Analyses et décryptages

Derrière le bilan de Parcoursup pèse un long processus d’orientation

Selon la récente enquête de l’institut de sondage Ipsos pour le compte du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, venant en complément du bilan ministériel de 2021,les néo-bachelier•ères sont très largement satisfait•es de Parcoursup, malgré le stress que génère la plateforme. Mais une analyse fine des chiffres appelle à davantage de mesure, voire une critique quant à une orientation pas toujours en accord avec les choix premiers des jeunes.

Pour l’UNSA Éducation, l’amélioration positive de la plateforme ne doit pas faire oublier la nécessité d’un suivi très fort du processus global d’orientation des élèves. L’enjeu est bien celui de la démocratisation de l’Enseignement supérieur dans un contexte de réformes des différentes voies du lycée et du bac général et technologique. Pour cela il faut une analyse plus poussée des jeunes laissés sans solutions ou qui abandonnent, plus d’études sur l’orientation en fonction de différents critères (filière, territoire, PSC des parents, genre, …). Cela nécessite également de poser la question des places et des capacités réelles d’accueil dans l’enseignement supérieur.
 
 
Côté chiffres, l’enquête Ipsos n’en finit pas d’empiler les bons scores : l’outil Parcoursup est fonctionnel pour près de deux tiers des étudiant•es sondé•es alors qu’il est jugé clair en termes d’information sur les formations pour 82 % d’entre elles/eux. Il permet en outre « d’avoir une idée des ses chances de succès concernant une candidature » pour 7 jeunes sur 10 alors qu’au bout du processus, ce sont 97 % de personnes interrogées qui déclarent avoir été admises dans une formation quels que soient les types de baccalauréats obtenus ou les formations demandées. Et ce sont 70 % des admis•es en formation qui se déclarent satisfait•es des réponses reçues ainsi que du délai d’admission.
 
Vidéo tuto appréciées
 
« Pour plus des 2/3 des tiers des jeunes sondés, Parcoursup a facilité l’entrée dans le supérieur et l’élaboration du projet d’orientation », indique encore le sondage, confirmant l’efficacité d’un outil qui plaît notamment grâce à ses vidéos tuto (89 % de très satisfait•es). De quoi réjouir le ministère qui a publié conjointement à cette enquête effectuée sur un échantillon de 1010 néo-bachelier•ères son propre bilan « grandeur réelle », tout aussi positif en termes d’efficacité.
 
De ce bilan national, retenons quelques données d’ensemble : ce sont 931.000 candidat•es qui ont formulé un total de 11,5 millions de vœux, sachant que 202.000 candidat•es ont formulé des vœux en apprentissage, soit une hausse de 16,2 % sur un an et de 37 % en deux ans. Ce sont 93 % des lycéennes et lycéens qui ont reçu au moins une proposition et, selon le ministère, seulement 239  candidat•es étaient encore suivi•es par la commission d’accès à l’enseignement supérieur (CAES) à l’heure du bilan.
 Des interrogations en suspens
Au-delà même des bachelier·eres qui n’ont pas candidatés sur Parcoursup, un nombre conséquent disparait des radars au fur et à mesure du processus. Ce serait en fait plus de 22.000 bachelier•ères qui ont quitté la plateforme avant d’avoir reçu une réponse parce qu’ils n’espéraient rien de Parcoursup et qui sont allé•es gonfler les effectifs de celles et ceux qui se sont tourné•es vers le service civique faute de mieux. S’y ajouteraient quelque 22.000 autres candidat•es ayant disparu des écrans radars pendant l’été.
 
Par ailleurs, alors que le ministère revendique un système qui garantit l’égalité des chances – on peut s’interroger sur cette garantie vu les nombreux jeunes qui ont quitté d’eux/elles mêmes Parcoursup sans doute par sentiment de ne pas être à la hauteur de la sélection – du côté de celles et ceux qui n’avaient pas cette défiance, ils seraient aujourd’hui des dizaines à être à leur tour désabusé•es car n’ayant reçu en première phase que des réponses négatives alors qu’ils présentaient un très bon dossier. En participant à la phase complémentaire, ils ont eu ensuite l’amer sentiment d’avoir été dirigés vers « la voiture-balai » de Parcoursup. Il faut pouvoir objectiver ces situations et y porter une grande attention. Dans ce bilan de Parcoursup sur la formation par apprentissage, il faudrait là encore bien mesurer quels sont finalement, les contrats réellement signés.
 
Grand écart entre promesses et réalité
 
A partir de ce grand écart entre les promesses ministérielles d’une orientation réussie et les réalités d’un outil numérique, d’autres observateurs notent cette autre contradiction des décideurs publics ; ceux-ci envoient aux familles des messages centrés sur la liberté, le désir, l’ambition, le mérite, et aux pourvoyeurs de formation d’autres messages centrés sur les besoins du marché du travail, les compétences, l’insertion professionnelle. Avec, entre les deux, la réalité crue d’une carence d’emplois disponibles pour satisfaire cette dynamique démographique étudiante. Et ces mêmes observateurs de dénoncer l’impasse d’un gouvernement qui refuse d’ouvrir le nombre de places nécessaires à l’absorption de ces néo-bachelier•ères dans les filières d’études supérieures sans agir par ailleurs à la fois sur la formation initiale ET sur l’entrée sur le marché du travail dans un souci d’adapter l’offre à la demande.
 
Outil couperet
 
Par voie de conséquence, Parcoursup devient en ce cas, une procédure d’écrémage, En effet, force est de constater que de nombreux jeunes éligibles à des formations supérieures via Parcoursup se sont évaporés dans la nature, et sans doute vers des voies qui ne sont ni les apprentissages ni l’emploi.
 
Ce n’est pas l’outil Parcoursup qui est en cause mais l’ambition politique pour notre jeunesse. A l’UNSA Éducation, nous déplorons une politique publique d’orientation focalisée sur cet outil et qui promeut ainsi une orientation « couperet » brutalement sélective par refus d’aborder de front la question démographique de l’accès pour toutes et tous aux études supérieures et à l’entrée sur le marché du travail.
 

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