Et si nous maîtrisions mieux l’empreinte carbone ?
Il y a quelques jours, nous vous avons présenté le contenu du rapport 2019 du Haut Conseil pour le climat (Voir l’article ici). Ce dernier traitait de la transition bas carbone en France et apportait des recommandations pour l’action publique.
Complément non négligeable de ce rapport, celui intitulé « Maitriser l’empreinte carbone de la France » apporte des précisions. Allant plus dans le détail, ce second rapport du Haut Conseil pour le climat traite surtout des émissions de gaz à effet de serre importées et de celles émises par les transports internationaux. Il s’agit de ne pas laisser de côté la part de responsabilité que peut avoir la France dans les échanges internationaux.
Ce rapport commence par nous rappeler ce qu’est l’empreinte carbone: « « L’empreinte carbone de la France » est entendue ici comme l’ensemble des « pressions sur le climat de la demande intérieure française, quelle que soit l’origine géographique des produits consommés », conformément à la définition qu’en donne l’Insee. »1
Il s’agit de prendre en compte les émissions de gaz à effet de serre liées à la production et la consommation de biens ou de services en France. Elle inclut également les émissions d’un objet lorsqu’il est utilisé, et donc consomme de l’énergie par exemple, en France. Le problème avec cette approche de l’empreinte carbone, c’est qu’elle n’inclut pas dans son bilan les émissions que peut émettre la France lorsqu’elle importe ou exporte des biens, des services ou lorsque ces derniers font l’objet d’échanges internationaux. De ce fait, leur poids ne joue pas dans la balance de nos engagements climatiques. L’idée est donc de les analyser afin de proposer une feuille de route pour la réduction de l’empreinte carbone et de mettre en place des politiques publiques adaptées pour avoir une transition énergétique plus adaptée et juste.
Il faut savoir que la loi énergie-climat prévoit un plafond indicatif à compter de 2022 pour l’empreinte carbone dont les émissions importées font partie. L’objectif est de réduire ces émissions de 65 %, tout compris, pour 2050. Ce serait le plus cohérent pour limiter le réchauffement planétaire à 1,5° C. Cela redonnerait aussi à la France l’image d’un pays qui parvient à mener à bien ses objectifs.
Quels leviers pour atteindre ces objectifs?
Le 1er levier se situe au niveau des entreprises qui doivent limiter les émissions importées associées aux chaînes d’approvisionnement. En effet, si certains biens sont fabriqués en France, leurs matières premières peuvent parfois provenir d’un autre pays, voire d’un autre continent, ce qui a un impact sur les émissions de gaz à effet de serre. Il faut donc «responsabiliser et accompagner les entreprises françaises quant aux émissions importées par le biais de leurs chaînes de valeur».
Le 2ème levier n’est pas le plus évident mais a un impact non négligeable: les ménages. Souvent mal informés, ils peuvent avoir une consommation excessive, plus grande que ce dont ils ont réellement besoin. Il faut donc les accompagner pour les guider progressivement vers une consommation plus sobre. Le pouvoir d’achat doit également être questionné car il a un rôle à jouer dans cet équilibre fragile.
Le 3ème levier, quant à lui, doit replacer la France dans ses actions au sein de l’Europe, notamment en s’investissant davantage sur les accords de libre-échange, comme le Mercosur par exemple. Elle doit également inclure l’impact sur la déforestation importée.
Enfin, le dernier levier est au niveau des politiques à l’étranger, hors Union Européenne. Les objectifs principaux doivent être renforcés par la France, surtout dans le cadre de l’accord de Paris, à savoir une diminution de 65 % des émissions importées de gaz à effet de serre à l’horizon 2050 par rapport à 2005.
Comment calculer au mieux nos émissions?
Un encadré de ce rapport nous explique la différence qui existe entre l’empreinte carbone et l’analyse du cycle de vie (ACV). L’empreinte carbone calcule toutes les émissions en amont de la fabrication d’un produit et lors de sa fabrication mais pas ce qui se passe en aval (consommation, exportation, etc).
L’ ACV, au contraire, englobe l’ensemble des émissions d’un objet depuis l’extraction des matières 1ères jusqu’à sa consommation et son recyclage, son arrivée à l’état de déchet. Il s’agit d’avoir un niveau très fin d’analyse pour comparer ensuite les biens entre eux.
Ces deux méthodes de calcul permettent de dresser un bilan des émissions de gaz à effet de serre précis.
Ce rapport nous sensibilise donc sur le fait que les émissions importées doivent être mieux calculées et définies car elles ne sont pas encore prises en compte dans la stratégie de réduction des gaz à effet de serre alors que leur impact est majeur. L’empreinte carbone de la France semble diminuer depuis 2005 mais, en réalité, cette tendance masque une diminution continue des émissions sur le territoire national et une augmentation continue des émissions importées. La réduction de ces dernières ne doit pas reposer que sur les autres pays du monde. Ce serait insuffisant pour respecter les accords de Paris. « Il est donc légitime que la France se préoccupe des moyens à sa disposition pour réduire ses émissions importées.»
L’UNSA Éducation souligne l’intérêt des travaux et des préconisations du Haut Conseil pour le climat cherchant à affiner notre taux d’émissions pour aller toujours vers une transition plus adaptée qui soit juste et équitable pour toutes et tous.
1. Lire l’intégralité du rapport «Maitriser l’empreinte carbone de la France» ici