Francophonie : vers un renouveau africain ?

Le jeudi 20 mars 2014, dans le cadre de la semaine de la langue française et de la Francophonie, Madame Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la Francophonie et représentante personnelle du président de la République pour l’OIF (organisation internationale de la Francophonie), a lancé le programme « 100 000 professeurs pour l’Afrique » en présence de Monsieur Laurent Fabius ministre des affaires étrangères.

Le jeudi 20 mars 2014, dans le cadre de la semaine de la langue française et de la Francophonie, Madame Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la Francophonie et représentante personnelle du président de la République pour l’OIF (organisation internationale de la Francophonie), a lancé le programme « 100 000 professeurs pour l’Afrique » en présence de Monsieur Laurent Fabius ministre des affaires étrangères.

Cette ambition répond à deux préoccupations en apparence contradictoires : limiter le recul actuel du français face à un anglais toujours conquérant et anticiper l’évolution démographique de l’Afrique dont le dynamisme se traduira, vers 2050 par la présence de plus de 500 millions de locuteurs francophones potentiels. C’est donc, selon Laurent Fabius, « une course de vitesse [qui] est engagée entre croissance démographique et croissance éducative et il faut que cette dernière l’emporte ».

Un ensemble de dispositifs nouveaux, centrés sur le numérique et la formation à distance, sont proposés dans le projet « 100 000 professeurs pour l’Afrique ». Le programme comprendra :
– un appui aux universités et centres de formation des enseignants, soutenu par des experts venant de tous les pays francophones,
– la formation de plusieurs centaines de tuteurs africains chargés de former des enseignants de français et des enseignements spécialisés dans le domaine du droit, du tourisme, de l’hôtellerie, etc … Ces tuteurs s’appuieront sur des dispositifs de formation à distance libres de droit et ouverts à toutes les organisations souhaitant les utiliser,
– un réseau d’échanges, IF profs porté par l’Institut Français, dans lequel les enseignants francophones disposeront d’outils en ligne et pourront partager leurs bonnes pratiques en communicant au niveau mondial,
– la mise en place du projet d’encyclopédie en ligne « Afripédia », né d’un partenariat entre l’Agence universitaire de la francophonie, l’Institut français et Wikimédia France, visant à permettre le développement rapide du numérique en Afrique avec des contenus en français.

Cette démarche, pour généreuse qu’elle soit, s’appuie sur des prévisions et des constats qu’il convient d’analyser avec précaution.
L’idée selon laquelle le français pourrait être, en 2050, la langue la plus parlée au monde ne résiste pas à une analyse approfondie. Cette affirmation, reprise abondamment par la presse, a pour origine une étude conduite par la banque d’investissement Natixis. Dans cette étude, on compte sans distinction comme francophone toute personne vivant dans un pays dont le français est la langue officielle ce qui n’est pas le cas dans bon nombre de pays d’Afrique où les langues locales sont naturellement utilisées. Il n’en reste pas moins que la langue française, langue des médias et de l’administration, pourrait devenir la 2ème ou 3ème langue internationale à cette date.

L’idée de confier une grande partie du projet à l’Institut Français est excellente. Encore faudrait-il lui en donner des moyens alors que depuis plusieurs années le gouvernement taille allègrement dans les budgets qui lui sont attribués!
L’opération « 100 000 professeurs pour l’Afrique » s’engage résolument sur le tout numérique et nous nous en félicitons. Croire cependant que cela permettra facilement de pallier l’absence d’enseignants et la faiblesse des formations qui leur sont apportées tient de l’illusion dans une Afrique francophone où 60% de la population a moins de 30 ans. Les états, porteurs légitimes des systèmes nationaux d’éducation seront-ils associés à ces opérations étant eux-mêmes confrontés aux difficultés posées par une scolarisation de masse qu’ils ont beaucoup de mal à conduire ?

Pour réussir, le projet « 100 000 professeurs pour l’Afrique » doit s’inscrire dans la durée, s’appuyer sur des réseaux allant bien au delà de celui de l’Institut Français et accepter également l’idée que l’éducation ne se limite pas à une simple transmission de connaissances, fût-elle par le biais du tout numérique. Enseigner le français en Afrique, dans l’esprit des objectifs du millénaire pour le développement (OMD), c’est aussi enseigner une culture et des valeurs d’émancipation et promouvoir le respect des droits fondamentaux pour tous.

