Deux ans à peine, deux ans déjà

Il y a deux ans à peine, deux ans déjà (comme aurait pu chanter Mort Schuman) -où presque- ce billet hebdomadaire débutait par un « c’est mieux en le faisant » alors que la loi de refondation de l’Ecole de la République venait d’être votée et publiée au journal officiel (le 9 juillet 2013).

Il est vrai qu’alors tout restait à faire. Qu’en est-il deux ans plus tard ?

La perception du temps passé est forcément différente selon les acteurs.

Ce sont des centaines d’heures dans des dizaines de réunions qui ont occupé les négociateurs syndicaux, le cabinet des ministres de l’Education nationale successifs et la DGESCO.

Ce sont peu de changements qui sont effectivement déjà en œuvre dans les écoles et les établissements scolaires.

Paradoxe : le temps de la réforme urgente est un temps long.

Parce qu’il faut qu’elle soit réfléchie, pertinente, cohérente, partagée…
Parce qu’elle doit s’inscrire dans la durée : pas dans une mode éphémère mais dans une transformation en profondeur des mentalités, des approches, des pratiques.

Ce qui est fait, c’est le changement des rythmes éducatifs, la mise en fabrication des PEDT (projet éducatif de territoire), la création des ESPé, le plus de maîtres que de classes, la nouvelle carte de l’éducation prioritaire…

Ce qui est décidé, c’est la réforme du collège, l’articulation école/collège, les nouveaux cycles, les « parcours avenir » et « d’éducation artistique et culturelle » (publiés au JO du mardi 7 juillet 2015)…

Ce qui doit encore venir ce sont les nouveaux programmes, l’évaluation, la formation continue pour mettre tout cela en œuvre…

Les concrétisations de la refondation de l’Ecole, pour l’essentiel, sont encore à venir.

Alors, évidemment, le « Rapport de performances annexé à la loi de finances 2014 », construit sur les indicateurs officiels de la loi de finances, qui vient d’être publié, conduit à conclure -et ce malgré quelques bonnes nouvelles comme la diminution de la proportion de jeunes sans diplôme et n’étant ni en emploi ni en formation ou de meilleurs indicateurs de lutte contre le décrochage, que globalement les objectifs de la refondation sont loin d’être atteints.

Et encore ne s’agit-il là que de la première partie de la scolarité, celle de l’école maternelle et celle du socle commun. Rien de nouveau du côté du lycée qui en est encore à digérer la réforme précédente, rien ou si peu sur l’articulation Bac-3 Bac+3, sur la lutte contre l’échec en licence, sur la valorisation de l’emploi scientifique. Rien encore sur la reconnaissance et la qualification du métier d’animateur, sur l’implication conjointe des IEN et des personnels pédagogiques de jeunesse et sports pour l’accompagnement des politiques éducatives dans les territoires, sur une réelle coéducation…

Le chantier ouvert est d’importance. Celui à venir demeure immense.

Les logiques de ce qui a été initié doivent dorénavant irriguer le reste. Malgré les difficultés rencontrées et les aménagements indispensables, c’est une transformation qui est en cours. Elle demandera du temps et beaucoup d’énergie de la part de tous les acteurs éducatifs.

Or, il reste à ce gouvernement deux ans encore, deux ans à peine. Le temps politique va de nouveau se tendre vers un objectif unique : les prochaines élections présidentielles. Fort est à parier que le « pas de vagues, surtout pas de vagues » sera de mise et que chaque réforme envisageable sera mesurée à l’aune de son impact possible sur le futur résultat électoral.
Dans ce contexte, quelle sera la place de l’Education ? Toute pause serait interprétée comme un renoncement, tout recul comme une victoire pour ceux qui veulent que rien ne change.


Deux ans, deux ans à peine. Tel est le temps qu’il reste pour ancrer l’esprit de la refondation dans la réalité des pratiques et faire du changement éducatif un élément structurant de la construction d’avenir de notre société qu’elle que soient les évolutions politiques possibles.

Deux ans à peine…autant dire qu’il n’y a pas de temps à perdre.

