En lien avec l'actualité

Voie professionnelle : Une fondation propose 5 recommandations évaluées à 870 millions d’euros pour lutter contre le décrochage

Break Poverty Foundation, un fonds de dotation au nom anglicisé installé à Paris qui s’est donné pour vocation de lutter contre les déterminismes sociaux a publié en cette rentrée une étude détaillée sur les décrocheurs de la voie professionnelle*. Elle évalue à 870 millions d’euros le montant que coûteraient ses recommandations pour faire baisser de moitié ce phénomène de décrochage. Selon elle, cet « effort financier [est] largement à notre portée ». Chiche.

Encore une énième enquête sur un sujet cent fois traité ? C’est la question qu’on est appelé à se poser avant de se plonger dans la lecture de cette étude, très documentée, sur la voie professionnelle. Cette fois cependant, la réponse apportée est intéressante à plusieurs titres. Il ne s‘agit pas d’un rapport qui décrie les dysfonctionnements d’un système dans son ensemble mais se concentre exclusivement sur le fléau du décrochage et les solutions possibles pour aider ce public en difficulté. En outre, l’étude recense avec précision la quasi intégralité des mesures et dispositifs existants, pioche dans des solutions trouvées ailleurs en Europe pour remédier au problème et présente des recommandations d’autant plus concrètes qu’elles sont chiffrées : 870 millions d’euros.

Trois grands axes d’action

Bien que cette somme apparaît « surréaliste » à l’heure des discussions tendues sur le futur budget de la Nation, l’étude de la fondation mérite donc un détour que nous avons réalisé. Les 5 préconisations peuvent se décliner en 3 grands axes : mieux soutenir les élèves en difficulté à intégrer puis à suivre sans décrocher en voie professionnelle, mieux les aider à s’insérer à la sortie et à les sécuriser dans l’emploi, et enfin renforcer l’appui aux équipes pédagogiques avec des moyens dédiés.

Sur le premier axe, la fondation s’inspire du modèle portugais et des prépa-apprentissage en proposant une césure optionnelle en fin de classe de 3e permettant de remobiliser les élèves en difficulté scolaire, avec rétribution et certification en fin d’année dans l’optique de pouvoir intégrer la voie professionnelle s’ils le désirent. Ce sont 20.000 élèves qui pourraient être accompagnés ici chaque année pour un coût de 500 millions d’euros, alors que le Parcours aménagé de formation initiale (Pafi) actuel ne concerne que 561 élèves (en 2023-2024).

Haut degré d’individualisation

Pour favoriser la formation et l’entrée en apprentissage de jeunes en difficulté sociale et scolaire, l’étude déplore la fin du dispositif de prépa-apprentissage financé par le Plan d’investissement dans les compétences (PIC) à hauteur de 200 millions d’euros et propose de le poursuivre en le centrant sur les élèves les plus en difficulté. Le dispositif avait bénéficié à 60.000 jeunes sur 5 ans. Cette mesure serait renforcée par un tutorat de branche adapté aux jeunes les plus fragiles en s’inspirant de l’exemple allemand VerA qui met l’accent sur un haut degré d’individualisation de l’accompagnement.

Cette idée rejoint celle d’un renforcement de l’accompagnement vers l’emploi pour les Terminales Pro et les 2e année de CAP en faisant notamment du responsable du Bureau des entreprises un point de contact régulier des acteurs du réseau pour l’emploi pour assurer un meilleur suivi du jeune une fois qu’il est en emploi ou en entreprise. Mesure qui serait élargi au public de voie pro entrant en BTS.

Les LP en REP

Du côté pédagogique, la fondation appelle à l’intégration des lycées professionnels dans les politiques de l’éducation prioritaire et à l’extension du Programme de réussite éducative à la voie professionnelle, extension dont le coût s’élèverait à 15 millions d’euros par an pour l’accompagnement de 15.000 élèves. Les enseignant·es du 2nd degré bénéficieraient d’un volume annuel de 18 heures de formation à l’instar de ce qui se pratique dans le 1er degré, avec un accent mis sur les pédagogies dédiées aux élèves à besoins éducatifs particuliers.

Sans entrer davantage dans les préconisations et en discuter chaque détail, avec le pour et le contre, on peut déjà se féliciter que l’étude s’attache à montrer l’importance et la primauté de l’accompagnement humain des jeunes, sans chercher à promouvoir une énième réforme, qui ne serait que systémique, sans moyens supplémentaires. Reste que c’est bien des moyens qu’il faut pouvoir mobiliser pour réussir cet accompagnement à tous les niveaux, dans et au dehors de l’établissement scolaire.

L’UNSA Éducation revendique l’égalité des droits pour chaque jeune à bénéficier d’une éducation porteuse de sens et permettant une insertion réussie dans la société. Aussi, permettre un soutien renforcé des jeunes qui sont en fragilité et en difficulté sociale et scolaire, avec un financement ad hoc, participe de cet accès à toutes et tous au grand projet républicain de la Nation.

* L’étude est disponible ici

Sélectionnés pour vous
+ d’actualités nationales