Sélectionnés pour vous
+ d’actualités nationales

Le jeudi 20 mars 2014, dans le cadre de la semaine de la langue française et de la Francophonie, Madame Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la Francophonie et représentante personnelle du président de la République pour l’OIF (organisation internationale de la Francophonie), a lancé le programme « 100 000 professeurs pour l’Afrique » en présence de Monsieur Laurent Fabius ministre des affaires étrangères.

Cette ambition répond à deux préoccupations en apparence contradictoires : limiter le recul actuel du français face à un anglais toujours conquérant et anticiper l’évolution démographique de l’Afrique dont le dynamisme se traduira, vers 2050 par la présence de plus de 500 millions de locuteurs francophones potentiels. C’est donc, selon Laurent Fabius, « une course de vitesse [qui] est engagée entre croissance démographique et croissance éducative et il faut que cette dernière l’emporte ».

Un ensemble de dispositifs nouveaux, centrés sur le numérique et la formation à distance, sont proposés dans le projet « 100 000 professeurs pour l’Afrique ». Le programme comprendra :
– un appui aux universités et centres de formation des enseignants, soutenu par des experts venant de tous les pays francophones,
– la formation de plusieurs centaines de tuteurs africains chargés de former des enseignants de français et des enseignements spécialisés dans le domaine du droit, du tourisme, de l’hôtellerie, etc … Ces tuteurs s’appuieront sur des dispositifs de formation à distance libres de droit et ouverts à toutes les organisations souhaitant les utiliser,
– un réseau d’échanges, IF profs porté par l’Institut Français, dans lequel les enseignants francophones disposeront d’outils en ligne et pourront partager leurs bonnes pratiques en communicant au niveau mondial,
– la mise en place du projet d’encyclopédie en ligne « Afripédia », né d’un partenariat entre l’Agence universitaire de la francophonie, l’Institut français et Wikimédia France, visant à permettre le développement rapide du numérique en Afrique avec des contenus en français.

Cette démarche, pour généreuse qu’elle soit, s’appuie sur des prévisions et des constats qu’il convient d’analyser avec précaution.
L’idée selon laquelle le français pourrait être, en 2050, la langue la plus parlée au monde ne résiste pas à une analyse approfondie. Cette affirmation, reprise abondamment par la presse, a pour origine une étude conduite par la banque d’investissement Natixis. Dans cette étude, on compte sans distinction comme francophone toute personne vivant dans un pays dont le français est la langue officielle ce qui n’est pas le cas dans bon nombre de pays d’Afrique où les langues locales sont naturellement utilisées. Il n’en reste pas moins que la langue française, langue des médias et de l’administration, pourrait devenir la 2ème ou 3ème langue internationale à cette date.

L’idée de confier une grande partie du projet à l’Institut Français est excellente. Encore faudrait-il lui en donner des moyens alors que depuis plusieurs années le gouvernement taille allègrement dans les budgets qui lui sont attribués!
L’opération « 100 000 professeurs pour l’Afrique » s’engage résolument sur le tout numérique et nous nous en félicitons. Croire cependant que cela permettra facilement de pallier l’absence d’enseignants et la faiblesse des formations qui leur sont apportées tient de l’illusion dans une Afrique francophone où 60% de la population a moins de 30 ans. Les états, porteurs légitimes des systèmes nationaux d’éducation seront-ils associés à ces opérations étant eux-mêmes confrontés aux difficultés posées par une scolarisation de masse qu’ils ont beaucoup de mal à conduire ?

Pour réussir, le projet « 100 000 professeurs pour l’Afrique » doit s’inscrire dans la durée, s’appuyer sur des réseaux allant bien au delà de celui de l’Institut Français et accepter également l’idée que l’éducation ne se limite pas à une simple transmission de connaissances, fût-elle par le biais du tout numérique. Enseigner le français en Afrique, dans l’esprit des objectifs du millénaire pour le développement (OMD), c’est aussi enseigner une culture et des valeurs d’émancipation et promouvoir le respect des droits fondamentaux pour tous.