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Tests d’aptitudes physiques en 6e : le sport n’est pas que la santé

Elisabeth Borne et Marie Barsacq, respectivement ministre de l’Education nationale et ministre des Sports ont annoncé le déploiement de tests d’aptitudes physiques à l’entrée en 6e dès la prochaine rentrée pour mesurer l’état de santé des élèves. Une annonce qui fait écho à des chiffres qui interpellent, notamment ceux d’une étude de l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (Injep) indiquant qu’un collégien sur cinq ne pratique pas le sport en dehors de sa scolarité. Toutefois, aucune valorisation de l’EPS n’est à attendre à l’issue de ceux-ci.

Quelque soit l’étude sur le sujet de la santé et du sport chez les collégiens, les statistiques sont unanimement inquiétantes. Pour l’Injep, 39 % des collégiens pas ou peu sportifs pensent que le cours d’EPS n’incite pas à faire du sport en dehors des heures de classe. Selon le ministère de la Santé, 37 % des enfants âgés de 6 à 10 ans et 73 % des adolescents de 11 à 17 ans n’atteignent pas les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui préconisent au moins 60 minutes d’activité physique d’intensité modérée à soutenue par jour. Enfin, une récente note de la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) indique que seuls 19,2 % des élèves de 6e sont considérés comme ayant une qualité physique satisfaisante.

Pas seulement les écrans

Plusieurs travaux scientifiques matérialisent, les uns après les autres, le fait pressenti d’une sédentarisation croissante des jeunes, entre autres à cause des écrans. Ainsi, une étude menée par le professeur Sébastien Ratel, maître de conférences en Staps, a révélé que la force musculaire des jeunes de 10 à 16 ans a diminué de 25 % depuis 1990 notamment pour cette dernière raison. Mais d’autres arguments peuvent être allégués : l’éloignement des infrastructures sportives, le coût financier, le manque de temps, l’absence de motivation, comme le rappelle l’étude de l’Injep qui a élaboré cinq catégories de jeunes pour définir le rapport qu’ils·elles entretiennent avec le sport. Ils·elles se partagent entre les « empêchés », les « isolés », les « partagés », les « non-motivés » et les « anti-sport ».

Le résultat insuffisant de la mesure du pass Sport de l’État, d’un montant de 50 euros annuels et par enfant pour aider les familles à faibles revenus à exercer une pratique sportive, résume à lui seul la difficulté à conjurer cette tendance, car un Français sur trois renoncerait à une activité sportive faute de moyens. Le Pass’Sport n’a pas atteint l’objectif escompté d’1,5 million de bénéficiaires en 2024.

L’effet JOP a fait flop

Pourtant, Paris 2024 devait déclencher un engouement pour la pratique du sport sur lequel les pouvoirs publics escomptaient surfer. Mais un an après, l’effet Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) est retombé à plat, suscitant de la frustration de la part des différentes fédérations. Le ministère des sports a revu très à la baisse son budget « alors qu’il aurait pu maintenir un peu l’effort » et « aucune anticipation au sein des différents ministères n’a permis d’absorber l‘afflux de nouveaux adhérents dans les clubs », explique Tony Martin, secrétaire général du Snaps UNSA. Fautes de places et d’installations sportives, ces nouveaux adhérents potentiels de club, promis par l’effet JOP, ne sont pas restés : l’État n’avait pas interrogé les professionnels du terrain sur les besoins et les orientations à envisager.

Vers les élèves qui en ont le plus besoin

Du côté des mesures scolaires, le dispositif « 30 minutes d’activité physique quotidienne (APQ) à l’école » instauré dans le primaire a été poussif. Lancé en 2020, le dispositif n’est effectif que dans 42 % des établissements actuellement et l’autre mesure facultative des « 2 heures supplémentaires au collège ne profitent qu’à ceux qui font déjà du sport », déplore David Lelong, référent EPS au SE-UNSA. « Il aurait fallu les inscrire dans l’emploi du temps ». Et de regretter, lui aussi, que l’éclairage sur l’EPS n’est pas venu après les JOP, nos ministres successifs préférant détourner cet investissement dans le sport vers une dimension nullement disciplinaire et pédagogique au profit de mesures qui relèvent plutôt de la santé, en instaurant des tests d’aptitude physiques à l’entrée en 6e comme il l’a fait il y a cinq ans avec l’APQ. Et d’ailleurs, « quelles conséquences pour les élèves qui échoueraient à ces tests ? », interroge le SE-UNSA, qui doute que leurs résultats soient un jour mis au profit de plus d’EPS pour les élèves qui en auraient le plus besoin.

« Il y a une absence d’une vraie vision de la pratique sportive sur le plan scolaire et sur les temps périscolaires », conclut Tony Martin, soulignant qu’il ne revient pas à l’école de traiter le problématique de la sédentarisation des jeunes.

Comme le souligne le ministère des Sports, l’activité physique et sportive doit avoir la place qu’elle mérite dans le quotidien de notre jeunesse, de la cour d’école jusqu’aux bancs de l’université.

L’UNSA Éducation et ses syndicats ne peuvent que soutenir cette ambition, à condition que soient mises en avant les principales dimensions du sport scolaire, périscolaire et de l’EPS : leur apport disciplinaire dans les apprentissages et la construction physique et psychique de chaque jeune, et les valeurs collectives éthiques et citoyennes qu’ils promeuvent.

La mise en place des tests d’aptitudes physiques en 6e, après l’APQ, aurait pu conduire à la valorisation de l’EPS. Ce n’est manifestement pas le cas et nous le déplorons, tout comme les politiques publiques qui semblent accorder la priorité à sa dimension « santé ».

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