Comparaison n’est pas raison, mais peut être inspiration

On aime souvent citer la sentence (qui semble venir du Québec) selon laquelle « lorsqu’on s’observe on se désole, mais quand on se compare, on se console ». Si cette sagesse est salutaire pour le moral individuel et collectif, elle risque de nous priver d’une certaine lucidité. En effet s’il n’est nullement question de s’auto-flageller, il convient de s’inspirer également de ce qui se fait ailleurs. Les résultats de l’évaluation internationale PISA qui viennent de paraître, comme les travaux du comité syndical européen de l’Education actuellement en congrès à Belgrade nous y invite largement.

Il va de soi que la priorité donnée à l’Education n’est pas une réalité partout dans le monde. Nombreux pays dans le monde sont loin d’offrir une scolarité complète à l’ensemble des enfants et des jeunes. Les filles sont trop souvent encore les victimes d’une discrimination éducative. Les données internationales mettent en évidence que les effets des crises économiques se font ressentir et provoquent un ralentissement du développement de la scolarisation dans de nombreux pays -en particulier parmi les plus pauvres. Même en Europe, nombreuses situations sont ou deviennent difficiles.

En comparaison, l’investissement de la France pour l’Education n’est certes pas contestable, même si elle est variable d’un gouvernement à l’autre. Mais -puisqu’aucun consensus politique n’est réalisable sur les conceptions et les évolutions du système d’Education français- l’alternance des orientations et des réformes conduit souvent à une illisibilité et à une trop faible efficacité. Les successions des résultats des évaluations trisannuelles PISA est à ce titre riche en enseignement. De 2006 à 2015, il n’y a eu quasiment aucun progrès et les inégalités se creusent entre les élèves issus des milieux favorisés et ceux venant des familles les plus éloignées de la culture scolaire.

Si, longtemps, les dirigeants français se sont satisfaits de répéter (sans fondement) que nous avions la meilleure école du monde, aujourd’hui il apparaît que le bilan plus critique soit partagé. Ce sont dorénavant les solutions à mettre en œuvre qui vont divergence.

L’OCDE relève quatre défis que doit relever la politique éducative en France :

rendre le système éducatif plus équitable en France : soutenir les élèves et les établissements défavorisés
– lutter contre l’échec scolaire dès le plus jeune âge
– améliorer la qualité de l’enseignement et de la transmission du savoir dans le primaire et le secondaire, et revaloriser le métier d’enseignant
– rehausser la qualité et la valorisation des filières professionnelles au lycée

Mais les recommandations de l’organisation internationales ne se limitent pas à critiquer ou à donner des leçons. Elles sont accompagnées par l’exemple de nombreuses réformes qui ont été mises en œuvre dans d’autres pays de l’OCDE et qui -pour grande partie- ont permis de réelles évolutions positives.

Ainsi on peut retenir que les systèmes éducatifs les plus performants reposent sur un triptyque qui allient :
– Une formation de qualité pour les enseignants et globalement pour l’ensemble des personnels d’éducation, tant au niveau initial qu’au long de la carrière, alliant à la fois contenu disciplinaire et compétences pédagogiques
– Une mixité des origines sociales, culturelles et ethniques des élèves et une implication réelle de ceux-ci dans l’évaluation du système d’enseignement qu’ils vivent

– Une éducation partagée entre tous les acteurs, étendue à la mise en réseau des établissements afin que l’expertise des uns bénéficie aux autres.

A l’inverse, on constate des corrélations qui doivent interrogées. Ainsi plus le tôt de redoublement est important et plus l’échec scolaire est patent. Or dans ce domaine la France est de loin au premier rang. Le recul de la Suède (dans le classement Pisa) s’explique en partie par la disparition de la sectorisation scolaire et donc par un affaiblissement de la mixité scolaire.
Ces enseignements doivent être pris en compte dans la construction de la politique éducative en France.

Même si les réalités historiques, sociales, politiques, culturelles et donc éducatives sont différentes d’un pays à l’autre, nous ne vivons pas isolés. Nous ne pouvons continuer à agir comme si nous étions dans une bulle. D’autant que les politiques européennes et internationales ont des implications sur les attentes liées à l’Education.

Les résultats de notre système d’Education ont des effets essentiels sur l’avenir même de nos enfants et de nos jeunes, dans leur capacité à faire société en France, mais également dans leur possibilité à être citoyens du monde.

Il ne s’agit ni de concurrence, ni de compétition entre les pays de l’OCDE, mais bien d’une inspiration et d’une coopération dans laquelle les pistes intéressantes des uns doivent ouvrir la route aux autres : une pédagogie coopérative de niveau internationale bienvenue.


