Analyses et décryptages

Pays-Bas : des choix politiques décisifs pour l’éducation et l’enseignement supérieur

Le congrès de l’Algemene Onderwijsbond (AOB), première organisation syndicale de l’éducation aux Pays-Bas, à la fin novembre, était l’occasion de revenir sur les choix éducatifs différents que font les pays européens pour leur système éducatif. Cours en anglais, autonomie poussée des établissements, syndicalisme joyeux, nombreux sont les sujets intéressants à observer depuis l’étranger. Retour sur les moments forts de ce congrès où l’UNSA Education était invitée.

Le congrès de l’AOB a lieu tous les 3 ans et prend la forme, au-delà d’un moment statutaire limité à une demi-journée, d’un festival de l’éducation où plusieurs temps forts sont proposés aux membres de l’AOB et aux invités internationaux. Ces temps forts prennent la forme :

– De plénières qui donnent la parole à des humoristes, à des essayistes ou à des personnalités qui interrogent l’école avec un pas de côté, par l’humour, par la caricature ou par la prise de hauteur.

– de speed-datings où les participants viennent questionner des partenaires extérieurs et des partenaires internationaux sur un aspect précis de l’école, l’entrée métier par exemple pour les syndicats français.

– de la musique, du chant, des stands d’information, de maquillage, où tout le monde se rencontre autour d’un goûter

– d’ateliers thématiques d’échanges sur un sujet précis, ici l’intelligence artificielle

– de remise d’un prix de l’engagement qui vient récompenser une action forte pour l’éducation.

Ce syndicalisme offensif, joyeux, est inspirant car cohérent avec la volonté d’être acteur d’un système éducatif et déterminé pour le changer.

Un contexte politique difficile

La France n’est pas le seul pays européen à connaître une instabilité marquée, bien au contraire. Les échanges avec les partenaires étrangers permettent d’observer la progression des discours ou du pouvoir de l’extrême-droite, en Italie, en Flandre, en Allemagne, au Royaume-Uni. Avec une cohérence forte, quand l’école est souvent en ligne de mire. Aux Pays-Bas par exemple, l’extrême-droite a lancé un numéro de téléphone destiné aux parents pour dénoncer l’influence des idées gauche dans le cadre scolaire.

Lors des dernières élections parlementaires aux Pays-Bas, aucune majorité claire ne s’est dégagée. Le parti modéré D66, la coalition de gauche groenlinks/PVDA, les chrétiens-démocrates, les libéraux seront obligés de travailler ensemble, s’ils veulent éviter de laisser le pouvoir à la droite extrême du VVD.

Peu de débats éducatifs de fond

Durant la campagne électorale, l’éducation n’était pas forcément au centre du débat politique. Les rares sujets qui émergent sont les coupes budgétaires ou encore la pénurie d’enseignants, deux sujets qui se retrouvent dans toute l’Europe. Pourtant, aux Pays-Bas, ce n’est pas forcément la rémunération des enseignants qui pose problème puisqu’un enseignant gagne de 4000 à 7000 euros (avant impôt) selon son ancienneté et son niveau de responsabilité. Le problème est plus large, autour de la charge de travail, des missions supplémentaires qui se rajoutent (remplacement, rencontres parents, responsabilités en établissement) et qui épuisent les collègues. Un sujet que l’AOB a voulu poser dans la négociation collective pour limiter ces missions supplémentaires, sans succès pour l’instant.

A l’université aussi, les coupes budgétaires sont importantes, avec des suppressions de postes à la clé, des difficultés pour financer la recherche, des menaces sur l’accueil des étudiants étrangers. Là aussi, des sujets qu’on retrouve en France. Une autre problématique émerge avec la remise en cause des cours en anglais qui s’étaient largement répandus aux Pays-Bas. Et par contrecoup des difficultés pour les élèves et les enseignants qui s’étaient engagés dans ces parcours.

Une organisation engagée pour la transformation éducative

L’AOB accompagne ses adhérents par un conseil juridique, visite les écoles pour accompagner les équipes pour mener un dialogue social important à l’échelle des établissements et des chaînes d’établissement (privées ou confessionnelles) puisque c’est dans ce cadre que les rémunérations, le temps et l’organisation du travail sont encadrés. Le niveau national ne fait qu’encadrer les contenus pédagogiques de référence et l’inspection des établissements (un modèle équivalent se retrouve en Angleterre et en Suède).

L’AOB permet à ses adhérents de s’engager dans des réseaux et des groupes de travail thématiques pour construire les revendications syndicales, sur l’écologie, l’intelligence artificielle, l’inclusion, la diversité ou encore la démocratie. Ce syndicat, actif dès les années 1920 pour contribuer à la construction des institutions internationales des syndicats de l’éducation, mène aussi de nombreux projets de coopération éducative et syndicale avec des pays en développement.

Plus d’information sur le festival de l’éducation de l’AOB ici https://www.aob.nl/actueel/campagne/onderwijsfestival/

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