 

Denis ADAM, le 8 juillet 2015
 

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Il y a deux ans à peine, deux ans déjà (comme aurait pu chanter Mort Schuman) -où presque- ce billet hebdomadaire débutait par un « c’est mieux en le faisant » alors que la loi de refondation de l’Ecole de la République venait d’être votée et publiée au journal officiel (le 9 juillet 2013).

Il est vrai qu’alors tout restait à faire. Qu’en est-il deux ans plus tard ?

La perception du temps passé est forcément différente selon les acteurs.

Ce sont des centaines d’heures dans des dizaines de réunions qui ont occupé les négociateurs syndicaux, le cabinet des ministres de l’Education nationale successifs et la DGESCO.

Ce sont peu de changements qui sont effectivement déjà en œuvre dans les écoles et les établissements scolaires.

Paradoxe : le temps de la réforme urgente est un temps long.

Parce qu’il faut qu’elle soit réfléchie, pertinente, cohérente, partagée…
Parce qu’elle doit s’inscrire dans la durée : pas dans une mode éphémère mais dans une transformation en profondeur des mentalités, des approches, des pratiques.

Ce qui est fait, c’est le changement des rythmes éducatifs, la mise en fabrication des PEDT (projet éducatif de territoire), la création des ESPé, le plus de maîtres que de classes, la nouvelle carte de l’éducation prioritaire…

Ce qui est décidé, c’est la réforme du collège, l’articulation école/collège, les nouveaux cycles, les « parcours avenir » et « d’éducation artistique et culturelle » (publiés au JO du mardi 7 juillet 2015)…

Ce qui doit encore venir ce sont les nouveaux programmes, l’évaluation, la formation continue pour mettre tout cela en œuvre…

Les concrétisations de la refondation de l’Ecole, pour l’essentiel, sont encore à venir.

Alors, évidemment, le « Rapport de performances annexé à la loi de finances 2014 », construit sur les indicateurs officiels de la loi de finances, qui vient d’être publié, conduit à conclure -et ce malgré quelques bonnes nouvelles comme la diminution de la proportion de jeunes sans diplôme et n’étant ni en emploi ni en formation ou de meilleurs indicateurs de lutte contre le décrochage, que globalement les objectifs de la refondation sont loin d’être atteints.

Et encore ne s’agit-il là que de la première partie de la scolarité, celle de l’école maternelle et celle du socle commun. Rien de nouveau du côté du lycée qui en est encore à digérer la réforme précédente, rien ou si peu sur l’articulation Bac-3 Bac+3, sur la lutte contre l’échec en licence, sur la valorisation de l’emploi scientifique. Rien encore sur la reconnaissance et la qualification du métier d’animateur, sur l’implication conjointe des IEN et des personnels pédagogiques de jeunesse et sports pour l’accompagnement des politiques éducatives dans les territoires, sur une réelle coéducation…

Le chantier ouvert est d’importance. Celui à venir demeure immense.

Les logiques de ce qui a été initié doivent dorénavant irriguer le reste. Malgré les difficultés rencontrées et les aménagements indispensables, c’est une transformation qui est en cours. Elle demandera du temps et beaucoup d’énergie de la part de tous les acteurs éducatifs.

Or, il reste à ce gouvernement deux ans encore, deux ans à peine. Le temps politique va de nouveau se tendre vers un objectif unique : les prochaines élections présidentielles. Fort est à parier que le « pas de vagues, surtout pas de vagues » sera de mise et que chaque réforme envisageable sera mesurée à l’aune de son impact possible sur le futur résultat électoral.
Dans ce contexte, quelle sera la place de l’Education ? Toute pause serait interprétée comme un renoncement, tout recul comme une victoire pour ceux qui veulent que rien ne change.


Deux ans, deux ans à peine. Tel est le temps qu’il reste pour ancrer l’esprit de la refondation dans la réalité des pratiques et faire du changement éducatif un élément structurant de la construction d’avenir de notre société qu’elle que soient les évolutions politiques possibles.

Deux ans à peine…autant dire qu’il n’y a pas de temps à perdre.

 

Denis ADAM, le 8 juillet 2015