développement d’une forme hybride “bureau/télétravail” qui fragmente les équipes et les lieux de travail.
- La machine comme extension du corps : vers d’autres façons d’être au travail ? Le rapport s’interroge sur les dernières avancées qui se déploient progressivement permettant d’améliorer davantage l’efficacité des corps des travailleurs·euses comme les exosquelettes. Il s’agit de dispositifs visant à “augmenter” des corps pour réaliser des tâches que ni l’humain ni la machine ne sont capables de faire de façon autonome. Les membres du CNNum relèvent les questions éthiques, physiques, psychologiques et juridiques à se poser par ces innovations.
En conclusion, 10 leviers sont présentés avec pour objectif de rendre les humains acteurs de leur relation aux machines auxquels ils sont confrontés dans l’exercice de leur activité, et ce, dès la conception de ces outils. Il est souligné de se soucier des effets et conséquences pour les personnes dans l’utilisation de ces outils, pour veiller à ce que les dispositifs soient toujours, et avant tout, au bénéfice de l’humain. À l’heure où les avancées de l’intelligence artificielle avec ChatGPT font l’objet de débats, ce rapport arrive à point nommé. À l’UNSA Éducation nous considérons qu’il en va de même pour l’Éducation : les avancées technologiques doivent demeurer des outils et non une fin. L’École du futur ne pourra pas reposer que sur le développement numérique et technologique en son sein. Elle devra être profondément humanisée, dans des lieux d’étude pensés comme des lieux de vie, de lien social, intergénérationnels et ouverts sur le monde.
Pour aller plus loin :