Montpellier, Numérique et Intelligence Artificielle Où sont les femmes ?

Le Haut conseil à l’égalité (HCE) s’est penché sur la place des femmes dans les contenus numériques et les métiers de la filière numérique. Dans un rapport publié le 7 novembre dernier, il conclut que les femmes y sont invisibilisées, stéréotypées et victimes de sexisme.

« Quelle est la place des femmes dans le numérique ? »

Le HCE dresse le constat d’un secteur  « entièrement imprégné de sexisme ». Les femmes sont invisibilisées, stéréotypées ou victimes de sexisme sur les réseaux sociaux, dans les parcours scolaires et professionnels, et dans la conception des algorithmes et outils numériques.  Concrètement, le HCE a analysé cent contenus les plus vus sur YouTube, TikTok et Instagram et auditionné une quarantaine d’experts et d’expertes de tous les secteurs y compris l’Éducation nationale et l’enseignement supérieur. Les résultats sont consternants. Sur Instagram 68 % des contenus propagent des stéréotypes de genre, 22 % des contenus diffusent des propos à caractères sexistes. YouTube est « le théâtre du monopole masculin et le vecteur de valeurs virilistes », avec 83 % des personnages principaux masculins et 24 % des contenus contenant des éléments de violence. Seulement 8 % des vidéos sont faites par des femmes. Sur TikTok, 61 % des vidéos présentent des comportements stéréotypés masculins et 42,5 % des séquences d’humour et de divertissement contiennent des représentations dégradantes des femmes. Le rôle modèle de la femme qui y est représenté est  maternel, soumis, réduit au second rôle. Les réseaux sociaux participent au triple processus d’invisibilisation des femmes, de reproduction des stéréotypes de genre et de diffusions de la violence symbolique et physique envers les femmes, ce qui soulève la question de la responsabilité des plateformes dans la perpétuation des inégalités et de la violence en ligne. Les plateformes étant dirigées par des hommes pour des hommes, la situation perdure. Le numérique n’est pas uniquement un reflet de l’inégalité entre les femmes et les hommes, il est un moteur accélérant et amplifiant les biais sexistes de notre société.

Ces inégalités trouvent leur source à l’école où la spécialisation genrée des filières écarte les filles des formations scientifiques ou technologiques. Selon les dernières données disponibles, seules 7% des adolescentes déclarent avoir envie de s’orienter vers le numérique, contre 29 % des garçons. À la rentrée 2022-2023, les femmes représentaient 31% des inscrites dans des formations scientifiques dont 23 % en informatique.  La présidente du HCE, Sylvie Pierre-Brossolette, saluait en novembre 2023 l’initiative prise  Élisabeth Borne et son programme TechPourToutes censé être opérationnel pour la rentrée scolaire 2024. L’objectif de ce programme d’accompagner 10 000 jeunes filles dans leurs études supérieures dans le numérique nécessite avant cela d’être aux côtés des filles aux moments cruciaux de l’orientation au collège, en seconde avec le choix des spécialités et en terminale avec les vœux sur Parcoursup. Le HCE préconise de créer un système de bonification dans Parcoursup pour les filles qui choisissent les filières numériques. Il recommande également d’imposer des quotas de filles dans les lycées, ainsi que dans l’enseignement supérieur pour les filières numériques, avec des programmes d’accompagnement.

Côté professionnel, le secteur numérique est largement dominé par les hommes et caractérisé par une forte culture sexiste. Seulement 29 % des effectifs du numérique en France étaient des femmes en 2020, dont 16 % dans les métiers techniques. En France, ce serait même la seule discipline scientifique dans laquelle on constate une diminution aussi importante des femmes. Alors qu’il y a 40 ans, les femmes représentaient 20 % des effectifs dans le secteur informatique, elles ne seraient plus aujourd’hui que 12 % à travailler dans le numérique (source : insee). Les algorithmes  sont de plus en plus présents dans notre quotidien. Or, l’intelligence artificielle est la reproduction de l’intelligence de ses concepteurs qui sont principalement des hommes. Un algorithme créé par un homme ne se comporte pas tout à fait de la même manière que celui développé par une femme. Les algorithmes ne sont ni neutres ni objectifs ils puisent dans d’immenses bases de données souvent stéréotypées, d’où le risque d’inscrire dans la durée les biais des concepteurs si rien n’est fait pour contrecarrer cela.

Il est urgent de prendre des mesure pour encourager et accompagner les femmes dans l’univers numérique. Parce qu’un algorithme conçu par une femme ne donnera pas les mêmes résultats qu’un algorithme conçu par un homme, il faut veiller à ce que des femmes et des hommes soient intégré.es dans la conception des algorithmes.  Il y a urgence à concevoir une Intelligence artificielle éthique et responsable, à commencer par l’État qui pourrait imposer la mise en place de garanties pour un codage non biaisé labellisé pour tous les algorithmes conçus et développés pour les services publics, pour l’école. L’intelligence artificielle est une révolution scientifique, technique, culturelle, économique et sociale qui transforme les sociétés et bouleverse nos vies. Son incidence est cruciale sur l’égalité entre les femmes et les hommes. Il est donc important que les algorithmes soient conçus de manière égalitaire et inclusive.

L’UNSA Education participe activement à la réflexion et à l’action pour faire de l’IA un moteur de l’égalité entre les femmes et les hommes.