Donneurs de leçons

« Chouette, on a pas de devoirs ! » se réjouissait hier soir les élèves d’une école primaire en sortant de leur premier jour de classe de cette nouvelle année scolaire. Ils évoquaient ces fameux devoirs à la maison, interdits depuis…1956, mais qui existent toujours, souvent habillés sous la plus acceptable étiquette de « leçons ».

« Chouette, on a pas de devoirs ! » se réjouissait hier soir les élèves d’une école primaire en sortant de leur premier jour de classe de cette nouvelle année scolaire. Ils évoquaient ces fameux devoirs à la maison, interdits depuis…1956 (*), mais qui existent toujours, souvent habillés sous la plus acceptable étiquette de « leçons ».

Et il est vrai que le monde de l’Éducation regorge de donneurs de leçons.

Bien sûr, il y a tous les enseignants qui donnent du travail à réaliser en dehors des temps de la classe ou de cours. L’utilité de ces « devoirs » est régulièrement remise en question -c’était déjà le cas en 1956-, d’autant qu’ils renforcent les inégalités entre les élèves qui possèdent de bonnes conditions familiales pour pouvoir les réaliser et les autres. Pour autant, le travail à la maison est souvent réclamé par les parents –y voyant certainement, entres autres, une manière de faire du lien avec la scolarité de leurs enfants et de prendre leur part de cette éducation- et même par certains élèves.

Plutôt que de condamner cette pratique, mieux vaut l’interroger et se demander à quels besoins elle répond, ce qu’elle apporte, ce qu’elle provoque. Il est vraisemblable que le temps de l’école doit suffire pour faire des exercices, mener des recherches, faire des lectures et même apprendre des leçons ou des récitations. Il est aussi important que le temps des apprentissages ne soit pas limité aux seules heures de classe ou de cours. Impliquer les parents, les autres acteurs éducatifs, les enfants et les jeunes eux-mêmes dans la construction de leurs savoirs, l’acquisition et le développement de leurs compétences relève d’une articulation entre l’ensemble des temps éducatifs et cela a du sens. D’ailleurs n’est-ce pas cela exactement l’esprit de la réforme des rythmes ? Que ne l’a-t-on pas dit à certains maires !

Et nous touchons ici une seconde catégorie de « donneurs de leçons », ceux qui savent mieux que les autres ce qu’il faudrait faire ou dire, mais tardent souvent eux-mêmes à faire ou dire ce qu’il faudrait. Ceux qui sont plus prompts à la critique qu’à la construction, plus enclins aux phrases assassines qu’aux gestes solidaires, plus centrés sur le « moi, je » que sur l’action collective. Ces derniers temps, les « donneurs de leçons » de cette catégorie semblent se multiplier dans le domaine de l’Éducation et des syndicalistes aux politiques, ils y tiennent tribunes.

Alors bien entendu, venir les critiquer et dire que ce qu’ils font et disent n’est pas ce qu’il faudrait faire ou dire, revient à créer une troisième catégorie, celle des « donneurs de leçons aux donneurs de leçons », ce qui avouons-le n’est pas forcément plus constructif et peut même s’avérer sans limite.

Peut-on se contenter d’émettre un simple vœu, de fixer un seul devoir à tout « donneur de leçons » : celui de faire, de proposer, de réaliser. La critique –si elle est, ensuite, encore nécessaire- n’en sera que plus constructive.

 

(*) L’arrêté du 23 novembre 1956 (B.O. n° 42 du 29-11-56, p. 3005 ; 100-Pr-& II a, p. 9), déjà relatif à l’aménagement des horaires des cours élémentaires et moyens des écoles primaires, permettait de dégager cinq heures par semaine pour la rédaction des devoirs et acter la suppression des devoirs à la maison ou en étude.

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« Chouette, on a pas de devoirs ! » se réjouissait hier soir les élèves d’une école primaire en sortant de leur premier jour de classe de cette nouvelle année scolaire. Ils évoquaient ces fameux devoirs à la maison, interdits depuis…1956 (*), mais qui existent toujours, souvent habillés sous la plus acceptable étiquette de « leçons ».

Et il est vrai que le monde de l’Éducation regorge de donneurs de leçons.

Bien sûr, il y a tous les enseignants qui donnent du travail à réaliser en dehors des temps de la classe ou de cours. L’utilité de ces « devoirs » est régulièrement remise en question -c’était déjà le cas en 1956-, d’autant qu’ils renforcent les inégalités entre les élèves qui possèdent de bonnes conditions familiales pour pouvoir les réaliser et les autres. Pour autant, le travail à la maison est souvent réclamé par les parents –y voyant certainement, entres autres, une manière de faire du lien avec la scolarité de leurs enfants et de prendre leur part de cette éducation- et même par certains élèves.

Plutôt que de condamner cette pratique, mieux vaut l’interroger et se demander à quels besoins elle répond, ce qu’elle apporte, ce qu’elle provoque. Il est vraisemblable que le temps de l’école doit suffire pour faire des exercices, mener des recherches, faire des lectures et même apprendre des leçons ou des récitations. Il est aussi important que le temps des apprentissages ne soit pas limité aux seules heures de classe ou de cours. Impliquer les parents, les autres acteurs éducatifs, les enfants et les jeunes eux-mêmes dans la construction de leurs savoirs, l’acquisition et le développement de leurs compétences relève d’une articulation entre l’ensemble des temps éducatifs et cela a du sens. D’ailleurs n’est-ce pas cela exactement l’esprit de la réforme des rythmes ? Que ne l’a-t-on pas dit à certains maires !

Et nous touchons ici une seconde catégorie de « donneurs de leçons », ceux qui savent mieux que les autres ce qu’il faudrait faire ou dire, mais tardent souvent eux-mêmes à faire ou dire ce qu’il faudrait. Ceux qui sont plus prompts à la critique qu’à la construction, plus enclins aux phrases assassines qu’aux gestes solidaires, plus centrés sur le « moi, je » que sur l’action collective. Ces derniers temps, les « donneurs de leçons » de cette catégorie semblent se multiplier dans le domaine de l’Éducation et des syndicalistes aux politiques, ils y tiennent tribunes.

Alors bien entendu, venir les critiquer et dire que ce qu’ils font et disent n’est pas ce qu’il faudrait faire ou dire, revient à créer une troisième catégorie, celle des « donneurs de leçons aux donneurs de leçons », ce qui avouons-le n’est pas forcément plus constructif et peut même s’avérer sans limite.

Peut-on se contenter d’émettre un simple vœu, de fixer un seul devoir à tout « donneur de leçons » : celui de faire, de proposer, de réaliser. La critique –si elle est, ensuite, encore nécessaire- n’en sera que plus constructive.

 

(*) L’arrêté du 23 novembre 1956 (B.O. n° 42 du 29-11-56, p. 3005 ; 100-Pr-& II a, p. 9), déjà relatif à l’aménagement des horaires des cours élémentaires et moyens des écoles primaires, permettait de dégager cinq heures par semaine pour la rédaction des devoirs et acter la suppression des devoirs à la maison ou en étude.