Denis ADAM, Belgrade le 07 décembre 2016

 

Sélectionnés pour vous
+ d’actualités nationales

On aime souvent citer la sentence (qui semble venir du Québec) selon laquelle « lorsqu’on s’observe on se désole, mais quand on se compare, on se console ». Si cette sagesse est salutaire pour le moral individuel et collectif, elle risque de nous priver d’une certaine lucidité. En effet s’il n’est nullement question de s’auto-flageller, il convient de s’inspirer également de ce qui se fait ailleurs. Les résultats de l’évaluation internationale PISA qui viennent de paraître, comme les travaux du comité syndical européen de l’Education actuellement en congrès à Belgrade nous y invite largement.

Il va de soi que la priorité donnée à l’Education n’est pas une réalité partout dans le monde. Nombreux pays dans le monde sont loin d’offrir une scolarité complète à l’ensemble des enfants et des jeunes. Les filles sont trop souvent encore les victimes d’une discrimination éducative. Les données internationales mettent en évidence que les effets des crises économiques se font ressentir et provoquent un ralentissement du développement de la scolarisation dans de nombreux pays -en particulier parmi les plus pauvres. Même en Europe, nombreuses situations sont ou deviennent difficiles.

En comparaison, l’investissement de la France pour l’Education n’est certes pas contestable, même si elle est variable d’un gouvernement à l’autre. Mais -puisqu’aucun consensus politique n’est réalisable sur les conceptions et les évolutions du système d’Education français- l’alternance des orientations et des réformes conduit souvent à une illisibilité et à une trop faible efficacité. Les successions des résultats des évaluations trisannuelles PISA est à ce titre riche en enseignement. De 2006 à 2015, il n’y a eu quasiment aucun progrès et les inégalités se creusent entre les élèves issus des milieux favorisés et ceux venant des familles les plus éloignées de la culture scolaire.

Si, longtemps, les dirigeants français se sont satisfaits de répéter (sans fondement) que nous avions la meilleure école du monde, aujourd’hui il apparaît que le bilan plus critique soit partagé. Ce sont dorénavant les solutions à mettre en œuvre qui vont divergence.

L’OCDE relève quatre défis que doit relever la politique éducative en France :

rendre le système éducatif plus équitable en France : soutenir les élèves et les établissements défavorisés
– lutter contre l’échec scolaire dès le plus jeune âge
– améliorer la qualité de l’enseignement et de la transmission du savoir dans le primaire et le secondaire, et revaloriser le métier d’enseignant
– rehausser la qualité et la valorisation des filières professionnelles au lycée

Mais les recommandations de l’organisation internationales ne se limitent pas à critiquer ou à donner des leçons. Elles sont accompagnées par l’exemple de nombreuses réformes qui ont été mises en œuvre dans d’autres pays de l’OCDE et qui -pour grande partie- ont permis de réelles évolutions positives.

Ainsi on peut retenir que les systèmes éducatifs les plus performants reposent sur un triptyque qui allient :
– Une formation de qualité pour les enseignants et globalement pour l’ensemble des personnels d’éducation, tant au niveau initial qu’au long de la carrière, alliant à la fois contenu disciplinaire et compétences pédagogiques
– Une mixité des origines sociales, culturelles et ethniques des élèves et une implication réelle de ceux-ci dans l’évaluation du système d’enseignement qu’ils vivent

– Une éducation partagée entre tous les acteurs, étendue à la mise en réseau des établissements afin que l’expertise des uns bénéficie aux autres.

A l’inverse, on constate des corrélations qui doivent interrogées. Ainsi plus le tôt de redoublement est important et plus l’échec scolaire est patent. Or dans ce domaine la France est de loin au premier rang. Le recul de la Suède (dans le classement Pisa) s’explique en partie par la disparition de la sectorisation scolaire et donc par un affaiblissement de la mixité scolaire.
Ces enseignements doivent être pris en compte dans la construction de la politique éducative en France.

Même si les réalités historiques, sociales, politiques, culturelles et donc éducatives sont différentes d’un pays à l’autre, nous ne vivons pas isolés. Nous ne pouvons continuer à agir comme si nous étions dans une bulle. D’autant que les politiques européennes et internationales ont des implications sur les attentes liées à l’Education.

Les résultats de notre système d’Education ont des effets essentiels sur l’avenir même de nos enfants et de nos jeunes, dans leur capacité à faire société en France, mais également dans leur possibilité à être citoyens du monde.

Il ne s’agit ni de concurrence, ni de compétition entre les pays de l’OCDE, mais bien d’une inspiration et d’une coopération dans laquelle les pistes intéressantes des uns doivent ouvrir la route aux autres : une pédagogie coopérative de niveau internationale bienvenue.


Denis ADAM, Belgrade le 07 décembre 2016